Intervention de Gérard Larcher

Réunion du 18 novembre 2008 à 16h00
Éloge funèbre d'andré boyer sénateur du lot

Photo de Gérard LarcherGérard Larcher, président :

C’est le mercredi 24 septembre, deux jours à peine après la session extraordinaire à laquelle il avait participé, qu’André Boyer, sénateur du Lot, s’est éteint, à son domicile parisien, terrassé par un malaise brutal.

À l’annonce de cette fin que rien ne laissait présager, l’émotion ressentie a été à la hauteur de la place importante qu’occupait André Boyer au sein de notre Haute Assemblée.

Sénateur du Lot depuis vingt ans, André Boyer avait, au fil des ans, imprimé sa marque par sa compétence, sa disponibilité et son infinie courtoisie.

Né le 14 mai 1931 à Bretenoux, dans ce département du Lot qu’il représentera si bien dans notre hémicycle, notre collègue avait embrassé la carrière médicale.

Ce choix professionnel initial est hautement symbolique du destin politique qui sera celui d’André Boyer.

Généraliste, « médecin de campagne », André Boyer ne ménagea ni son temps ni sa peine envers ses patients et, singulièrement, les plus modestes. Ses débuts dans la vie professionnelle concrétisaient d’emblée sa vocation au service des autres.

À force de travail, il obtint sa spécialité en radiologie. Il exerça alors son nouveau métier de radiologue en qualité de chef de service à l’hôpital de Saint-Céré, avec le même humanisme que celui qui marquait l’exercice de la médecine générale de campagne.

Cette force de travail, André Boyer en fera la preuve toute sa vie.

Par sa naissance, notre collègue ne pouvait manquer de recevoir en héritage le goût de la vie publique. Son grand-père et son père avaient en effet exercé, tout au long du XXe siècle, les fonctions de conseiller général et de maire de Saint-Céré.

C’est donc tout naturellement sur sa terre natale qu’André Boyer a débuté une longue et brillante carrière politique qui l’amènera à assumer de multiples mandats tant locaux que nationaux.

André Boyer fit presque simultanément son entrée au conseil général du Lot. Il honora ce mandat, auquel il était très attaché, jusqu’au printemps dernier. Il travailla avec enthousiasme et détermination au service de son cher département pendant plus de vingt-cinq ans.

Il exerça ainsi au conseil général d’importantes responsabilités, notamment dans le domaine financier : il fut, tour à tour, rapporteur général du budget, puis président de la commission des finances et, enfin, vice-président de l’assemblée départementale.

Du fait de sa compétence et de son sens aigu du service de la République, André Boyer fut sollicité par notre ancien collègue Maurice Faure, dont il était proche et dont il partageait les convictions, pour devenir son suppléant lors des élections sénatoriales de 1983.

Son expérience du terrain, son amour de cette terre du Lot et sa profonde connaissance des perspectives et des enjeux locaux conféraient à André Boyer une vocation quasi naturelle pour rejoindre le Sénat. Cette vocation devint réalité en juin 1988, lorsque Maurice Faure, devenu une nouvelle fois membre du Gouvernement, alors dirigé par Michel Rocard, lui céda son fauteuil au sein de notre assemblée.

André Boyer allait dès lors représenter le Lot dans notre hémicycle, et cela sans interruption jusqu’à son dernier jour. Après avoir été brillamment réélu en septembre 1992, il le fut à nouveau en septembre 2001. André Boyer fut ainsi en quelque sorte l’un des héritiers spirituels de Maurice Faure au Sénat, où il fit notamment vivre les convictions européennes qu’il partageait avec lui.

Il apporta également son sens de la mesure et des solutions justes et équilibrées au sein du Rassemblement démocratique et social européen, auquel il resta fidèle tout au long de ses mandats sénatoriaux, sous les appellations successives qu’a connues ce groupe.

Au cours de ces deux décennies au Sénat, André Boyer allait donner toute la mesure de ses engagements et de sa valeur humaine. Alors que, par sa profession et son expérience politique locale, André Boyer aurait pu intervenir avec autorité sur les questions tant sociales que de santé, il se spécialisa dans les problèmes de défense et se passionna pour les questions internationales.

Membre de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, il en devint le vice-président, unanimement respecté et apprécié de 1998 à 2008.

Sa participation active aux travaux de notre assemblée, notamment la présentation de nombreux rapports sur des projets de loi autorisant la ratification de conventions ou de traités internationaux, fera d’André Boyer, au fil des ans, un interlocuteur écouté et avisé dans le domaine des affaires étrangères. Par ses interventions claires et concises, sur des sujets souvent complexes et délicats, il explicitait de façon didactique et synthétique, dans un langage choisi, les questions internationales les plus diverses.

En matière de défense, c’est surtout le secteur de la marine nationale qu’André Boyer affectionnait. Il en était devenu au fil des ans un expert reconnu, en tant que rapporteur pour avis des crédits de la marine nationale, puis du budget du programme « équipements des forces » de la mission « Défense ».

Son intérêt pour les questions internationales avait également conduit André Boyer à assumer la responsabilité de deux groupes interparlementaires d’amitié en qualité de président délégué pour le Malawi du groupe France-Afrique australe, et de président délégué pour l’Estonie du groupe France-pays Baltes.

Grâce à sa compétence, André Boyer avait été désigné par les gouvernements successifs pour devenir aussi un membre assidu de la délégation de la commission des affaires étrangères du Sénat qui participe chaque année à l’Assemblée générale des Nations unies.

Il analysait avec finesse les causes des conflits et des crises. Il n’était jamais insensible aux injustices, au développement des extrémismes ni aux questions relatives au développement des pays les plus pauvres, restant fidèle aux valeurs qui étaient les siennes.

Pour autant, André Boyer ne se bornait pas aux seules questions internationales et aux problèmes de défense. Ses interventions, toujours sereines – elles ont marqué les hauts fonctionnaires qui nous entourent ici -, ses questions écrites ou orales, ses propositions de loi, témoignent du large éventail de ses préoccupations, de sa curiosité d’esprit et de son inlassable dynamisme au service de ses concitoyens. Statut des handicapés, situation des personnes âgées, questions agricoles, problèmes de santé publique, environnement, anciens combattants, aucun de ces sujets ne lui était indifférent.

André Boyer fut l’incarnation de l’élu local accompli et du serviteur exemplaire de la République, ancré dans ses valeurs. Il fut un parlementaire apprécié de tous. Son parcours et son action ont enrichi notre assemblée et honoré sa réputation.

À l’heure où se répand la tentation de l’individualisme, je veux saluer en votre nom, mes chers collègues, la vie de cet homme dévoué au service de ses concitoyens.

Par un matin d’automne qui n’était pas avare de soleil, André Boyer a reçu dans sa chère commune de Saint-Céré, dans son département de naissance et d’élection, dans cette terre du Lot qui a vu tant de républicains, l’hommage ému des habitants, de ses amis et des élus de la République. Nos collègues Jean-Michel Baylet et Gérard Miquel ont exprimé en termes émouvants tout ce que nous devions à la mémoire d’André Boyer.

Le président du Sénat Christian Poncelet, a tenu à se rendre personnellement à la cérémonie pour y exprimer sa tristesse, que je sais grande, comme celle du Sénat tout entier et celle de la République. Cet adieu, au milieu des siens, sur cette terre du Lot qu’il a si fidèlement chérie et servie, se devait de trouver un écho dans cet hémicycle.

À ses collègues du groupe du Rassemblement démocratique et social européen, dont il fut l’un des membres les plus anciens, les plus fidèles et parmi les plus actifs, j’exprime la sympathie unanime de notre assemblée.

Aux membres de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, qui perd en sa personne un parlementaire et un expert assidu et de grande valeur, j’adresse l’expression de notre tristesse.

À vous, madame, à vos enfants, parmi lesquels tant de médecins, et à vos proches, à vous tous qui vivez l’émotion et la douleur d’une disparition aussi brutale, je tiens à vous assurer de la part personnelle que je prends à votre peine et, par ma voix, de la solidarité et de la sympathie attristée du Sénat tout entier.

Soyez assurée que la mémoire d’André Boyer restera présente dans cet hémicycle et dans l’esprit de chacun d’entre nous.

Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je vous invite à un moment de souvenir et de recueillement.

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