a tout d'abord rappelé la forte mobilisation des personnels de l'audiovisuel public les 13 février, 18 juin et 25 novembre derniers, qui témoigne des craintes que suscite le projet de loi.
Le modèle économique qu'il propose apparaît en effet fort fragile :
- l'annonce de la suppression de la publicité a d'ores et déjà plongé France Télévisions dans une spirale déficitaire ;
- la dotation supplémentaire de 150 millions d'euros ouverte en cours d'année suffira à peine à maintenir les entreprises concernées à flot ;
- pour 2009, la commission dite « Copé » avait estimé le manque à gagner lié à la suppression de la publicité entre 20 heures et 6 heures du matin à 450 millions d'euros. Pour l'heure, malgré les diverses mesures prévues ou annoncées et compte tenu des coûts supplémentaires induits par la production de programmes supplémentaires aux heures où était diffusée de la publicité, estimés à 70 millions d'euros, le manque à gagner pour France Télévisions demeure de l'ordre de 100 à 150 millions d'euros ;
- cette estimation prend en compte l'impact des amendements proposés à l'Assemblée nationale, qui viennent diviser par deux le produit de la taxe sur la publicité et diminuer très fortement le rendement de la taxe pesant sur le chiffre d'affaires des opérateurs du secteur des communications électroniques ;
- elle intègre également la baisse prévisible des recettes liées à la vente d'espaces publicitaires diffusés en journée sur les chaines de service public, les entreprises privées du secteur ayant d'ores et déjà adopté une stratégie agressive sur ce segment ;
- elle comprend aussi les coûts liés à la création d'une entreprise unique, qui ne se traduira pas seulement par des gains de productivité, mais qui supposera également une harmonisation sociale et salariale, ainsi qu'un effort de formation pour permettre la mobilité des personnels au sein de l'entreprise unique, soit au total des dépenses supplémentaires de 70 millions d'euros ;
- un emploi équivalent à près de 70 000 euros, une baisse du budget de France Télévisions d'un montant de 140 millions d'euros se traduirait par 2000 suppressions d'emplois, cet ordre de grandeur fournissant un bon point de repère pour évaluer les effets de la réforme en l'état.
Après avoir indiqué qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, la réforme proposée apparaissait particulièrement hasardeuse, M. Marc Chauvelot s'est déclaré favorable à l'indexation de la redevance, tout en s'étonnant de la volonté affichée par le ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique de neutraliser les effets de cette indexation.
De même, le passage de la diffusion analogique à la diffusion numérique génèrera des économies qui doivent être utilisées pour financer le développement de la télévision publique, et non reversées, d'une manière ou d'une autre au budget de l'État.
a ensuite évoqué les pistes permettant à la télévision publique de dégager des recettes nouvelles :
- les droits de détention des oeuvres, qui pour l'heure vont essentiellement aux producteurs privés, devraient bénéficier avant tout aux chaines publiques qui ont financé la plus grande partie de l'investissement initial. L'audiovisuel public pourrait ainsi développer une véritable politique patrimoniale au lieu de voir ces droits lui échapper au bout de deux diffusions. C'est au demeurant une telle politique que des chaînes comme la British Broadcasting Corporation (BBC) ont su développer, cette dernière en tirant désormais 21 % de ses recettes ;
- l'amendement proposé par M. Christian Kert au nom de la commission spéciale de l'Assemblée nationale, qui prévoit l'éclatement des guichets uniques d'achat prévus par la réforme, n'est pas acceptable. Si la diversité des programmes suppose des guichets éditoriaux multiples, la constitution d'une entreprise unique est l'occasion pour les chaines publiques de dégager de vraies marges de négociation économique.
a enfin souligné les limites des arguments développés en faveur de la nomination des présidents des sociétés nationales de programme par le pouvoir exécutif. Ils reviennent en effet à reconnaître que le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) n'a qu'une indépendance toute relative. Aussi ce pouvoir devrait-il revenir à la représentation nationale ou au CSA si sa composition était rénovée. Par ailleurs, la durée effective des mandats des présidents suscite des inquiétudes, la longévité des dirigeants des chaines publiques étant bien différente de celle de leurs homologues des chaînes privées.