Intervention de Gilbert Barbier

Mission d'information médicaments — Réunion du 11 avril 2006 : 1ère réunion
Audition du pr. jean-paul giroud membre de l'académie nationale de médecine

Photo de Gilbert BarbierGilbert Barbier, président :

a précisé que la mission d'information souhaite, au travers de cette audition, comprendre si le contenu et les modalités de la formation initiale et continue des médecins, et si le remboursement partiel ou intégral de la majorité des médicaments peuvent être tenus responsables de la surconsommation médicamenteuse qui caractérise la France.

Le professeur Jean-Paul Giroud a estimé que le système de sécurité sociale français ne constitue pas un facteur de surconsommation de médicaments, dans la mesure où ceux-ci ne sont pas à proprement parler gratuits, puisque indirectement payés par les salariés via leurs cotisations.

Faisant référence à son expérience de professeur de pharmacologie médicale et clinique à l'université pendant quarante-deux ans, il a fait valoir que le problème majeur provient de l'insuffisance de la formation des praticiens en matière de médicament. La formation continue est essentielle dans ce domaine en constante évolution, où des produits sont créés et supprimés chaque année.

Il a considéré que les nouveaux médicaments commercialisés sont souvent très mal connus, malgré les expériences cliniques préalables à la mise sur le marché. Leur utilisation est, en outre, toujours plus large en vie réelle que dans les essais, au cours desquels certaines populations comme les enfants ou les personnes âgées sont rarement testées, ce qui fait apparaître des effets secondaires insoupçonnés aboutissant parfois au retrait du produit. Il a estimé que, dans un premier temps, il est préférable que les médecins prescrivent les médicaments connus, tant que l'ensemble des manifestations de l'utilisation d'un nouveau produit n'a pas été étudié. Il a, à cet égard, cité l'exemple du sous-nitrate de bismuth, dont les Français sont les plus gros consommateurs au monde, qui a entraîné des troubles cérébraux détectés plus de soixante-dix ans après sa mise sur le marché. Inversement, certaines qualités thérapeutiques apparaissent plusieurs mois, voire plusieurs années après la commercialisation d'un médicament, comme celles de l'aspirine pour les maladies cardiaques et neurologiques.

Abordant le problème des prescriptions abusives de médicaments, le professeur Jean-Paul Giroud a regretté que les patients soient trop souvent convaincus que la longueur de l'ordonnance témoigne de la qualité du médecin. Il a estimé qu'au contraire, un praticien consciencieux doit s'assurer, avant de prescrire, de l'indication d'usage du médicament, de ses critères de succès, de la durée conseillée de traitement, de l'existence d'interactions déconseillées et de la possibilité de proposer un autre traitement. Ainsi, aux Pays-Bas et dans les pays nordiques, plus de la moitié des patients n'ont pas de prescription médicamenteuse après une consultation.

Il a considéré que, pour faire évoluer les mentalités françaises dans ce domaine, les pouvoirs publics doivent mettre en oeuvre des actions d'éducation à la santé dès l'école primaire. Citant l'exemple de la Suède, il a indiqué que ce pays connaissait, il y a quelques années, un véritable problème d'hygiène dentaire chez les enfants et les jeunes adultes. L'apprentissage du brossage des dents a alors été rendu obligatoire dans les écoles : au bout de huit ans, les dentistes ont observé une diminution de 90 % des cas de caries et, quinze ans après la mise en oeuvre de cette mesure, une école dentaire était fermée, les besoins de la population suédoise en la matière étant moins importants.

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