Intervention de Serge Dassault

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 8 novembre 2011 : 1ère réunion
Loi de finances pour 2012 — Mission travail et emploi compte d'affectation spéciale financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage - examen du rapport spécial

Photo de Serge DassaultSerge Dassault, rapporteur spécial :

Il me revient maintenant de vous présenter le budget du volet « Travail » de la mission, avec les programmes, 111 et 155. Je vous livrerai ensuite mes observations sur un certain nombre de sujets liés à l'emploi.

Le programme 111 « Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail » a pour objectif d'améliorer les conditions d'emploi et de travail des salariés. Il vise à garantir le respect du droit du travail, de la santé et de la sécurité au travail, du dialogue social et à lutter contre le travail illégal. Le respect du droit du travail, de la santé, et de la sécurité, est assuré par les inspecteurs du travail. Le dialogue social est garanti par le code du travail, avec les syndicats. Mais il y a un autre dialogue social, qui lui n'est pas prévu par le code du travail, et qui est tout aussi important, sinon plus, que le dialogue avec les syndicats. C'est celui qui concerne tous les salariés, acteurs indispensables à l'activité de toutes les entreprises, et sans lesquels il n'y aurait pas d'entreprises.

Les salariés ont un intérêt particulier à la poursuite des activités de leur entreprise car elle est leur « gagne-pain ». Les actionnaires ont intérêt à ce que les salariés soient motivés et travaillent dans de bonnes conditions.

C'est pour cela que toute direction d'entreprise doit, au maximum, motiver ses salariés et, dans ce but, elle doit supprimer leurs motifs d'insatisfaction, et satisfaire leurs besoins, qui sont au nombre de quatre :

- le besoin de savoir est couvert par l'information sur tout ce qui se passe dans l'entreprise, y compris ce qui concerne la gestion de la production, la vente et les résultats financiers ;

- le besoin de pouvoir est satisfait par la possibilité de prendre des responsabilités à tous les niveaux ;

- le besoin de considération, qui est le plus important, car il est la preuve que l'on existe, que l'on s'intéresse à vous, que vous faites partie de la famille ;

- le besoin d'avoir concerne les rémunérations, mais aussi l'intéressement, et surtout la participation. C'est pour cela que je propose, jusqu'ici sans succès, qu'il y ait égalité entre les dividendes et la participation. C'est ce que j'applique moi-même à Dassault Aviation depuis plus vingt ans et, aujourd'hui, l'ensemble du personnel touche trois à quatre mois de salaires supplémentaires, somme équivalente à la somme distribuée aux actionnaires.

En définitive, il n'y a pas, ou il ne devrait pas y avoir, les salariés d'un côté et le patron avec les actionnaires de l'autre. Les uns et les autres forment une grande équipe qui doit réussir à vendre des produits compétitifs pour satisfaire les clients. Car ce sont les clients qui, par leurs achats, apportent aux entreprises le financement nécessaire à leurs activités et les rémunérations des salariés et des actionnaires.

Le programme 111 porte aussi sur les engagements financiers liés à la mise en oeuvre de la loi du 20 août 2008 qui prévoit que la première mesure de l'audience des organisations syndicales sera réalisée avant la fin de l'année 2013, afin de démontrer leur véritable représentativité. Aussi le budget pour 2012 prévoit-il une progression des crédits de paiement de la ligne budgétaire consacrée à la mesure de l'audience syndicale, celle-ci passant de 9,7 millions d'euros en 2011 à 16 millions en 2012, soit une augmentation de 65 %.

Pour le reste, toutes les lignes budgétaires du programme 111 seront en diminution :

- la recherche et l'exploitation des études en matière de santé et de sécurité au travail (3,9 millions d'euros en CP au lieu de 4,6 millions) ;

- la formation des conseillers prud'hommes (8,1 millions d'euros au lieu de 9,6 millions) ;

- ainsi que les crédits versés aux deux opérateurs du programme, l'agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail et l'agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail. Mais ce sont des « broutilles » par rapport aux économies possibles sur les autres programmes de la mission qui concernent l'emploi.

J'en viens au programme 155 « Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail ». Il s'agit du programme « support » de la mission « Travail et emploi ». Il regroupe les moyens de soutien des politiques de l'emploi et du travail : les personnels, les crédits de fonctionnement et d'investissement, les moyens d'études, de statistiques, de recherche et d'évaluation. Il faut noter que les dépenses d'investissement progressent légèrement, de 2,5 millions d'euros, afin de moderniser l'informatisation et la dématérialisation des procédures.

Maintenant permettez-moi de vous présenter, rapidement, mes observations personnelles sur la politique de l'emploi.

Je déplore, depuis quelques années, que les crédits que l'on nous demande d'accepter ne reçoivent aucune justification quant à leur efficacité. Quelle est l'efficacité de Pôle Emploi ? Combien de demandeurs ont retrouvé du travail du fait de son action ?

Dans la situation financière critique où nous nous trouvons aujourd'hui, il importe plus que jamais de limiter les dépenses faites pour le développement de l'emploi qui ne sont pas suffisamment efficaces. La première et la plus emblématique est celle des 35 heures. Si elle a créé des emplois, surtout dans la fonction publique, elle a augmenté considérablement les dépenses de personnel. Pour les entreprises privées, elle a eu des conséquences dramatiques en réduisant de façon importante notre compétitivité et nos exportations. Quant aux allègements de charges sociales accordés aux entreprises pour compenser la réduction d'horaire, ils coûtent chaque année à l'Etat plus de 20 milliards d'euros. Ainsi, en dix ans, plus de 200 milliards d'euros ont été dépensés pour travailler moins, ce qui représente un gâchis considérable, et contribue à l'aggravation de notre dette. Le retour aux 39 heures constituerait un gain pour l'Etat de 20 milliards d'euros par an, un gain pour les entreprises par l'amélioration de leur compétitivité, un gain pour les salariés en pouvoir d'achat par l'augmentation du SMIC et, enfin, un gain pour la croissance.

Par ailleurs, il est totalement admis aujourd'hui que la prime pour l'emploi n'a aucun effet sur le retour à l'emploi. J'en préconise la suppression, ce qui représenterait une économie de 2,8 milliards d'euros.

La réduction de la TVA sur la restauration à 5 % coûte 3,2 milliards d'euros. Cela a-t-il réellement créé des emplois ? Personne ne peut en apporter la preuve. Compte tenu de l'urgence des économies à faire, je propose de la supprimer.

La suppression des exonérations sur les heures supplémentaires rapporterait plus de 4,5 milliards d'euros. Ces exonérations ne contribuent à la création d'aucun emploi, je pense qu'il faudrait les supprimer également, comme le propose maintenant le Sénat.

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