Intervention de Joachim Fried

Commission des affaires économiques — Réunion du 3 décembre 2008 : 1ère réunion
Organisation et régulation des transports ferroviaires — Audition de M. Joachim Fried

Joachim Fried, administrateur et directeur des affaires européennes et des relations avec l'autorité de régulation de la Deutsche Bahn :

a procédé à une brève présentation de la Deutsche Bahn, indiquant que son chiffre d'affaires était de 31 milliards d'euros dont moins de la moitié concerne le transport ferroviaire. Son augmentation a été de 9 % en 2008 dont 5,5 % liés à la croissance économique. Evoquant le contexte européen du secteur ferroviaire, il a fait valoir les éléments suivants :

- la France est un des pays dans lesquels la libéralisation du fret ferroviaire est la moins avancée alors qu'il existe une relation positive entre le degré d'ouverture du marché et la croissance du trafic ;

- l'ouverture effective d'un marché ferroviaire ne résulte pas seulement du cadre législatif et réglementaire mais elle dépend très fortement de l'indépendance et des pouvoirs de l'autorité de régulation nationale, qui sont actuellement très faibles en France malgré les obligations imposées par la directive européenne n° 2001/14/CE du 26 février 2001 concernant la répartition des capacités d'infrastructure ferroviaire.

Il a ensuite fait état de la situation du secteur ferroviaire en Allemagne, indiquant d'entrée que les autorités de régulations du secteur ferroviaire y intervenaient dans quatre domaines :

- la régulation de l'accès à l'infrastructure ;

- la régulation des redevances pour l'utilisation de cette infrastructure ;

- la réglementation sur l'organisation et la structure de la Deutsche Bahn et des entreprises ;

- et la réglementation des compétences administratives dévolues aux différentes entités.

Il a ensuite précisé que ces missions étaient assurées par deux institutions principales : d'une part, l'Office fédéral ferroviaire qui est, par ailleurs, en charge de la sécurité et du contrôle des investissements ferroviaires et l'Agence fédérale du réseau, d'autre part, cette dernière étant compétente pour l'ensemble des services de réseau tels que les télécommunications, le gaz et l'électricité. Il a notamment fait valoir que les décisions de ces organismes étaient immédiatement exécutoires.

Revenant sur le lien entre concurrence et développement du trafic, il a fait observer que ce dernier n'avait réellement débuté en Allemagne qu'à partir de 1998, quatre ans après le début de l'ouverture du marché et que cette croissance était essentiellement le fait des nouveaux entrants dans le secteur du fret et des trains régionaux. A l'inverse, la concurrence est moindre pour les trafics de voyageurs longue distance, qui demandent des investissements importants.

La Deutsche Bahn est adaptée à cette nouvelle situation grâce à une augmentation de sa productivité de 256 % depuis la réforme ferroviaire de 1994, notamment à travers la réduction drastique du nombre de ses salariés, passés de 500.000 à 170.000, cette diminution ayant essentiellement concerné les fonctions non directement liées au transport ferroviaire telle que la recherche et développement et les activités sociales exercées par l'ancienne compagnie des chemins de fer de la RDA. Mais ce n'est que depuis 2003 que le groupe réalise un résultat net positif après impôt.

a ensuite établi des comparaisons entre la charge budgétaire des prestations de trafic ferroviaire dans les différents pays européens, qui est plus du double en France de ce qu'elle est en Allemagne. Cette différence tient principalement à deux facteurs : d'une part, la France investit beaucoup plus dans la construction de lignes que ne le fait l'Allemagne et d'autre part, le réseau français est relativement sous-utilisé et pourrait être mieux rentabilisé si ses capacités étaient mobilisées.

Puis M. Joachim Fried a abordé la problématique de la mise en place d'une autorité de régulation permettant de garantir le fonctionnement de la concurrence. A l'aune de l'expérience allemande, les critères à satisfaire par une telle entité sont : l'indépendance, le fait de bénéficier des effectifs nécessaires spécialisés, d'un budget suffisant, et des moyens d'accès à plusieurs types d'informations sur le secteur. S'y ajoutent la nécessité de disposer de pouvoirs de contrainte effectifs et la capacité de pouvoir se saisir d'office, en cas de soupçon suffisant. Au regard de ces critères, il a estimé que la commission de régulation des activités ferroviaires telle que proposée par le projet de loi relatif à l'organisation et à la régulation des transports ferroviaires et guidés marquait une avancée très positive. Toutefois, il a signalé un certain nombre de lacunes, telles que :

- l'absence de transmission obligatoire du document de référence du réseau et du document de référence des infrastructures de services, pour les services essentiels ;

- la trop faible capacité d'intervention de la commission en matière d'infrastructures de service telles que les gares ;

- la non-transmission obligatoire des refus d'accès ;

- l'insuffisance des pouvoirs de saisine d'office de la nouvelle instance.

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