Intervention de Catherine Tasca

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 25 juillet 2007 : 1ère réunion
Francophonie — Maison de la francophonie - communication

Photo de Catherine TascaCatherine Tasca, rapporteure :

a indiqué qu'elle avait estimé, en accord avec le président de la commission, qu'il était utile qu'elle informe la commission des évolutions de ce dossier, en tant que rapporteur du projet de loi autorisant l'approbation de la convention relative à la Maison de la Francophonie.

a tout d'abord rappelé que l'idée de regrouper dans un site unique, appelé « Maison de la Francophonie », toutes les institutions de la francophonie ayant leur siège à Paris a été évoquée pour la première fois par l'ancien Président de la République, M. Jacques Chirac, lors du Sommet de la francophonie qui s'est tenu à Beyrouth, le 18 octobre 2002.

Actuellement, les institutions de la francophonie présentes dans la capitale (l'Organisation internationale de la francophonie, l'Agence universitaire, l'Association internationale des maires francophones, l'Assemblée parlementaire de la francophonie, etc.) sont implantées sur sept sites différents, ce qui suscite d'importants doublons.

Après avoir envisagé plusieurs sites, le choix du gouvernement s'est finalement porté sur un bâtiment, situé 20 avenue de Ségur, qui a abrité le siège du ministère des Postes et Télécommunications.

Un tiers de la surface de cet immeuble (soit environ 11 000 mètres carrés) a été rendu disponible par le départ d'agents du ministère de l'économie et des finances.

Le gouvernement a donc estimé que l'on pouvait y installer la Maison de la Francophonie, les deux tiers restants étant actuellement occupés par le ministère de l'Ecologie et du Développement durable.

Le choix de ce site pour installer la Maison de la Francophonie a d'ailleurs reçu, en 2004, l'avis favorable de l'Inspection générale de l'Administration.

Le Gouvernement a donc signé, le 28 septembre 2006, une convention avec l'Organisation internationale de la Francophonie, prévoyant la mise à disposition à titre gratuit et pour une durée de trente ans, renouvelable, après achèvement des travaux d'aménagement, de locaux dans ce bâtiment destinés à l'installation de la Maison de la Francophonie.

Etant donné qu'il s'agit d'un bâtiment assez ancien (il date des années 1930), il a toutefois été jugé nécessaire de le rénover.

Le coût de la rénovation de l'ensemble de ce bâtiment a d'abord été évalué à 35 millions d'euros.

a précisé que sur ces 35 millions d'euros, seul un tiers, soit 12 millions d'euros, était directement lié à l'installation de la Maison de la Francophonie.

De plus, elle a indiqué qu'il était prévu que l'Organisation internationale de la francophonie contribue à cette charge par la vente des deux immeubles qu'elle possède, l'un à Paris, quai André Citroën (estimé à 8 millions d'euros), l'autre situé à Bordeaux, d'une valeur de 3 millions d'euros.

Au total, la charge pour l'Etat de l'installation de la Maison de la Francophonie était donc de l'ordre d'1 million d'euros dans la première évaluation.

Le coût de la rénovation de l'ensemble du bâtiment a ensuite été porté en juillet 2006, de 35 à 60 millions d'euros, à la suite de la découverte d'amiante dans les sols.

Puis, en janvier 2007, ce montant a été porté à 85 millions d'euros, 25 millions d'euros supplémentaires étant nécessaires pour mettre l'immeuble aux normes thermiques, à la suite de la demande du ministère de l'Eologie et du Développement durable.

On peut certes s'étonner de l'amplitude de la variation des montants en jeu et regretter la mauvaise évaluation financière initiale de ce projet, a noté Mme Catherine Tasca, rapporteure, mais on ne peut pas pour autant accuser la Maison de la Francophonie d'être à l'origine de ces surcoûts et encore moins d'un véritable scandale financier, qui coûterait plus de 550 millions d'euros aux contribuables français, tel que le rapportait le journal Le Figaro, a-t-elle estimé.

Elle a rappelé que la Maison de la Francophonie n'est concernée que pour un tiers de la surface du bâtiment. Etant donné que le coût de la rénovation de l'ensemble du bâtiment est évalué à 85 millions d'euros, la Maison de la francophonie est concernée pour 28,3 millions d'euros, dont il faudrait retrancher le produit de la vente des deux immeubles que possède l'Organisation internationale de la francophonie (OIF) (soit 11 millions d'euros), ce qui ferait donc un total d'environ 17 millions d'euros pour la Maison de la Francophonie.

Selon Mme Catherine Tasca, rapporteure, on ne peut pas non plus prétendre sérieusement ajouter à ce montant le coût du déménagement et de l'installation provisoire du personnel du ministère de l'Ecologie et du Développement durable dans un autre site pendant toute la durée des travaux.

En réalité, le projet de Maison de la francophonie semble faire les frais des nombreux atermoiements du ministère de l'Ecologie et du Développement durable, directement à l'origine du retard pris dans la rénovation du bâtiment, a estimé Mme Catherine Tasca, rapporteure.

A ce jour, on ne sait toujours pas si le ministère de l'Ecologie et du Développement durable réintégrera ou non le bâtiment à l'issue des travaux.

Par ailleurs, on peut s'étonner qu'au même moment, l'annonce du rachat par l'Etat du bâtiment de l'Imprimerie nationale pour un montant de 376,7 millions d'euros, alors que l'Etat l'avait cédé il y a quatre ans au fond d'investissement américain Carlyle pour une somme de 85 millions d'euros n'ait pas suscité plus de réactions. Il semblerait pour Mme Catherine Tasca, rapporteure, que la francophonie soit une cible plus facile que les fonds de pension anglo-saxons.

Après ce rappel des faits, Mme Catherine Tasca, rapporteure, a souhaité faire trois observations.

Tout d'abord, elle a rappelé que personne ne conteste le bien-fondé du projet de créer une Maison de la Francophonie à Paris, pour regrouper sur un site unique des organismes aujourd'hui dispersés sur sept sites différents.

Il devrait donc entraîner une réduction des coûts de fonctionnement par la suppression des frais de location (évalués à 1,7 million d'euros par an) et la mise en commun de certains services (comme, par exemple, le service de l'accueil, de la sécurité, du courrier ou de l'informatique). Surtout, il devrait faciliter le travail en commun des différents organismes. Il participe donc au mouvement actuel de modernisation institutionnelle de la francophonie, et notamment à l'unité de commandement décidée lors du Sommet de Ouagadougou, en novembre 2004.

Ensuite, Mme Catherine Tasca, rapporteure, a rappelé que la mise à disposition par la France d'un bâtiment pour accueillir la Maison de la Francophonie correspondait à une obligation d'Etat-hôte, c'est-à-dire aux engagements internationaux de la France.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial, a évalué à 14 millions d'euros par an le coût pour l'Etat de l'abandon de loyer du bâtiment situé au 20 avenue de Ségur. Mais peut-on réellement parler d'abandon de loyer pour un bâtiment mis à la disposition d'une organisation internationale ? Ce serait comme si on essayait d'évaluer le coût de la mise à la disposition par l'Etat du bâtiment accueillant le siège de l'UNESCO, a estimé Mme Catherine Tasca.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial, a préconisé la vente de l'immeuble de l'avenue de Ségur et l'achat d'un autre bâtiment, sans travaux, pour accueillir la Maison de la Francophonie, ce qui a toujours été l'option privilégiée par les ministères de l'Economie et des Finances. Mme Catherine Tasca, rapporteure, a indiqué que cette proposition devait être accueillie avec prudence, étant donné qu'il faut tenir compte de la décision qui sera prise de réinstaller ou non le ministère de l'Ecologie et du Développement durable dans le bâtiment du 20 avenue de Ségur, de la difficulté de trouver des locaux équivalents dans la capitale et du prix de l'immobilier à Paris.

Enfin, Mme Catherine Tasca, rapporteure, a indiqué qu'il ne faudrait pas que, dans cette affaire, l'image de la francophonie soit ternie, compte tenu de son importance pour la place de notre langue, mais aussi pour la défense de valeurs communes, comme la diversité culturelle, les Droits de l'Homme et la démocratie. Selon Mme Catherine Tasca, rapporteure, la francophonie, qui regroupe aujourd'hui 55 Etats membres et 13 Etats observateurs, soit 10 % de la population mondiale, mérite mieux que son image souvent véhiculée dans les médias et mieux qu'un procès injuste et assez humiliant pour l'ensemble des Etats membres de l'Organisation internationale de la francophonie et pour son Secrétaire général, M. Abdou Diouf.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion