J'en arrive à la deuxième partie du rapport, qui dessine un scénario noir pour le pacte social dans l'entreprise, celui de son éclatement. Il est préoccupant que ce scénario corresponde à la poursuite des tendances lourdes relevées dans la première partie du rapport.
Dans ce scénario noir, les conflits de répartition continueraient à se résoudre au détriment des rémunérations salariales. Le travail « paierait » d'autant moins que le vieillissement démographique s'accompagnerait d'un prélèvement accru sur les revenus de la production distribués aux salariés. Les différentes variables à l'oeuvre pour déterminer les parts respectives de la valeur ajoutée attribuées aux salaires et aux profits sont notamment le niveau du chômage, la diversification des opportunités d'investissement du capital, la financiarisation de l'économie, la constitution d'un marché du travail mondial, la restructuration des économies développées autour de leurs avantages comparatifs, la diffusion de modèles de croissance orientés vers la compétitivité et l'attractivité à court terme. Toutes ces variables pèseraient sur les salaires tout en permettant aux propriétaires du capital de défendre efficacement leur part du revenu national.
Mais le revenu national augmenterait de plus en plus lentement. La croissance potentielle baisserait notamment sous l'effet du choc démographique. Si l'épargne restait relativement abondante, la crainte de l'avenir entraînant une augmentation de l'épargne de précaution, elle pèserait sur la consommation sans s'investir pour autant sur le territoire économique national faute de perspectives de croissance. Elle préfèrerait les placements patrimoniaux, d'où la multiplication de bulles d'actifs, ou les profits offerts par les pays émergents à forte croissance.
Face à l'attrition des revenus, les besoins sociaux résultant du vieillissement démographique et des effets des restructurations économiques augmenteraient dans des proportions telles que toutes les faibles marges de manoeuvre des Etats y seraient consacrées. L'Etat n'investirait plus et les effets attendus des biens publics (éducation, environnement, innovation...) sur la croissance ne se produiraient pas.
Le chômage structurel augmenterait par incapacité à s'adapter au nouveau contexte économique et par sédimentation d'un chômage conjoncturel qui ne se résorberait jamais.