Intervention de Jean-Patrick Courtois

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 9 décembre 2009 : 1ère réunion
Réforme des collectivités territoriales — Examen du rapport et du texte proposé par la commission

Photo de Jean-Patrick CourtoisJean-Patrick Courtois, rapporteur :

a tout d'abord souligné que la réforme des collectivités territoriales, réforme ambitieuse et très attendue, visait à rendre l'architecture territoriale à la fois plus lisible pour les citoyens et plus efficiente pour les acteurs locaux.

Il a rappelé les travaux conduits par la mission sénatoriale présidée par M. Claude Belot qui a élaboré, sur le rapport de Mme Jacqueline Gourault et de M. Yves Krattinger, des propositions constructives, sur lesquelles l'ensemble du Sénat a eu l'occasion de prendre position lors de deux débats dédiés à l'organisation territoriale.

a indiqué avoir engagé une très large concertation au travers de l'audition par lui-même des principaux responsables des collectivités, de l'audition par la commission des lois ouverte à l'ensemble des sénateurs et à la presse, le 28 octobre 2009, des ministres, MM. Brice Hortefeux, Alain Marleix et Michel Mercier, puis de l'organisation, le 2 décembre, d'un débat d'orientation dans les mêmes conditions.

Il a déclaré avoir axé son travail et ses amendements autour de quatre principes : le pragmatisme, le respect des libertés locales, la souplesse et la simplification.

Il a ensuite rappelé les principales dispositions du projet de loi :

- l'institution de métropoles, dotées d'un bloc de compétences obligatoires rassemblant celles de la communauté urbaine, élargies notamment aux autorisations d'utilisation du sol, celles du département en matière de transports scolaires et de voirie ainsi qu'un minimum de compétences économiques du département et de la région. Ce socle pourrait être élargi, par la voie conventionnelle, aux autres compétences régionales et départementales. En outre, l'Etat pourrait transférer à la métropole, à sa demande, de grands équipements et infrastructures ;

- la création d'un nouvel outil : le pôle métropolitain destiné à porter des coopérations renforcées entre territoires urbains qui souhaitent y procéder ;

- la substitution à la loi Marcellin de 1971 d'un nouveau dispositif de fusion de communes qui se veut « plus simple, plus souple et plus incitatif » : celui des communes nouvelles ;

- l'achèvement, le renforcement et la rationalisation de la carte de l'intercommunalité ; la réalisation de ces objectifs passe par l'élaboration d'un schéma départemental, la simplification des procédures, l'amélioration de la représentativité des commissions départementales de la coopération intercommunale (CDCI) et le renforcement de leur rôle, l'attribution aux préfets de pouvoirs spéciaux, la démocratisation des instances intercommunales, au travers de la désignation des délégués des communes membres au suffrage universel direct, selon un système de « fléchage ». Dans ce cadre, un régime unique, applicable à tous les types d'EPCI à fiscalité propre, sera mis en place pour fixer le nombre et la répartition des sièges au sein des conseils communautaires : ces éléments ne seront plus déterminés par un accord amiable entre les conseils municipaux des communes membres, mais par un tableau qui figure à l'article 3 du projet de loi ;

- la création d'une procédure de regroupement de départements et d'une procédure de regroupement de régions ;

- l'abrogation des dispositions relatives aux pays et l'interdiction de conditionner l'octroi d'une subvention à l'appartenance à une structure de coopération territoriale donnée.

Présentant ses amendements, M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur, a indiqué qu'ils s'articulaient, pour l'essentiel, autour de onze objectifs :

1. Approuver la création des conseillers territoriaux : après avoir rappelé que le projet de loi procédait à la création des conseillers territoriaux, qui seront élus pour la première fois en mars 2014, il a souhaité répondre aux inquiétudes des élus départementaux comme régionaux, en soulignant que cette réforme permettrait d'améliorer la coordination entre le département et la région, sans remettre en cause les spécificités de chacune de ces deux collectivités, qui resteraient administrées par des assemblées délibérantes distinctes. Il a fait valoir que les conseillers territoriaux, piliers de la clarification des compétences des structures locales, bénéficieraient de missions et de responsabilités plus étendues que leurs prédécesseurs et qu'en conséquence leur création devait être comprise comme un acte de confiance envers les élus locaux. Pour l'ensemble de ces raisons, il a proposé d'approuver la création des conseillers territoriaux, sous réserve de quelques amendements rédactionnels.

2. Pour préserver la liberté des communes et garantir le maintien d'un bloc de compétences propres, M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur, a tout d'abord jugé essentiel de donner une réelle liberté aux communes membres dans la fixation du nombre et de la répartition des sièges au sein des organes délibérants des EPCI. Or, le système proposé par le Gouvernement à l'article 3 du projet de loi, qui ne laisse aucune marge de manoeuvre aux communes, lui est apparu excessivement rigide pour les élus locaux. Il a donc souhaité, dans un souci de pragmatisme, permettre aux communes membres de se dispenser d'appliquer le tableau prévu à l'article 3, à condition de parvenir à un accord unanime et de respecter certaines règles fondamentales.

Dans le même esprit, il a proposé de prévoir que les dispositions relatives à la composition des conseils communautaires n'entreront en vigueur qu'en 2014, soit après le prochain renouvellement général des conseils municipaux, sauf pour les EPCI à fiscalité propre formés après la promulgation de la loi de réforme des collectivités territoriales.

Il a également appelé à conforter l'objectif du projet de loi de préserver les compétences communales tout en améliorant le fonctionnement du couple commune/EPCI, qui constitue l'axe de proximité de l'organisation territoriale ; à cette fin, il a proposé de substituer à la majorité simple, prévue par le projet de loi, une majorité qualifiée pour le transfert de compétences à l'EPCI et pour la détermination de l'intérêt communautaire.

Enfin, il a souhaité revenir sur le caractère automatique du transfert du pouvoir de police au président de l'EPCI dans certains domaines, ce pouvoir faisant partie du noyau des compétences du maire.

3. Afin de favoriser la libre-administration des collectivités territoriales, il a proposé de limiter les pouvoirs du préfet :

- en encadrant son intervention dans le processus de création d'une commune nouvelle lorsque toutes les collectivités concernées y sont favorables ;

- dans le cadre de l'intercommunalité, en supprimant son pouvoir d'appréciation pour mettre en oeuvre le schéma départemental de la coopération intercommunale et en lui imposant les différentes modifications adoptées par la CDCI à la majorité des deux tiers.

4. Souhaitant renforcer les outils dévolus aux collectivités et partageant l'objectif de souplesse et d'économie de fonctionnement promu par le projet de loi, il a proposé de faciliter encore les mises à disposition de services entre les collectivités, notamment entre la métropole et le département ou la région, de manière à adapter plus efficacement les moyens disponibles aux compétences transférées.

5. Il a proposé plusieurs mesures tendant à favoriser le bon fonctionnement des structures locales :

- prévoir l'accord de la commune-centre dans les procédures de création, de modification du périmètre, de fusion, de dissolution des EPCI ou des syndicats mixtes ;

- privilégier la liberté locale pour choisir l'EPCI de rattachement de la commune nouvelle et pour attribuer la qualité d'officier de police judiciaire et d'officier d'état civil aux maires délégués des communes nouvelles ;

- supprimer des orientations fixées au schéma départemental le seuil de 5 000 habitants pour la constitution d'un EPCI.

6. Il a jugé nécessaire de préciser le régime des métropoles :

- en prévoyant un critère de création fonctionnel en plus du seuil démographique afin de garantir aux métropoles un développement comparable aux agglomérations européennes métropolitaines ;

- en abaissant le seuil démographique de création des communautés urbaines de 500 000 à 450 000 habitants afin de conserver une cohérence à la déclinaison des EPCI au regard de leur degré d'intégration ;

- en conciliant les exigences de la réussite des métropoles avec la préservation des compétences du maire en matière d'autorisation d'utilisation du sol.

7. Il a souhaité apporter de nouvelles garanties aux procédures de regroupement des départements et des régions, afin de prévoir que, lorsqu'une consultation a été organisée, l'accord de la population soit recueilli dans chacun des territoires concernés, ce qui évitera qu'un territoire plus peuplé puisse forcer un autre à se regrouper avec lui, en dépit de l'opposition commune de son conseil et de sa population. En cas de désaccord, seule la loi pourrait alors prévoir le regroupement en cause.

Par ailleurs, il a suggéré la mise en place d'une nouvelle procédure permettant aux conseils généraux et au conseil régional qui le souhaitent de solliciter du législateur, avec l'accord de la population, la création d'une collectivité se substituant à la région et aux départements qui la composent.

8. Il s'est réjoui que le projet de loi mette fin à la pratique consistant à conditionner l'octroi d'une subvention à une collectivité à son adhésion à une structure de coopération ou d'organisation intercommunale, notamment un pays. Il a mis en avant la nécessité d'ajouter aux exclusions prévues par l'article 28 du projet de loi le cas des associations de collectivités territoriales derrière lesquelles pourraient se recréer les pays supprimés par l'article 25.

9. Il a suggéré de faciliter le recours, pour les syndicats intercommunaux et les syndicats mixtes, ouverts ou fermés, aux mécanismes de fusion, de substitution ou de dissolution.

10. Il a proposé de clarifier les principes qui régiront l'élaboration de la prochaine loi sur les compétences et de supprimer en partie une disposition trop imprécise sur les cofinancements.

11. Enfin, il a jugé opportun d'améliorer la qualité du projet de loi en le coordonnant avec d'autres textes en cours de discussion devant le Parlement, ou en garantissant sa conformité à la Constitution. Dans ce cadre, il a proposé de mettre en cohérence l'article 4 avec le processus du « Grenelle de l'environnement », et de supprimer l'article 40, qui habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnances dans des termes contraires à l'article 38 de la Constitution.

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