Intervention de Gérard Dériot

Commission des affaires sociales — Réunion du 7 juillet 2010 : 1ère réunion
Situation des finances sociales — Examen du rapport d'information

Photo de Gérard DériotGérard Dériot, rapporteur :

Je suis d'accord sur ce point. On observe que la pénibilité au travail a évolué au fil du temps : autrefois, elle concernait surtout les métiers manuels, alors qu'il faut désormais se préoccuper de nouveaux risques à caractère psychosocial.

On peut regretter que les politiques de prévention mises en oeuvre ne soient pas toujours poursuivies dans la durée, les crédits alloués étant souvent réaffectés vers d'autres priorités. Le mal-être doit être détecté à la source dans les entreprises, celles-ci ayant trop tendance à réagir seulement après des drames. L'élection directe des membres des CHSCT encouragerait la prévention, en favorisant une prise de conscience, par l'ensemble des salariés, de l'importance des questions de santé et de sécurité au travail. Les évolutions, en ce domaine, seront progressives, mais le président du Sénat, qui a été ministre du travail, peut être un relais efficace de nos préconisations. Il avait à l'époque veillé à augmenter significativement le nombre d'inspecteurs du travail et il reste sensible aux questions de santé au travail.

Concernant la certification, la mission n'y est pas absolument opposée mais souligne qu'elle conduit souvent, si on l'applique à la lettre, à appliquer des procédures rigides alors qu'il faut préserver une certaine souplesse.

Les syndicats peuvent jouer un rôle pour restaurer le sens du collectif, même si on peut douter qu'ils soient en mesure de rassembler l'ensemble du personnel. Une élection directe des membres du CHSCT permettrait, en revanche, à tous les salariés de participer.

Pour répondre à André Lardeux, je rappellerai d'abord que les risques psychosociaux ont été au coeur du travail de la mission d'information ; j'estime qu'il ne serait pas illégitime de les mentionner dans le code du travail, dans la mesure où celui-ci fait déjà référence à de nombreux autres types de risques. Enfin, les charges résultant des propositions de la mission doivent être mises en regard des économies et des gains de productivité qu'un plus grand bien-être au travail permettrait d'obtenir. En ce qui concerne plus précisément la branche AT-MP, il faut rappeler que les pathologies qu'elle ne prend pas en charge le sont de toute façon par la branche maladie.

Jacky Le Menn a eu raison de mettre l'accent sur la revalorisation de la médecine du travail : celle-ci ne passe pas seulement par une hausse de leur rémunération, mais surtout par un changement du regard porté par les étudiants en médecine sur cette spécialité. Il existe en effet une hiérarchie implicite entre les spécialités et la santé publique se situe tout en bas de l'échelle. La santé au travail est en outre fort peu abordée pendant les études de médecine. Mieux garantir l'indépendance de la médecine du travail serait déjà une manière de lui apporter plus de reconnaissance.

Yves Daudigny a raison de poser la question du mal-être dans la fonction publique. C'est un sujet que la mission n'a pas éludé ; les transformations en cours dans le secteur public créent de l'incertitude et suscitent des inquiétudes bien compréhensibles. Les fonctionnaires ne craignent pas de perdre leur emploi mais sont préoccupés par l'évolution de leur métier.

Je rejoins Sylvie Desmarescaux lorsqu'elle souligne l'appréhension des jeunes au moment d'entrer sur le marché du travail. L'accueil par un salarié expérimenté, sous la forme d'un tutorat, peut être une manière de les rassurer à leur arrivée dans l'entreprise. Beaucoup de jeunes qui ont appris un métier manuel hésitent à s'installer à leur compte.

Pour répondre à la question d'Isabelle Debré sur les TPE et PME, il n'existe pas de statistiques démontrant que le mal-être y est moins répandu mais on peut supposer que tel est effectivement le cas. Dans une petite structure, les rapports humains sont différents et le risque qu'un salarié soit isolé est plus faible. La participation peut effectivement être un moyen efficace de faire partager aux salariés les objectifs de l'entreprise et d'éviter ainsi bien des difficultés.

Comme Raymonde Le Texier et Jacqueline Alquier l'ont noté, le management est un problème clé ; nos ingénieurs, pour prendre cet exemple particulièrement parlant, sont très bien formés sur le plan scientifique et technique mais beaucoup moins à la conduite d'équipes. Chez Renault, des managers RH de proximité ont d'ailleurs été nommés pour les seconder. Le rapport mentionne la financiarisation de l'économie, mais gardons-nous de tomber dans l'excès : certes, le rendement financier ne doit pas être le seul objectif, mais les entreprises ont besoin de leurs actionnaires et la France doit rester attractive pour les investisseurs internationaux.

Isabelle Pasquet a raison de souligner la nécessité de rapprocher les salariés de leurs dirigeants. La place centrale de l'homme a été trop souvent oubliée du fait de l'accélération du rythme des transformations. L'entreprise doit dégager des bénéfices pour continuer son activité, mais la démarche de prévention doit être toujours présente.

Je partage le point de vue de Guy Fisher lorsqu'il explique que les réorganisations dans la fonction publique créent de l'incertitude mais je souligne que des changements sont inévitables. Tout l'enjeu est de les accompagner pour atténuer les inquiétudes qu'ils suscitent.

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