Sur ce sujet délicat, il faut bien se rappeler que les Caf ne font qu'appliquer les critères légaux et réglementaires d'ouverture du droit aux allocations logement. Le calcul du droit repose sur les ressources et la taille du foyer. Il est fondé sur un forfait national et non sur le loyer réel, ce qui peut parfois conduire à s'interroger sur la pertinence du forfait par rapport à certaines situations locales. Il reste toutefois fixé réglementairement. Tout cela est conditionné par la loi à la décence du logement. Vous semblez faire référence à des situations où, au moment de l'attribution des logements, les commissions d'attribution demandent un calcul de l'aide potentielle à laquelle sont éligibles les demandeurs. La Caf en fournit alors le montant mais doit également indiquer si la configuration du logement donne ou non droit à une aide. Si le logement n'est pas adapté à la situation de la famille, la réponse à cette question ne peut être que négative et le bailleur ne peut donc que refuser de l'attribuer au demandeur. Ce n'est que l'application du droit. Toutefois, les Caf accompagnent les familles confrontées à de telles situations et cherchent à les orienter vers des logements plus décents. Dans tous les cas, les familles vivant dans des logements indécents bénéficient d'une gestion souple de leur dossier afin d'éviter une aggravation de leur situation. L'action sociale des Caf prend alors le relais. La question n'en reste pas moins délicate compte tenu de la situation du logement dans notre pays.
J'en viens à la lutte contre les fraudes, qui constitue une priorité de toutes les branches de la sécurité sociale et en particulier de la branche famille. C'est une question d'équité qui vise à assurer la confiance dans le système et dans le pacte social. Une enquête réalisée l'an dernier nous a permis d'estimer un montant de fraude potentielle situé entre 600 et 800 millions d'euros par an. Chaque année, la Cnaf détecte 90 millions d'euros de fraudes : il y a donc un écart de un à huit entre ces deux chiffres.
Il faut toutefois bien prendre en considération le fait que les fraudes sont une catégorie de paiements indus. Ceux-ci s'élèvent à 2 milliards d'euros par an, ce qui peut être considéré comme élevé par rapport aux 60 milliards d'euros de prestations versés par la Cnaf mais qui s'explique par la complexité de ces prestations, qui dépendent beaucoup de la situation des bénéficiaires en termes de situation familiale et de ressources. Les changements de situations fréquents, surtout en période de crise, entraînent un délai incompressible d'actualisation des dossiers et produisent en permanence des indus. La quasi-totalité de ces indus est détectée, mais nous ne parvenons pas encore à distinguer les indus frauduleux de ceux qui résultent du décalage entre le versement des prestations et la mise à jour des dossiers des allocataires.
Néanmoins, nous récupérons près de 90 % des indus sur une période de trois ans après leur versement, en les prélevant sur les prestations à échoir. Nous bénéficions d'outils perfectionnés en la matière et nous nous appuyons sur des règles comme celle de la fongibilité des indus, qui permet de récupérer un indu au titre d'une prestation sur une autre de nature différente. Cela facilite grandement le recouvrement et le manque à gagner, c'est-à-dire la perte sur le montant des indus généraux, s'élève à 100 millions d'euros. Les indus frauduleux ne devraient pas faire l'objet d'abandons de créances, qui constituent la grande majorité des indus non recouvrés et qui sont liés à l'insolvabilité des personnes ou à la situation de détresse sociale dans laquelle elles se trouvent.
La lutte contre les fraudes reste une priorité et va être amplifiée. Les perspectives en la matière sont encourageantes grâce aux nouvelles méthodes que nous sommes en train d'adopter. Le data mining (fouillage de données) est une technique informatique qui permet, à partir des caractéristiques communes aux dossiers frauduleux, de bâtir une recherche permanente du fichier des allocataires afin de focaliser les contrôles sur les dossiers présentant a priori des risques. Les taux de rendement de ces contrôles sont bien meilleurs grâce à la présélection de dossiers à risque, les contrôles massifs encore pratiqués étant trop aléatoires et consommateurs de trop de ressources. Ce nouvel outil va permettre d'alléger les charges qui pèsent sur les Caf tout en augmentant l'efficacité des contrôles.