La commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Bernard Chemin, président de la Commission nationale de contrôle des centres et locaux de rétention administrative et des zones d'attente (CRAZA).
a indiqué que la situation de la CRAZA était particulière, cette commission administrative étant vouée à disparaître à compter de la mise en place du contrôleur général des lieux de privation de liberté créé par la loi n° 2007-1545 du 30 octobre 2007.
a relevé que, de manière générale, les conditions dans lesquelles la CRAZA avait exercé sa mission avaient toujours été précaires.
Il a rappelé que, bien que créée par la loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité, la CRAZA n'était en place que depuis le 22 mars 2006.
Il a indiqué que la commission était présidée par un magistrat nommé sur la proposition du premier président de la Cour de cassation et se composait également d'un député et d'un sénateur, d'un membre du Conseil d'Etat nommé sur la proposition du vice-président du Conseil d'Etat, d'une personnalité qualifiée en matière pénitentiaire, de deux représentants d'associations humanitaires nommés sur la proposition du ministre de l'intérieur, d'un représentant du ministre de l'intérieur et d'un représentant du ministre chargé des affaires sociales. Toutefois, il a déploré que la commission ne se soit jamais réunie au complet en raison notamment d'un absentéisme assez prononcé que la disparition annoncée de la CRAZA ne contribuait pas à résorber.
Outre l'absentéisme, il a déclaré que la CRAZA souffrait de sa confidentialité, de son manque de moyens et de la faiblesse de ses pouvoirs de contrôle. Il a rappelé que ses attributions se limitaient à veiller au respect des droits des étrangers maintenus dans les lieux de rétention administrative et les zones d'attente ainsi qu'au respect des normes relatives à l'hygiène, la salubrité, la sécurité, l'équipement et l'aménagement de ces lieux. Le contrôle ne porte jamais sur le statut juridique des personnes retenues qui relève de l'autorité administrative ou de l'autorité juridictionnelle. Néanmoins, M. Bernard Chemin, président de la CRAZA, a précisé qu'il s'était toujours efforcé d'entretenir des contacts avec l'ensemble des acteurs intervenant autour de ces lieux, y compris les magistrats administratifs et judiciaires ou l'autorité préfectorale.
Il a fait le constat que la visibilité de la CRAZA avait été atténuée par la multiplicité des intervenants : inspections générales des ministères compétents, magistrats, parlementaires, médecins, commission nationale de déontologie de la sécurité, comité de prévention de la torture, haut commissariat pour les réfugiés et associations.
Il a jugé les moyens matériels et financiers quasi-nuls, la direction des libertés publiques et des affaires juridiques du ministère de l'intérieur n'assurant plus cette mission et le nouveau ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ayant pris à grand peine le relais depuis quatre mois.
Il a indiqué que les membres de la commission ayant été désignés pour deux ans en mars 2006, le problème du renouvellement de la commission s'était posé en mars dernier. Compte tenu du retard pris pour la désignation du contrôleur général des lieux de privation de liberté, il avait été décidé de proroger la commission actuelle jusqu'en juillet 2008.
a ensuite dressé un état des lieux de rétention et des zones d'attente en France.
Il a rappelé qu'il existait en métropole :
- 25 centres de rétention administrative d'une capacité totale de 1.600 places et ayant accueilli 35.246 personnes en 2007, soit une durée moyenne de séjour de 10 jours ;
- entre 40 et 50 zones d'attente, celle de l'aéroport de Roissy concentrant la quasi-totalité des arrivées.
Il a précisé que chaque visite d'un lieu de rétention donnait lieu à un compte rendu et à des recommandations adressés au ministre compétent. Il a ajouté que chaque fois que des incidents étaient portés à sa connaissance, il s'efforçait de se rendre le plus vite possible sur les lieux.
Il a indiqué qu'aucun mineur non accompagné n'était placé en rétention, les mineurs accompagnant leurs parents uniquement pouvant s'y trouver. Il a jugé cette solution préférable à celle consistant à séparer les enfants de leurs parents en les plaçant auprès de la DDASS pendant la durée de la rétention des parents. En revanche, il a observé que la création des administrateurs ad hoc pour assister les mineurs isolés en zone d'attente n'avait pas produit les résultats espérés, le plus souvent faute de moyens.
Concernant les conditions matérielles d'hébergement, il a jugé qu'elles s'étaient beaucoup améliorées, principalement du fait de la création de nouveaux centres de rétention et de la fermeture des centres les plus vétustes. Malgré ces progrès, il a estimé que les conditions d'hébergement n'étaient certainement pas au niveau de prestations dites hôtelières.
Enfin, il s'est déclaré frappé par trois défauts majeurs du système actuel de rétention :
- la surpopulation ;
- la taille excessive des nouveaux centres de rétention administrative qui conduit naturellement à une dérive carcérale ;
- l'absence quasi complète d'activités proposées aux étrangers dans ces centres.
a rendu hommage au travail réalisé par la CRAZA en dépit de son manque de moyens et de sa brève existence.
a demandé si les incidents intervenus au centre de rétention de Vincennes ainsi que l'ouverture d'une zone d'attente temporaire dans une aérogare de Roissy pour faire face à un afflux soudain de demandeurs d'asile tchétchènes au début de l'année avaient fait l'objet de contrôles particuliers de la part de la CRAZA. Il a également demandé si les critiques à l'encontre des méthodes d'intervention des forces de l'ordre dans ces lieux étaient fondées ou non.
a indiqué que des incidents survenaient quasi quotidiennement dans des centres de rétention administrative et pas uniquement dans celui de Vincennes.
Il a précisé que les incidents de la nuit du 11 février 2008 au centre de rétention de Vincennes étaient intervenus à la suite du comptage des étrangers lors du coucher, cette pratique étant mal vécue par les étrangers retenus. Il a indiqué que les personnels de police affectés à la garde du centre n'ayant pu faire face au mouvement de rébellion, il avait été fait appel à la brigade anti-criminalité, qui avait employé des pistolets à impulsion électrique. Il a ajouté que ces incidents faisaient l'objet de procédures administratives et judiciaires et d'une saisine de la commission nationale de déontologie de la sécurité.
Il a souligné que le pôle de rétention de Vincennes était particulièrement propice à ce type d'incidents en raison :
- de sa taille, sa capacité d'accueil s'élevant à 280 personnes. Si administrativement il y a deux centres de rétention d'une capacité de 140 personnes, leur conception conduit à parler d'un pôle de rétention ;
- du symbole qu'il représentait pour de nombreuses associations opposées à la politique d'éloignement des étrangers en situation irrégulière.
A propos des zones d'attente, il a observé que la situation y était beaucoup plus calme, les étrangers arrivant à la frontière souhaitant généralement être le plus discrets possible. Concernant la zone d'attente temporaire de Roissy dite ZAPI 4, il a souligné que les conditions matérielles d'accueil étaient mauvaises et qu'elle était fermée à ce jour.
a souhaité connaître l'opinion de la CRAZA sur le recours à la visioconférence dans les centres de rétention et les zones d'attente.
a distingué la question de la visioconférence de celle de la tenue des audiences dans une salle délocalisée à proximité des centres de rétention et des zones d'attente.
Il a rappelé qu'il en existait dans quelques centres de rétention -à Coquelles dans le Pas-de-Calais, au Canet près de Marseille, à Cornebarrieu près de Toulouse- et dans la zone d'attente de Roissy, cette dernière salle n'étant d'ailleurs pas utilisée.
Toutefois, il a indiqué que la Cour de cassation, par trois arrêts rendus le 16 avril dernier, avait porté un coup d'arrêt au développement et à l'utilisation de ces salles en annulant les décisions des juges de la liberté et de la détention du tribunal de grande instance de Marseille au motif que la salle d'audience du Canet se situait dans l'enceinte même du centre de rétention et non, comme le permet seulement la loi, à proximité immédiate du centre.
Il a ajouté que seule la salle de Coquelles continuait à être utilisée, les autorités judiciaires locales considérant que la configuration du centre de rétention et de la salle d'audience y était différente de celle du Canet ou de Cornebarrieu. Il a indiqué que des travaux étaient entrepris dans la salle de la zone d'attente de Roissy pour mieux l'autonomiser.
Concernant la visioconférence, il a observé que les juges administratifs y seraient sans doute moins réticents que les juges judiciaires. Toutefois, il s'est interrogé sur la maturité de la technique et sur la perte de contact humain lors de l'audience.
a demandé si un contrôle efficace était mieux assuré par une multiplicité d'instances indépendantes spécialisées chacune dans un secteur précis ou s'il ne valait pas mieux créer un organisme unique de contrôle.
a répondu qu'en première analyse l'idée d'un organisme généraliste de contrôle était séduisante, à la condition qu'en son sein les anciennes instances ne perdurent pas de fait. Par ailleurs, il a craint que la création d'un organisme trop généraliste n'aboutisse à une diminution de la qualité des contrôles.
a demandé s'il ne serait pas nécessaire que les associations intervenant d'ores et déjà dans les centres de rétention comme la CIMADE puissent le faire dans les locaux de rétention.
a indiqué que la CIMADE en avait fait la demande mais que les autorités n'y avaient pas répondu favorablement jusqu'à présent. Il a déclaré soutenir cette initiative, en particulier dans les locaux de rétention administrative comme celui de Nanterre ou de Cayenne que l'importance des flux assimile en pratique à des centres de rétention.
Il a ensuite fait deux recommandations.
En premier lieu, il a souhaité que les centres de rétention et les zones d'attente soient plus ouverts sur le monde extérieur, afin d'améliorer leur image, ces lieux souffrant, souvent à tort, d'une réputation très mauvaise, et de développer les activités pour les étrangers.
En second lieu, il a jugé que la capacité des nouveaux centres de rétention -140 personnes officiellement, près de 300 lorsque deux centres sont accolés comme à Vincennes- était excessive. Il a déclaré qu'une capacité limitée de 60 à 80 personnes serait un facteur d'apaisement important.
Incidemment, il a souligné que les centres de rétention gérés par la gendarmerie nationale connaissaient beaucoup moins d'incidents et bénéficiaient d'un climat apaisé. Il a estimé que les gendarmes avaient par nature l'expérience de la vie en communauté. Inversement, il a jugé que les policiers étaient trop souvent armés et contribuaient ainsi à créer un sentiment de méfiance. Il a ajouté que la hantise de l'évasion était mauvaise conseillère et ne donnait pas nécessairement de meilleurs résultats -en 2007, dix évasions ont eu lieu au centre de rétention de Vincennes, pourtant l'un des plus sécurisés.
a salué à son tour la qualité du travail de la gendarmerie nationale, estimant qu'il faudrait en tenir compte lors du prochain débat sur l'avenir de la maréchaussée.
a déploré le projet de créer un centre de rétention de 300 places remplaçant celui du Mesnil-Amelot actuellement sous la responsabilité de la gendarmerie nationale.
Puis, M. Jean-Jacques Hyest, président, indiquant que le conseil général de Mayotte avait adopté à l'unanimité, le 18 avril 2008, une résolution demandant l'accession de cette collectivité d'outre-mer au statut de département et région d'outre-mer, a rappelé que la commission des lois avait décidé d'envoyer une mission d'information sur place, afin de dresser un bilan de la situation générale de Mayotte et de l'application du statut en vigueur.
La commission a ensuite désigné les membres de la mission d'information : MM. Jean-Jacques Hyest, président, Christian Cointat, rapporteur pour avis des crédits de la mission « Outre-mer », Mme Michèle André et M. Yves Détraigne.
Elle a décidé d'organiser le déplacement à Mayotte du 31 août au 7 septembre 2008.
Enfin, la commission a procédé, sur le rapport de M. René Garrec, à l'examen, en deuxième lecture, du projet de loi organique n° 304 (2007-2008), modifié par l'Assemblée nationale, relatif aux archives du Conseil Constitutionnel et du projet de loi n° 305 (2007-2008), modifié par l'Assemblée nationale, relatif aux archives.
a tout d'abord rappelé que le Sénat, saisi en premier lieu des deux projets de loi, avait :
- approuvé sans modification le projet de loi organique relatif aux archives du Conseil constitutionnel, considérant qu'il soumettait opportunément les archives de ce dernier à un régime de communication de droit commun, à savoir vingt-cinq ans contre soixante actuellement, même pour les documents se rapportant à l'activité du Conseil en tant que juge électoral ;
- adopté cinquante-sept amendements au projet de loi ordinaire, dont trente-neuf de la commission des lois, relevant que notre assemblée avait, en particulier, donné un statut aux archives des groupements de collectivités territoriales, qui faisaient figure d' « archives oubliées », et modifié les délais de communication proposés par le texte.
Il a insisté sur le fait que, contrairement à ce qui avait été affirmé par certains historiens, le Sénat n'avait pas cherché à consacrer le « culte du secret » mais à adopter une démarche équilibrée, conciliant la recherche historique et la préservation de la vie privée et de la réputation des personnes. Il a fait valoir que non seulement la Haute assemblée n'avait pas remis en cause le raccourcissement des délais de communication des archives publiques ayant trait à l'histoire de l'Etat et à la mémoire collective, raccourcissement proposé par les projets de loi, mais encore avait été, dans ce domaine, plus ambitieuse que le projet de loi ordinaire, et ce à travers deux avancées significatives :
- en permettant la mise en ligne des archives publiques dès l'expiration des délais de communication. Le projet de loi initial posait le principe de la communication des documents tombés dans le domaine public à « toute personne qui en fait la demande ». La suppression de cette expression, décidée par le Sénat, permet aux personnes en charge d'archives publiques de mettre en ligne, si elles le souhaitent, des documents communicables dignes d'intérêt ;
- en ouvrant plus largement les archives judiciaires audiovisuelles. Le Sénat a décidé d'assouplir le régime de communication des archives judiciaires audiovisuelles institué par la loi du 11 juillet 1985 relative à l'enregistrement audiovisuel ou sonore des audiences des juridictions en prévoyant une communication immédiate des archives judiciaires audiovisuelles dès lors qu'elle est sollicitée à des fins scientifiques ou historiques et que le procès est définitivement clos.
Il a déclaré que tout en renforçant l'objectif du projet de loi d'ouvrir plus rapidement les archives relatives à la vie publique et au fonctionnement de l'Etat, le Sénat n'avait pas souhaité cette même évolution pour les documents touchant directement la vie privée et la réputation des personnes, pour lesquels la demande de transparence est beaucoup moins légitime, et ce eu égard, d'une part, à la protection de la vie privée, consacrée tant par les textes que par la jurisprudence, d'autre part, à l'allongement de l'espérance de vie.
a indiqué qu'alors que le code du patrimoine prévoyait aujourd'hui un délai de communication de cent ou soixante ans applicable aux archives publiques susceptibles de porter atteinte au droit à la vie privée, le projet de loi fixait un délai unique de cinquante ans, ou, s'il est plus bref, de vingt-cinq ans à compter de la date du décès de l'intéressé. Le Sénat avait considéré qu'avec un tel délai de cinquante ans, certains documents sensibles tels que les affaires portées devant les juridictions et les actes authentiques établis par les notaires (par exemple les actes de vente ou les contrats de mariage) risquaient de tomber dans le domaine public du vivant des personnes concernées.
Il a souhaité dissiper deux principaux malentendus, indiquant, d'une part, que le simple souci de cohérence et d'intelligibilité de la loi avait poussé le Sénat à créer un bloc unique « droit à la vie privée » de soixante-quinze ans, incluant, outre les deux catégories de documents susmentionnées, l'ensemble des documents publics susceptibles de porter atteinte à la vie privée et à la réputation des personnes, d'autre part, que ni le gouvernement ni le Sénat n'avaient cherché à remettre en cause les possibilités de dérogations, c'est-à-dire de consultations d'archives avant l'expiration des délais de communication. Il a ajouté que le texte ne devait, selon lui, avoir aucune incidence sur le taux d'octroi des dérogations aux chercheurs, actuellement de plus de 90 %.
Présentant les modifications apportés aux textes par l'Assemblée nationale, il a précisé que les députés avaient adopté quatre amendements au projet de loi organique relatif aux archives du Conseil constitutionnel : trois rédactionnels et un donnant cinq mois au Conseil constitutionnel pour s'adapter au nouveau régime de gestion et de communication de ses archives.
Sur le projet de loi ordinaire, l'Assemblée nationale a adopté trente et un amendements, dont les plus importants concernent le raccourcissement des délais de communication.
S'agissant des documents portant sur la vie privée et la réputation des personnes, il a indiqué qu'après une rencontre avec son homologue de l'Assemblée nationale, M. François Calvet, ce dernier avait suggéré à la commission des lois de l'Assemblée nationale de maintenir le délai de soixante-quinze ans pour les documents les plus sensibles pour la vie privée ou la réputation des personnes, à savoir les documents des juridictions, les actes d'état civil, les actes notariés et les enquêtes statistiques, tout en rétablissant le délai de cinquante ans pour les documents touchant moins fortement à la vie privée, tels qu'une fiche de traitement d'un fonctionnaire mentionnant certains détails de sa vie privée, ainsi qu'à la réputation des personnes, par exemple les notes établies par les préfets sur les maires de leur département. Il a précisé que l'Assemblée nationale avait approuvé les amendements présentés en ce sens par sa commission des lois.
Après avoir rappelé que le projet de loi initial, non modifié par le Sénat sur ce point, frappait d'incommunicabilité absolue les documents susceptibles de porter atteinte à la sécurité des personnes, au même titre que ceux concernant les armes de destruction massive, il a signalé que les députés avaient décidé de porter ce délai à cent ans pour les seuls agents spéciaux et de renseignement et, implicitement, à soixante-quinze ans pour les autres personnes, considérant que tout danger est écarté pour ces personnes et leur famille à l'expiration de délais aussi longs.
Présentant les autres modifications apportées par l'Assemblée nationale, M. René Garrec, rapporteur, a indiqué qu'elles visaient :
- à favoriser la mutualisation de la gestion des archives communales. Les députés ont souhaité ouvrir la possibilité, pour la commune éventuellement désignée pour conserver les archives du groupement de collectivités territoriales dont elle est membre, de gérer également les archives des autres communes membres, et ce afin de favoriser la mutualisation de la gestion des archives communales ;
- à supprimer le dispositif incitant fiscalement à engager des travaux de restauration des archives privées classées, dispositif adopté au Sénat en première lecture, à l'initiative de Mme Morin-Dessailly, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. L'Assemblée nationale a adopté un amendement du gouvernement tendant à supprimer l'avantage fiscal au motif qu'aucune étude d'impact n'avait été engagée pour mesurer l'intérêt de la mesure au regard du manque à gagner fiscal de l'Etat ;
- à demander au gouvernement un rapport sur la pérennité des archives numériques. Les députés ont en effet redouté que l'évolution rapide des technologies ne rende certaines données illisibles au bout de quelques années.
- à habiliter le gouvernement à harmoniser les règles relatives aux régimes de 1978 et 1979. Les députés ont adopté un amendement du gouvernement tendant à autoriser ce dernier à harmoniser les règles applicables à l'accès aux archives publiques et documents administratifs, conformément à la préconisation formulée par le Sénat en première lecture.
a proposé à la commission des lois d'amender à la marge les deux projets de loi, d'une part, par un amendement rédactionnel sur le projet de loi organique, d'autre part, par deux amendements au projet de loi ordinaire.
En premier lieu, il a estimé que les députés avaient abouti, s'agissant des délais de communication, à une solution de compromis équilibrée.
Il a toutefois indiqué qu'au cours de son audition le 29 avril 2008, M. Gilles Morin, président de l'Association des usagers du service public des archives nationales, avait regretté l'inscription dans le projet de loi de la notion de protection de la réputation des personnes dont il a redouté une interprétation trop extensive par les archivistes de nature à entraver la recherche historique. Il a objecté qu'en pratique les archivistes assimilaient déjà aujourd'hui la réputation des personnes au droit à la vie privée et appliquaient ainsi, dans les deux cas, un délai de soixante ans. Or, le dispositif adopté par les députés va dans le sens d'une plus grande transparence pour les historiens puisqu'il abaisse le délai de communication de soixante à cinquante ans, sans toucher aux dérogations toujours possibles.
Il a par ailleurs proposé d'approuver la fixation d'un délai de cent ans pour les documents susceptibles de porter atteinte à la sécurité des agents spéciaux et de renseignement.
Il a toutefois recommandé aux services publics d'archives la plus grande souplesse d'interprétation quant aux notions d'atteinte à la réputation et à la vie privée, déclarant qu'il lui apparaissait étonnant que certains archivistes considèrent comme relevant de la vie privée des documents comportant l'adresse personnelle de fonctionnaires même lorsque ces adresses figurent dans des annuaires facilement accessibles.
De même, il a mis en avant la nécessité de disjoindre ou d'occulter les documents confidentiels afin de ne pas appliquer le délai de consultation le plus long à l'ensemble d'un dossier d'archives dont les autres documents ne comporteraient aucun secret protégé par la loi.
En second lieu, il a souhaité encadrer l'habilitation demandée par le gouvernement pour harmoniser les règles en matière d'accès aux documents administratifs et archives publiques, soulignant que le gouvernement avait omis, en dépit des exigences posées par l'article 38 de la Constitution, de fixer le délai pendant lequel il pourra agir par ordonnance et celui avant lequel un projet de loi de ratification devra être déposé devant le Parlement.
a regretté la suppression par l'Assemblée nationale du dispositif d'incitation fiscale, relevant que l'avantage fiscal octroyé aux propriétaires d'archives privées classées aurait pu avoir comme contrepartie un accès plus aisé des chercheurs à ces documents, accès aujourd'hui rendu difficile par les propriétaires qui craignent une forte dépréciation de la valeur financière de leurs archives en cas de communication à des tiers. Il s'est par ailleurs interrogé sur la pertinence de prévoir un délai de soixante-quinze ans pour les actes notariés alors qu'il n'est que de cinquante ans pour les documents touchant à la vie privée générale. Il a enfin demandé au rapporteur quel était le point de départ du délai de soixante-quinze ans applicable aux archives des juridictions.
a mis en avant les difficultés qui pourraient résulter d'une communication trop rapide d'actes notariés, prenant l'exemple de testaments authentiques établis très tôt susceptibles de tomber dans le domaine public alors que les personnes concernées par son contenu sont toujours vivantes.
a précisé que le délai des archives des juridictions courait à compter de la clôture du procès, soit lorsque la décision est devenue définitive.
qui a relayé la crainte qu'en raison du raccourcissement de cent à soixante-quinze ans du délai applicable aux registres de naissance de l'état civil, le service central de l'état civil des Français nés à l'étranger soit tenu de transférer ses archives au service des archives d'Aix-en-Provence à l'expiration d'un délai de soixante-quinze ans. M. Jean-Jacques Hyest, président, a répondu que le service central pourrait continuer à conserver ses registres, même après qu'ils furent devenus communicables.
Puis la commission a procédé à l'examen des amendements sur les deux projets de loi.
A l'article 29 du projet de loi ordinaire (habilitation donnée au gouvernement à agir par ordonnance pour harmoniser les régimes d'accès aux données publiques), la commission a adopté un amendement tendant à fixer à neuf mois le délai pendant lequel le gouvernement peut prendre l'ordonnance et à trois mois celui avant lequel un projet de loi de ratification devra être déposé devant le Parlement.
A l'article 30 du même texte (présentation d'un rapport au Parlement sur la pérennité de l'archivage numérique), la commission a adopté un amendement qui élargit le champ du rapport à l'ensemble des conditions de collecte, classement, conservation et communication des archives en France et prévoit que le rapport devra être présenté au Parlement au plus tard un an à compter de la promulgation de la loi, puis tous les trois ans.
A l'article 2 du projet de loi organique (entrée en vigueur de la loi organique), la commission a adopté un amendement rédactionnel portant sur la date d'entrée en vigueur du texte.
La commission a adopté les deux projets de loi ainsi modifiés.