S'agissant de l'Afghanistan, M. Hervé Morin, ministre de la défense, a estimé que les inflexions de la stratégie de l'OTAN en Afghanistan étaient désormais clairement perceptibles. Le général Stanley Mac Chrystal, commandant de la FIAS, est convaincu de la nécessité d'établir une relation de confiance avec la population, en montrant la capacité de l'OTAN à établir la sécurité tout en prenant en compte les besoins de la reconstruction et le respect de la culture et des traditions afghanes. L'année 2010 se situe à une période charnière. Au plan militaire, la montée en puissance de l'armée nationale afghane se poursuit, avec l'objectif, fixé par la conférence de Londres, d'une prise en charge progressive de la sécurité à partir de la fin de l'année. Au plan politique, le président Karzaï a pris des engagements en vue d'améliorer la gouvernance et de lutter contre la corruption et le trafic de drogue. Il a engagé des discussions avec certains éléments taliban afin d'amorcer un processus de réconciliation et des élections législatives sont prévues en septembre 2010.
Le ministre de la défense a précisé que la France avait renforcé de plus de 1 300 hommes ses effectifs militaires au sein de la FIAS depuis 2008. Elle va effectuer un nouvel effort pour participer, avec l'Allemagne, à la montée en puissance de l'école de blindés de Kaboul, et en mettant en place une OMLT (Operational Mentor and Liaison Team) chargée de la formation d'un bataillon de l'armée nationale afghane dans sa zone de responsabilité. Ces deux actions devraient représenter un effectif supplémentaire d'environ 80 hommes. Parallèlement, la France doublera son aide à la reconstruction, qui passera de 20 à 40 millions d'euros.
Le ministre a ajouté qu'il avait insisté, lors de son récent entretien avec son homologue américain, sur la nécessité de fixer un certain nombre d'objectifs intermédiaires permettant à l'opinion publique de mesurer les progrès réalisés et la mise en oeuvre de la stratégie définie pour l'Afghanistan.
a ensuite abordé les perspectives de la politique européenne de sécurité et de défense commune en soulignant l'hétérogénéité des ambitions et des efforts budgétaires en Europe. Il a ainsi observé que pour certains États européens, la clause d'aide et d'assistance mutuelles figurant dans le traité de Lisbonne constituait une simple déclaration de principe alors que, pour d'autres, elle devrait traduire un véritable engagement politique comparable à l'article 5 du traité de l'Atlantique Nord. Pour la plupart des États européens, seule la clause de solidarité, qui s'applique en cas d'attaque terroriste ou de catastrophe naturelle, a véritablement valeur contraignante. Quant aux coopérations structurées permanentes, le traité de Lisbonne est resté relativement imprécis sur leurs objectifs et leurs critères de mise en oeuvre. Le risque existe qu'un pays comme le Royaume-Uni se joigne à de telles coopérations en vue d'en limiter la portée, bien plus que pour ouvrir la voie à de nouvelles avancées.
Le ministre de la défense a salué la volonté de la présidence espagnole de l'Union européenne d'instaurer un conseil des ministres de la défense, alors que n'existent aujourd'hui que des réunions informelles ou des réunions conjointes avec les ministres des affaires étrangères. Il a indiqué que seul le Royaume-Uni s'opposait aujourd'hui à l'instauration d'un centre de planification et de commandement européen. Il a souligné à ce sujet qu'une telle structure, limitée à 100 ou 150 personnels permanents, ne pouvait en rien concurrencer le SHAPE, et qu'elle était nécessaire pour faciliter le déploiement d'opérations européennes. Il a estimé que cet outil de planification serait cohérent avec la mise en place des « groupements tactiques 1 500 » ou « battlegroups », déployables sous un préavis de dix jours.
Tout en reconnaissant que la politique européenne de sécurité et de défense commune mériterait, aux yeux de la France, une plus forte impulsion politique, il a rappelé les progrès enregistrés sous présidence française, avec la mise en place de moyens de planification stratégique et de conduites d'actions civiles. Il s'est déclaré convaincu que la possibilité de mobiliser d'importants moyens de reconstruction et d'aide au développement, en complément des opérations de maintien de la paix, constituait une incontestable valeur ajoutée de l'Union européenne. Il a également souligné l'intérêt de l'opération Atalante de lutte contre la piraterie initiée par l'Union européenne, à laquelle l'OTAN et d'autres pays comme la Russie, la Chine, le Japon ou la Malaisie se sont ralliés par la suite.
Il a également précisé que lors du dernier sommet franco-allemand, il avait été décidé d'assouplir les conditions d'engagement en opération de la brigade franco-allemande, afin de permettre son déploiement effectif, et de transformer l'état-major du Corps européen en état-major tactique projetable.
a ensuite rendu compte de la réunion informelle des ministres de la défense de l'OTAN, tenue à Istanbul les 4 et 5 février 2010. Il a indiqué que conformément aux demandes de la France et du Royaume-Uni, et avec l'appui des États-Unis, le secrétaire général, M. Rasmussen, devrait présenter au printemps un plan destiné à alléger et simplifier les structures de l'organisation, encore beaucoup trop bureaucratiques, et à réaliser les économies indispensables.
Il a évoqué le souhait des États-Unis de voir l'Alliance définir une position de principe sur la défense antimissile lors de son prochain sommet, en fin d'année 2010. Il a considéré que beaucoup de questions restaient encore sans réponse : l'OTAN doit-elle se protéger de la menace balistique émanant de certains États « voyous » ou de puissances nucléaires affirmées ? Comment fonctionnerait le système de commandement et de contrôle et à qui reviendrait la décision finale d'interception ? Quel serait l'échelonnement dans le temps de l'édification d'une défense antimissile de l'OTAN ? Quel en serait le coût ?
Le ministre a indiqué que la France souhaitait des clarifications sur ces différents points. Il a exprimé ses réserves en soulignant que les budgets et l'esprit de défense n'étaient en rien comparables, en Europe, avec ceux des États-Unis. Une implication européenne dans des programmes de défense antimissile risquerait de s'effectuer au détriment du financement des équipements indispensables aux opérations. Elle pourrait aussi créer un illusoire sentiment de protection préjudiciable au renforcement des capacités nécessaires à la crédibilité de notre défense.
À la suite de cette présentation un débat s'est instauré.