La loi du 21 août 2003 comportait peu de dispositions favorables aux salariés. La seule de ce type est sans doute celle qui instaurait la possibilité, pour les salariés ayant effectué une carrière longue, de racheter des trimestres de cotisation.
Cette disposition répondait à une attente forte des salariés concernés. Il est donc parfaitement logique qu’elle ait rencontré un important succès. Or le Gouvernement nous propose aujourd’hui de durcir les conditions d’accès au bénéfice de cette mesure. Au demeurant, cet article fait suite à la lettre interministérielle du 7 juillet dernier et à la circulaire de la CNAVTS du 25 juillet, qui suscitent les plus vives critiques de la part des organisations syndicales. Ladite circulaire, qui limite l’accès au dispositif de la retraite anticipée pour carrière longue en fonction de l’année de naissance et non pas de l’année de départ, fait actuellement l’objet d’un recours devant le Conseil d’État.
Très concrètement, les trimestres de cotisation rachetés au titre des périodes d’études supérieures ou d’années d’activité incomplète, qui ne correspondent pas à des trimestres validés au titre d’une activité professionnelle, ne pourront donc plus être pris en considération pour l’ouverture du droit à la retraite anticipée. Qui plus est, du fait du lissage de l’augmentation d’un an de cotisation sur quatre années, ceux qui ont la malchance d’être nés la quatrième année, c’est-à-dire en 1952, devront travailler quatre trimestres supplémentaires. Ils n’en ont même pas été prévenus… La douloureuse réalité est que vous les sacrifiez, monsieur le ministre.
Dans les faits, vous revenez sur les engagements pris par l’actuelle majorité lors du vote de la loi du 21 août 2003. Il aurait été à tout le moins logique que cette volte-face concerne non pas uniquement ce volet de la réforme, mais l’ensemble de celle-ci. Or l’augmentation de la durée de cotisation prévue à l’article 5 est, quant à elle, bien maintenue ; pis, elle est renforcée. Ainsi, seul le dispositif favorable aux salariés passe à la trappe.
Enfin, quel crédit peut-on accorder à l’argumentaire déployé par le Gouvernement selon lequel toute la responsabilité de cette injuste modification incomberait aux assurés qui auraient racheté des trimestres sans relation avec une activité professionnelle effective ?
Une fois encore, l’exécutif entretient la division entre nos concitoyens. Quand ce ne sont pas les chômeurs qui fraudent l’assurance chômage, ce sont les assurés sociaux qui mettent en difficulté l’assurance maladie. Désormais, ce sont ceux qui ont travaillé de longues années qui sont pris pour cible !
La logique voudrait que les pouvoirs publics accentuent les contrôles et sanctionnent au cas par cas en tant que de besoin. Mais, une fois encore, la justice n’est que le prétexte d’une politique dont le seul objectif est de répondre à des impératifs comptables et de remettre en cause les droits sociaux d’une grande partie des ayants droit.