Intervention de Jacqueline Panis

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 24 mai 2011 : 1ère réunion
Situation des femmes afghanes — Compte rendu de la conférence de presse

Photo de Jacqueline PanisJacqueline Panis, présidente :

Mes chers collègues, le 3 mars 2011, à la demande de notre présidente retenue dans son département, j'ai représenté notre délégation à une conférence de presse, organisée par Mme Shoukria Haïdar et Mme Geneviève Couraud, respectivement présidente fondatrice et secrétaire générale de l'Association NEGAR. Cette conférence était consacrée à la situation des femmes afghanes un an après la Conférence internationale de Londres sur l'Afghanistan.

La situation qui a été décrite lors de cette conférence de presse m'a paru préoccupante, et j'ai demandé à notre présidente la possibilité de vous en faire un rapide compte-rendu.

Le bilan qu'a ensuite présenté Mme Shoukria Haïdar est pour le moins mitigé.

J'en retiens cependant quelques points positifs tels qu'un accès des femmes aux contraceptifs oraux, appelés « tablettes du bonheur » ou « tablettes de la joie » ; l'existence d'un ministère en charge des droits des femmes, qui existe depuis 2001 même si, selon Mme Couraud qui reprenait les propos d'une Afghane, « le ministère a commencé avec rien et continue avec rien » ; la mobilisation depuis un an de nombreuses associations qui ont le courage de s'exprimer ; le déroulement satisfaisant des dernières élections ; la présence de 38 % de femmes élues à l'Assemblée nationale ; les actions de scolarisation, notamment des jeunes filles, menées par le NEGAR ; ou la prochaine création d'une crèche - jardin d'enfants à Kaboul.

Toutefois, ces avancées sont contrebalancées par un certain nombre de reculs : Mme Haïdar a fermement dénoncé le système mis en place qui propose aux taliban de déposer leurs armes en échange d'argent, d'un logement et de garanties quant à leur sécurité et cela, sans aucune punition. Ce système a des effets pervers : nombre d'Afghans, qui ne sont pas taliban, prétendent l'être et commettent des exactions pour bénéficier de ces aides. Leurs premières victimes sont la population civile et les femmes en particulier. Du fait de ces risques, les familles hésitent à envoyer leurs filles à l'école ou dans les universités. Cette situation n'existait pas en 2004-2005. Les violences faites aux femmes se sont banalisées et la pauvreté n'est pas sans conséquence sur les sort des Afghanes : certaines se tournent, faute de moyens, vers la prostitution. L'accès à l'éducation des jeunes est rendu difficile du fait du nombre insuffisant de professeurs. De plus, comme les jeunes formés ne trouvent pas d'emploi, beaucoup quittent l'Afghanistan. Les femmes représentent seulement 12-13 % des fonctionnaires et elles sont encore moins nombreuses dans les fonctions d'encadrement.

Quelques intervenants (membres du NEGAR, Afghans établis en France et responsables d'associations ou ONG) ont dénoncé la situation actuelle comme étant un « cocktail explosif » constitué par la corruption, les problèmes politiques internes et les problèmes géopolitiques.

Mme Shoukria Haïdar a formulé plusieurs préconisations :

- elle pense que l'argent qui est actuellement utilisé pour financer le logement, le salaire et la sécurité des taliban ayant déposé les armes, et qui provient essentiellement d'Europe, pourrait être plus utilement employé dans le cadre d'autres mécanismes, tels que ceux permettant un développement du travail ;

- elle estime qu'il est primordial que la communauté internationale intervienne pour régler le délicat conflit de frontière qui existe entre l'Afghanistan et le Pakistan ;

- elle demande que les forces internationales restent encore en Afghanistan ; en effet, selon Mme Haïdar, si les forces étrangères partent maintenant, le terrorisme et le trafic de drogue qui y est associé vont nécessairement s'amplifier ;

- enfin Mme Haïdar et Mme Couraud ont insisté sur la nécessité de bien choisir les mots employés par ceux qui s'expriment dans les médias ; elles ont été choquées de lire dans certains médias que les taliban étaient des « insurgés », mis sur le même plan que celles et ceux qui se sont révoltés en Tunisie ou en Égypte.

Mme Geneviève Couraud, m'a informée que, depuis cette conférence de presse, la société civile s'est de nouveau réunie début mai, à l'appel de M. Amrullha Saleh, ancien directeur du NDS (National Directorate of Security) dans un mouvement qui s'appelle la Marche verte (Green road), en référence au vert de l'espérance. Cette marche aurait réuni plus de 20 000 personnes à Kaboul, dont 3 000 femmes. A l'issue de cette réunion, l'assemblée a adopté une résolution en persan, que le NEGAR traduit actuellement.

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