Intervention de Jean Picq

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 22 juin 2010 : 1ère réunion
L'éducation nationale face à l'objectif de la réussite de tous les élèves — Audition de M. Jean Picq président de la troisième chambre de la cour des comptes

Jean Picq, président de la troisième chambre de la Cour des comptes :

Merci de votre appréciation, monsieur Renar. Vous avez noté une lacune de notre rapport : la formation des enseignants. La mastérisation est en route et nous mènerons une enquête à son sujet dès cette année. Vous avez raison de souligner l'importance de la formation continue : c'est aussi un point aveugle de ce rapport.

Si j'étais ministre, je ne serais pas ici. Cependant, je noterais la question-clé du débat : comment lancer le chantier d'une réorganisation, profonde et novatrice, du système pour le faire passer d'une logique qui uniformise au nom de l'égalité, à une logique qui différencie, au nom de l'égalité également. La confiance accordée aux chefs d'établissement et aux équipes pédagogiques implique une surveillance régulatrice afin de ne pas en arriver à creuser les inégalités.

Monsieur Lagauche, il est inutile de changer le statut des établissements primaires pour donner à leurs directeurs davantage d'autorité et la capacité de discuter avec les élus. Leur décharge n'est peut-être pas suffisante. C'est encore un chantier à ouvrir...

Nous n'avons pas traité de la mobilité car ce rapport, s'il est important, n'est pas le dernier. Il faudra traiter de nouveaux chantiers : la mobilité, la formation, la gestion des personnels. Intuitivement, on peut déjà affirmer que la mobilité est trop forte en début de carrière et trop faible en fin de carrière. La stabilité ne doit pas conduire à l'immobilisme.

Nous aborderons aussi la question des rectorats pour mieux comprendre leur fonctionnement. Il est clair que, si les pouvoirs publics décident de s'engager dans la voie d'une logique de redistribution, les échelons intermédiaires de l'éducation nationale - recteurs, inspecteurs d'académie, chefs d'établissement - plutôt que de demeurer de simples échelons déconcentrés devront avoir davantage de responsabilités dans cette redistribution.

Monsieur Dupont, le principal obstacle, c'est notre ignorance des coûts. Si nous voulons passer à un système d'arbitrage, il nous faut impérativement les connaître. Un exemple, la réforme des lycées : la décision d'allouer à tous les lycées de France deux heures d'accompagnement personnalisé a un coût. Or il n'est pas évident qu'il doive être le même à Henri IV que dans un lycée où 60 % des élèves sont en échec scolaire. La connaissance des coûts est la condition nécessaire des arbitrages et du passage à une logique de régulation.

Madame Bourzai, il y a deux ans, nous avions présenté à votre commission des finances un rapport sur l'école maternelle dont les sénateurs se demandaient s'il s'agissait d'une variable d'ajustement. Sur cette école et ses deux dimensions, la pensée a beaucoup évolué. Sur la scolarisation des enfants de deux ans, les données de l'éducation nationale nous avaient laissé songeurs et le tableau des taux de cette scolarisation était à première vue incompréhensible. En revanche, en Seine-Saint-Denis, on ne scolarisait pas les enfants de deux ans car les parents le refusaient. Vos collègues du Finistère ou d'Auvergne expliquaient que chez eux, la scolarisation précoce était une tradition.

Au total rien n'est plus utile que de mener un tel débat avec vous qui êtes observateurs d'un système et contribuez à ce que notre travail aide à corriger les dysfonctionnements et à traiter la difficulté scolaire.

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