Le Gouvernement a annoncé en juillet dernier, lors du débat d'orientation sur les finances publiques, un objectif clair : ramener le déficit de 7,7 % à 6 % l'an prochain. Des efforts sont demandés à l'ensemble des acteurs de la dépense : l'Etat, les collectivités territoriales, via le gel des dotations, la sécurité sociale. Chacun doit prendre la mesure de l'impact de la crise de 2008-2009, dont les comptes publics, et tout particulièrement les comptes sociaux, portent encore les stigmates. Le Gouvernement se refusant à augmenter les prélèvements obligatoires, qui sont parmi les plus élevés des pays développés, nous devons maîtriser la dépense. C'est le seul moyen de préserver notre modèle social, l'un des plus redistributifs au monde, qu'il faut adapter aux évolutions de la société.
Le déficit du régime général en 2010 est estimé à 23,6 milliards, alors que la commission des comptes annonçait 27 milliards. La masse salariale a augmenté plus rapidement que prévu : nous tablons désormais sur une hausse de 2 % pour 2010 et de 2,9 % pour 2011. En matière d'emploi, le pire semble être derrière nous ; le marché du travail se stabilise, mais la situation n'est pas encore normalisée, comme le montrent les chiffres du chômage de septembre. Décalage habituel, les entreprises ont cessé de supprimer des emplois mais hésitent encore à embaucher. Toutefois, le secteur marchand recommence à créer des emplois pérennes.
La stratégie du Gouvernement a porté ses fruits. La France a réagi dès le début de la crise en acceptant un effondrement de ses recettes fiscales sans précédent : moins 54 milliards d'euros, dont 28 rien que sur l'impôt sur les sociétés. Non seulement le Gouvernement n'a pas augmenté les impôts pour compenser cette baisse de recettes, mais il a soutenu l'activité par un plan de relance, engagé des réformes structurelles, notamment en faveur de l'emploi, et mis en oeuvre des investissements d'avenir à travers le grand emprunt. Les amortisseurs sociaux ont bien fonctionné et la France a globalement mieux résisté que ses voisins. En refusant d'augmenter les impôts mais aussi d'arroser le sable, le Gouvernement a remporté son pari, preuve que le système redistributif français est efficace.
L'excédent du panier fiscal - 1,6 milliard en 2010 - vient compenser les allégements généraux de cotisations patronales. Il sera mobilisé pour financer la dynamique plus forte que prévu de certains dispositifs en faveur de l'emploi. La crise a conduit à réévaluer à la baisse le coût des allégements des charges sociales tandis que l'Etat dépensait davantage pour soutenir l'emploi. Nous rééquilibrerons les choses en loi de finances rectificative en rendant pérenne cette affectation.
Le financement de la sécurité sociale est garanti par la maîtrise des dépenses et de la dette sociale. Le projet de loi de finances et la loi de programmation des finances publiques fixent une trajectoire de réduction du déficit de 40 %, soit 60 milliards : c'est historique. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale s'inscrit dans cette stratégie de maîtrise des finances publiques : respect de la norme zéro valeur, stabilisation des dotations aux collectivités locales, réduction des niches fiscales et sociales à hauteur de 10 milliards, réforme des retraites, strict respect de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam) fixé à 2,9 pour 2011 puis à 2,8 % pour les années ultérieures.
Le produit de la réduction des niches sera affecté à 70 % au financement de la sécurité sociale : 3,5 milliards provenant de la suppression des niches des sociétés d'assurance seront affectés à la branche famille ; 3,8 milliards, dont 3 milliards provenant de niches, financeront la réforme des retraites, sur lesquels 335 millions permettront, via le fonds de solidarité vieillesse (FSV), le maintien des soixante-cinq ans pour les parents de trois enfants et d'enfant handicapé ; 485 millions viendront abonder la branche maladie. L'augmentation de 0,1 point de la cotisation patronale, pour 450 millions, permettra le retour à l'équilibre de la branche AT-MP. La contribution sur les hauts revenus et les revenus du capital rapportera 500 millions dès l'an prochain. En tout, c'est un effort de plus de 8 milliards de réduction des déficits sociaux.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale traduit les mesures financières de la loi organique relative à gestion de la dette sociale et de la loi portant réforme des retraites, qu'il s'agisse des stocks-options - à ne pas mettre sur le même plan que les actions gratuites attribuées à nombre de salariés -, des retraites chapeau, des allégements généraux de cotisations sociales. D'autres mesures fiscales figureront dans le projet de loi de finances. Le FSV prendra en charge une partie des dépenses de solidarité versées par les régimes de base au titre du minimum contributif.
Le traitement de la dette sociale a trouvé une solution équilibrée avec le transfert de 130 milliards à la caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades), qui correspond à une fraction de la CSG de la branche famille. Nous nous engageons à assurer les recettes de la branche famille d'ici 2013. Nous poursuivrons la politique de réduction des niches, ce qui revient à réduire les dépenses de l'Etat. A compter de 2011, l'excédent du panier de recettes sera affecté intégralement et définitivement à la sécurité sociale : 2 milliards en 2011, 1,8 milliard en 2012, 1,6 milliard en 2013, 1,3 milliard en 2014. Nous clarifions ainsi les relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale.
Pour la première fois depuis sa création en 1997, l'Ondam aura été respecté en 2010, grâce à une vigilance permanente. Mise en réserve des crédits, prise en compte des sous-consommations, souci de bonne gestion : nous sommes capables de maîtriser la dépense sans nuire à la qualité des soins. Pour réaliser l'économie de 2,4 milliards nécessaire pour tenir l'Ondam, il faut améliorer l'efficacité et la performance du système de soins. Cela exige de recentrer l'assurance maladie sur le financement des dépenses les plus utiles médicalement, en confortant son caractère solidaire : le reste à charge des ménages n'est que de 8 % en France, contre 12 % en Allemagne et 16 % en Suède.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale traduit certaines propositions du rapport Briet. Le comité d'alerte donnera un avis sur la construction de l'Ondam, pour en améliorer la sincérité : saisi sur l'Ondam pour 2011, celui-ci n'a pas relevé d'erreur. Les crédits mis en réserve pourront être mobilisés si de nouvelles dépenses se révèlent nécessaires en cours d'année, sans modifier l'Ondam. Le projet de loi de programmation des finances publiques fait désormais de la mise en réserve la règle pour tous les PLFSS.
Au total, le déficit du régime général passera de 23,1 à 21 milliards. Je souhaite discuter avec le Sénat du dispositif de contrôle de la tarification à l'activité par l'assurance maladie, que l'Assemblée nationale a affaibli. Le Gouvernement a renforcé les outils techniques et juridiques pour lutter contre les fraudes, qui écornent notre contrat social : répertoire national commun de la protection sociale, fichier des bénéficiaires de la branche famille, échanges accrus entre les administrations publiques et pénalités administratives plus dissuasives.
Je serai dans l'hémicycle aux côtés de mes collègues lors du débat pour répondre à vos questions.