Intervention de Daniel Soulage

Commission des affaires économiques — Réunion du 14 novembre 2006 : 1ère réunion
Pjlf pour 2007 — Mission « sécurité sanitaire » et article 52 rattaché - examen du rapport pour avis

Photo de Daniel SoulageDaniel Soulage, rapporteur pour avis :

Rappelant qu'en tant que mission interministérielle du budget de l'Etat, la mission « Sécurité sanitaire » dépendait à la fois du ministère de la santé et des solidarités et du ministère de l'agriculture et de la pêche, M. Daniel Soulage, rapporteur pour avis, a précisé qu'elle comprenait deux programmes, dont le premier, « Veille et sécurité sanitaires », avait pour responsable le directeur général de la santé, et le second, « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation », le directeur général de l'alimentation.

Il a ensuite indiqué que, pour l'exercice 2007, les crédits demandés au titre de la mission s'élevaient à près de 661 millions d'euros en crédits de paiement, soit + 3,3 % par rapport à l'an passé, et à près de 608 millions d'euros en autorisations d'engagement, soit - 35,3 %. Il a ajouté que, pour financer certaines de ses actions, la mission bénéficiait en outre de fonds de concours, pour des montants dépassant au total les 37 millions d'euros, soit un peu plus de 5,6 % des crédits de paiement de la mission.

Puis, abordant le programme « Veille et sécurité sanitaires », M. Daniel Soulage, rapporteur pour avis, a précisé qu'avec 105 millions d'euros, il représentait 16 % des crédits de la mission et évoluait un peu moins que l'inflation (+ 1,7 %). Il a souligné que, pour plus des trois quarts, ces crédits finançaient, sous forme de subventions pour charges de service public, cinq organismes spécialisés dans la veille et la sécurité sanitaires tels que, par exemple, l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) ou l'Institut de veille sanitaire (InVS). Relevant que ces subventions évoluaient très fortement d'une année à l'autre, et de manière apparemment erratique, en raison du financement de l'activité de ces agences par des prélèvements sur leur fonds de roulement, il a estimé malsain que de tels fonds de roulement de 10 à 15 millions d'euros puissent être ainsi constitués et couvrir des dépenses de fonctionnement, et indiqué qu'il en ferait état lors de son intervention orale en séance, en demandant notamment que les contrats d'objectifs et de moyens que les agences vont signer avec leur tutelle prévoient des subventions d'équilibre régulières.

Quant au reste de la dotation du programme, soit environ 25 millions d'euros, il a précisé qu'il servait à financer des dispositifs de veille, de surveillance, d'expertise et d'alerte, à établir des plans et programmes d'actions de prévention, à organiser la gestion des urgences, des situations exceptionnelles et des crises, et enfin à favoriser la formation des acteurs et à améliorer leur information, ainsi que celle du public.

Après avoir relevé qu'en ce qui concerne les crédits du programme « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation », plus importants que ceux du programme précédent, puisqu'ils représentent 84 % des crédits de paiement de la mission, les autorisations d'engagement diminuaient de 40 %, pour revenir à 502,5 millions d'euros en raison d'une moindre programmation pour l'élimination des farines animales, et que les crédits de paiement augmentaient de 3,5 %, pour s'établir à 555,5 millions d'euros, M. Daniel Soulage, rapporteur pour avis, a précisé qu'à ces montants devaient être ajoutés des fonds de concours, à hauteur de 31,6 millions d'euros, produit des contributions communautaires, en particulier du FEOGA, à la mise en oeuvre de diverses actions. A cet égard, il a regretté que la direction générale de l'alimentation ne donne aucune explication sur l'origine et l'affectation de ces fonds de concours dans le projet annuel de performances.

Il a ensuite indiqué que les priorités du programme pour 2007 portaient sur la lutte contre les maladies animales et la prévention et la gestion des risques sanitaires liés aux denrées alimentaires, les crédits augmentant pour prévenir toute épizootie de « grippe aviaire », notamment par l'accroissement de la surveillance des élevages avicoles, et pour améliorer, conformément à des directives européennes, le contrôle sanitaire dans les élevages porcins.

Enfin, après avoir souligné que les dépenses en personnel représentaient 43 % des crédits demandés pour le programme, soit près de 240 millions d'euros, M. Daniel Soulage, rapporteur pour avis, a relevé que d'autres agents du ministère de l'agriculture et de la pêche contribuaient aussi à la mise en oeuvre du programme, pour des dépenses estimées à plus de 92 millions d'euros, qu'a contrario, certains fonctionnaires gérés par le programme agissaient pour le compte du ministère de l'écologie et du développement durable, pour un coût représentatif de quelque 15,5 millions d'euros, et enfin que si les agents de la DGCCRF intervenaient également de manière importante en matière de sécurité et de qualité sanitaires de l'alimentation, leur participation ne faisait toujours l'objet d'aucune évaluation budgétaire, ce qui rendait ainsi impossible la correcte appréciation, en termes de contrôle de gestion, du coût exact du programme.

Puis M. Daniel Soulage, rapporteur pour avis, après avoir rappelé sa fonction de président de la section « Fruits et légumes » du groupe d'études du Sénat sur l'économie agricole et alimentaire, s'est plus particulièrement arrêté aux impacts budgétaires de la lutte phytosanitaire, dont le dispositif global a récemment été renforcé par deux lois importantes instruites par la commission des affaires économiques, s'agissant :

- de l'indemnisation des producteurs dans la lutte obligatoire contre les organismes nuisibles aux végétaux, prévue par l'article 36 de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux (la loi DTR) ;

- et du transfert à l'AFSSA de l'évaluation des produits phytopharmaceutiques, matières fertilisantes et supports de culture, organisé par l'article 70 de la loi d'orientation agricole du 5 janvier 2006 (la LOA).

Il a ajouté qu'à cet égard, l'article 52 du présent projet de loi de finances, mesure fiscale et budgétaire rattachée à la mission « Sécurité sanitaire », organisait le financement de cette nouvelle mission de l'AFSSA et que la commission serait donc conduite à émettre un avis à son sujet.

a tout d'abord rappelé que certains organismes nuisibles aux végétaux peuvent provoquer des dommages majeurs aux productions agricoles et mettre en péril l'appareil de production et la compétitivité des exploitations de toute une région, parce que, pour lutter contre eux, il n'existe pas de moyens économiquement supportables ou qui ne soient pas préjudiciables à l'environnement. Aussi, lorsque ces organismes sont détectés, ils sont soumis à une procédure obligatoire de déclaration et l'administration peut ordonner la destruction des végétaux contaminés. Cette obligation de déclaration et la destruction des végétaux contaminés ont des conséquences financières importantes, susceptibles de remettre en cause l'équilibre des exploitations concernées, voire d'entraîner la cessation de leur activité.

Indiquant ensuite que, jusqu'à l'an dernier, le système d'indemnisation de ces exploitants, de caractère optionnel et relevant d'une décision du préfet, n'était pas satisfaisant puisqu'il était restreint aux seuls végétaux non contaminés, le rapporteur a expliqué que l'article 36 de la loi DTR avait instauré un mécanisme d'indemnisation des producteurs dans les cas où des mesures d'éradication sont ordonnées, dispositif dont les modalités, clairement définies et équitables, prévoient une intervention financière de l'Etat assortie d'un mécanisme de mutualisation financé par les professionnels eux-mêmes. M. Daniel Soulage, rapporteur pour avis, s'est alors étonné que, vingt mois après la promulgation de la loi, les trois textes réglementaires attendus pour rendre applicable son article 36 n'étaient toujours pas parus. Il a pourtant rappelé que le 24 janvier dernier, le Président Emorine avait manifesté sa préoccupation à l'occasion de la question orale avec débat qu'il avait posée sur l'application de la loi DTR. Jugeant ce retard préjudiciable à la lutte contre les organismes nuisibles aux végétaux et, plus globalement, à l'activité agricole dans son ensemble, le rapporteur a indiqué qu'il appellerait en séance publique le ministre de l'agriculture et de la pêche, ainsi que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, à agir promptement pour que ces textes réglementaires soient rapidement publiés.

Abordant alors la mise en oeuvre de l'article 70 de la LOA, il a rappelé que, jusqu'à l'an dernier, le système français d'homologation des produits phytopharmaceutiques, des adjuvants, des matières fertilisantes et des supports de culture avait pour caractéristique que le ministère de l'agriculture et de la pêche était tout à la fois chargé d'évaluer les produits et de leur délivrer l'autorisation de mise sur le marché (AMM). Observant que cette double compétence n'était pas sans soulever de sérieuses interrogations au regard du principe de séparation de l'évaluation et de la gestion du risque, qui est recommandé par les principales organisations internationales compétentes en matière de sécurité alimentaire, il a expliqué que pour lever toute ambiguïté quant au rôle des pouvoirs publics et conférer une réelle légitimité au dispositif national d'homologation, l'article 70 de la LOA avait attribué à l'AFSSA la mission d'évaluer ces produits, le ministère chargé de l'agriculture conservant quant à lui la responsabilité de leur accorder l'AMM.

Puis, s'agissant des implications budgétaires et fiscales de la réforme, il a indiqué que le transfert de compétences effectué le 1er juillet dernier avait eu pour conséquences, sur l'exercice 2006 :

- de conduire l'AFSSA à recruter 90 collaborateurs supplémentaires pour le traitement des flux de dossiers, dont le nombre annuel avoisine le millier ;

- de contraindre le ministère de l'agriculture et de la pêche à prévoir d'ajouter 3,2 millions d'euros à la subvention pour charge de service public qu'il a versée à l'agence, dont 2,25 millions pour financer ces 90 emplois ;

- d'obliger le ministère à mettre à disposition de l'agence 59 emplois pour assurer la gestion d'une partie du stock des dossiers en instance, évalué à environ 5.000 ;

- et, par un arrêté du 21 septembre 2006, de relever de manière très significative le montant de la taxe d'homologation jusqu'ici prélevée à l'occasion du dépôt des dossiers auprès du ministère de l'agriculture et de la pêche, et qui était l'un des plus faibles d'Europe.

Toutefois, compte tenu de la date de parution du décret et de l'arrêté, qui ne laisse en définitive qu'un tout petit peu plus qu'un trimestre effectif pour la réévaluation des droits, M. Daniel Soulage, rapporteur pour avis, a exprimé sa crainte que le produit attendu de 3,2 millions d'euros ne soit pas atteint et, s'interrogeant sur le montant qui figurera dans le décret d'avance autorisant l'abondement supplémentaire versé au titre de l'année 2006 à l'AFSSA, il a fait part de son souhait qu'il ne soit pas demandé à celle-ci de financer sur son fonds de roulement ou par des redéploiements internes l'essentiel des coûts de la nouvelle mission qui lui incombe.

S'agissant de l'année 2007, il a ensuite expliqué que l'article 52 du projet de loi de finances organisait les modalités du financement de cette mission en créant une taxe fiscale au titre de l'évaluation et du contrôle de la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, due par le demandeur et versée par celui-ci dans son intégralité à l'occasion du dépôt de sa demande, dont le montant sera arrêté par les ministres chargés de l'agriculture et du budget en fonction de la nature de la demande et de la complexité de l'évaluation. Après avoir précisé que, dans le texte adopté par le conseil des ministres, quatre classes de demandes étaient définies, fixant pour les tarifs soit des plafonds (4.500 €, 15.000 € ou 33.000 €), soit une fourchette (80.000 à 100.000 €), et que 86,5 % du produit de la taxe était affecté à l'AFSSA, tandis que le solde de 13,5 % était versé au budget général, il a indiqué que, le 6 novembre dernier, l'Assemblée nationale avait adopté quatre amendements dont deux visant, respectivement :

- à élargir de 40.000 à 200.000 euros la fourchette de la catégorie des tarifs les plus onéreux, afin d'être en mesure de tenir compte des coûts réels de certaines analyses qui, selon des estimations de l'AFSSA, pourraient atteindre 170.000 euros ;

- à affecter l'intégralité du produit de la taxe à l'AFSSA, dont le montant attendu pour 2007 est évalué à 7,4 millions d'euros et qui aura vocation à financer, outre les frais matériels occasionnés par les travaux d'analyse et d'évaluation, les charges de personnel afférentes aux 90 emplois recrutés dans le courant de l'année 2006 pour examiner les demandes nouvelles.

a alors soumis deux amendements à l'appréciation de ses collègues.

Il a tout d'abord observé que si le financement du traitement des nouveaux dossiers par l'AFSSA était bien prévu par l'article 52 du projet de loi de finances, aucun ne l'était pour traiter le stock des quelque 5.000 dossiers en instance dont l'agence allait hériter du ministère de l'agriculture et de la pêche et qu'il lui faudrait bien examiner, le projet annuel de performances indiquant à cet égard que l'AFSSA évaluait à une soixantaine d'emplois par an les recrutements à effectuer dans les trois années à venir pour effectuer ce rattrapage. Estimant que cette impasse budgétaire, pouvant être estimée à 5 millions d'euros pour 2007, n'était pas satisfaisante, il a présenté un amendement tendant à augmenter de cette somme les crédits du programme, afin que la subvention pour charge de service public attribuée à l'AFSSA par le ministère de l'agriculture et de la pêche en 2007 soit abondée à due concurrence. Après avoir souligné que la logique aurait voulu que ces 5 millions d'euros proviennent d'un autre programme relevant du ministère de l'agriculture et de la pêche, et rappelé que la LOLF interdisait aux parlementaires d'effectuer des transferts budgétaires entre missions, il a expliqué que le gage devait donc obligatoirement être assuré par un prélèvement de 5 millions d'euros sur le programme « Veille et sécurité sanitaires ».

Par ailleurs, à l'article 52, il a suggéré d'adopter un amendement technique supprimant toute solution de continuité entre le plancher de la catégorie de tarifs la plus onéreuse et le plafond de la catégorie suivante, et fixant ces deux valeurs à 40.000 euros.

Enfin, sous réserve de ces deux amendements et au bénéfice de ses explications, M. Daniel Soulage, rapporteur pour avis, a proposé à la commission de donner un avis favorable aux crédits de la mission « Sécurité sanitaire » et à l'article 52 qui lui est rattaché.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion