Puis la commission a procédé à l'examen du rapport de M. François Zocchetto sur le projet de loi n° 133 (2006-2007), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, tendant à renforcer l'équilibre de la procédure pénale.
a tout d'abord estimé que, si le projet de loi pouvait être considéré par certains comme une réponse trop partielle aux dysfonctionnements révélés par l'affaire d'Outreau, une réaction immédiate du législateur s'imposait cependant compte tenu des préoccupations de l'opinion publique et de la nécessité de maintenir le lien de confiance entre les magistrats et les justiciables.
Après avoir concédé que la matière pénale évoluait souvent selon des effets de balancier, il a estimé que le projet de loi s'accordait largement aux principes défendus avec constance par le Sénat, en s'efforçant de favoriser un travail plus collectif des magistrats, d'encadrer davantage le placement en détention provisoire, de renforcer le caractère contradictoire de la procédure pénale et de favoriser la célérité de la justice.
Il a tout d'abord expliqué qu'afin de rompre la solitude du juge d'instruction, le texte visait à renforcer, dans un premier temps, le recours à la cosaisine exercée dans le cadre de pôles de l'instruction et, dans un second temps, à instituer la collégialité de l'instruction.
Il a rappelé que la collégialité ou la cosaisine des magistrats instructeurs avait inspiré plusieurs réformes, en particulier la loi du 10 décembre 1985 portant réforme de la procédure d'instruction en matière pénale, initiée par M. Robert Badinter, alors garde des sceaux, qui instituait auprès de chaque tribunal d'instance une ou plusieurs chambres d'instruction mais qui n'avait jamais pu être appliquée.
Indiquant que la cosaisine était actuellement possible pour les dossiers graves et complexes, il a fait observer qu'elle se heurtait toutefois, en pratique, à l'insuffisance des effectifs des juges d'instruction, 66 des 180 tribunaux de grande instance ne comportant qu'un seul juge d'instruction tout en ne traitant cependant qu'un peu moins de 5 % des dossiers, avant de signaler que la cosaisine fonctionnait efficacement au sein de la section antiterroriste du tribunal de grande instance de Paris.
Le rapporteur a expliqué que le projet de loi prévoyait la création de pôles de l'instruction regroupant plusieurs juges d'instruction dans certains tribunaux de grande instance et seuls compétents pour connaître des informations en matière criminelle ou faisant l'objet d'une cosaisine, tout en précisant que l'affaire retournerait ensuite dans le tribunal du lieu de l'infraction pour la phase de jugement.
Il a indiqué que l'Assemblée nationale avait complété ce dispositif en instituant la collégialité de l'instruction pour les actes les plus importants, dans un délai de cinq ans, afin de garantir la mobilisation des moyens humains et matériels nécessaires à la réussite de cette réforme.
Relevant que la mise en place des pôles de l'instruction suscitait de réelles inquiétudes des avocats, M. François Zocchetto, rapporteur, a estimé que, si la proximité territoriale était souhaitable pour le traitement de certaines affaires judiciaires, essentiellement en matière civile, il n'en était pas de même pour les affaires pénales complexes, et qu'il convenait d'éviter que le juge d'instruction, isolé dans un tribunal de grande instance, ne se trouve placé dans une « collégialité » de fait avec le parquet.
Considérant que l'instauration de la collégialité était une réforme essentielle, il a proposé de ramener de cinq à trois ans son délai d'entrée en vigueur.
Rappelant que la détention provisoire était au coeur des dysfonctionnements de la procédure pénale constatés lors de l'affaire d'Outreau, et que son régime juridique faisait l'objet d'une importante instabilité législative, il a relevé que le nombre de prévenus -soit un tiers des personnes détenues- était stable depuis plusieurs années.