Intervention de Bernard Chemin

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 7 mai 2008 : 1ère réunion
Rétention administrative — Audition de M. Bernard Chemin président de la commission nationale de contrôle des centres et locaux de rétention administrative et des zones d'attente craza

Bernard Chemin, président de la CRAZA :

a relevé que, de manière générale, les conditions dans lesquelles la CRAZA avait exercé sa mission avaient toujours été précaires.

Il a rappelé que, bien que créée par la loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité, la CRAZA n'était en place que depuis le 22 mars 2006.

Il a indiqué que la commission était présidée par un magistrat nommé sur la proposition du premier président de la Cour de cassation et se composait également d'un député et d'un sénateur, d'un membre du Conseil d'Etat nommé sur la proposition du vice-président du Conseil d'Etat, d'une personnalité qualifiée en matière pénitentiaire, de deux représentants d'associations humanitaires nommés sur la proposition du ministre de l'intérieur, d'un représentant du ministre de l'intérieur et d'un représentant du ministre chargé des affaires sociales. Toutefois, il a déploré que la commission ne se soit jamais réunie au complet en raison notamment d'un absentéisme assez prononcé que la disparition annoncée de la CRAZA ne contribuait pas à résorber.

Outre l'absentéisme, il a déclaré que la CRAZA souffrait de sa confidentialité, de son manque de moyens et de la faiblesse de ses pouvoirs de contrôle. Il a rappelé que ses attributions se limitaient à veiller au respect des droits des étrangers maintenus dans les lieux de rétention administrative et les zones d'attente ainsi qu'au respect des normes relatives à l'hygiène, la salubrité, la sécurité, l'équipement et l'aménagement de ces lieux. Le contrôle ne porte jamais sur le statut juridique des personnes retenues qui relève de l'autorité administrative ou de l'autorité juridictionnelle. Néanmoins, M. Bernard Chemin, président de la CRAZA, a précisé qu'il s'était toujours efforcé d'entretenir des contacts avec l'ensemble des acteurs intervenant autour de ces lieux, y compris les magistrats administratifs et judiciaires ou l'autorité préfectorale.

Il a fait le constat que la visibilité de la CRAZA avait été atténuée par la multiplicité des intervenants : inspections générales des ministères compétents, magistrats, parlementaires, médecins, commission nationale de déontologie de la sécurité, comité de prévention de la torture, haut commissariat pour les réfugiés et associations.

Il a jugé les moyens matériels et financiers quasi-nuls, la direction des libertés publiques et des affaires juridiques du ministère de l'intérieur n'assurant plus cette mission et le nouveau ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ayant pris à grand peine le relais depuis quatre mois.

Il a indiqué que les membres de la commission ayant été désignés pour deux ans en mars 2006, le problème du renouvellement de la commission s'était posé en mars dernier. Compte tenu du retard pris pour la désignation du contrôleur général des lieux de privation de liberté, il avait été décidé de proroger la commission actuelle jusqu'en juillet 2008.

a ensuite dressé un état des lieux de rétention et des zones d'attente en France.

Il a rappelé qu'il existait en métropole :

- 25 centres de rétention administrative d'une capacité totale de 1.600 places et ayant accueilli 35.246 personnes en 2007, soit une durée moyenne de séjour de 10 jours ;

- entre 40 et 50 zones d'attente, celle de l'aéroport de Roissy concentrant la quasi-totalité des arrivées.

Il a précisé que chaque visite d'un lieu de rétention donnait lieu à un compte rendu et à des recommandations adressés au ministre compétent. Il a ajouté que chaque fois que des incidents étaient portés à sa connaissance, il s'efforçait de se rendre le plus vite possible sur les lieux.

Il a indiqué qu'aucun mineur non accompagné n'était placé en rétention, les mineurs accompagnant leurs parents uniquement pouvant s'y trouver. Il a jugé cette solution préférable à celle consistant à séparer les enfants de leurs parents en les plaçant auprès de la DDASS pendant la durée de la rétention des parents. En revanche, il a observé que la création des administrateurs ad hoc pour assister les mineurs isolés en zone d'attente n'avait pas produit les résultats espérés, le plus souvent faute de moyens.

Concernant les conditions matérielles d'hébergement, il a jugé qu'elles s'étaient beaucoup améliorées, principalement du fait de la création de nouveaux centres de rétention et de la fermeture des centres les plus vétustes. Malgré ces progrès, il a estimé que les conditions d'hébergement n'étaient certainement pas au niveau de prestations dites hôtelières.

Enfin, il s'est déclaré frappé par trois défauts majeurs du système actuel de rétention :

- la surpopulation ;

- la taille excessive des nouveaux centres de rétention administrative qui conduit naturellement à une dérive carcérale ;

- l'absence quasi complète d'activités proposées aux étrangers dans ces centres.

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