Intervention de Paul Blanc

Commission des affaires sociales — Réunion du 28 novembre 2006 : 1ère réunion
Pjlf pour 2007 — Mission « solidarité et intégration » et articles 53 à 56 rattachés - examen du rapport pour avis

Photo de Paul BlancPaul Blanc, rapporteur pour avis :

a tout d'abord indiqué que les crédits de la mission « Solidarité et Intégration » s'élèvent pour 2007 à 12,2 milliards d'euros, dont plus de la moitié est affectée à l'allocation de parent isolé (API) et l'allocation aux adultes handicapés (AAH).

Pourtant, à enveloppe globale constante, grâce aux économies permises par la diminution significative du nombre de demandeurs d'asile et à la réduction de la contribution de l'Etat au fonds de financement de la couverture maladie universelle (fonds CMU), il sera possible de financer par redéploiement les deux priorités de la mission : la poursuite du plan de cohésion sociale et la montée en charge de la loi « Handicap ».

En effet, le budget de 2007 permet à l'Etat d'honorer les engagements pris au titre du plan de cohésion sociale dans trois domaines.

Il s'agit, en premier lieu, d'améliorer l'accueil des publics fragiles ou en difficulté.

A cet égard, le financement de 600 places nouvelles dans les centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), dont 100 dans les départements d'outre-mer, particulièrement sous-dotés, ainsi que la revalorisation des salaires des personnels constituent un élément positif.

En revanche, M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a déploré que l'assainissement de la situation financière des CHRS, préconisé par la mission d'inspection de l'Igas et de l'IGF en 2005, n'ait pas été poursuivi, et a annoncé qu'il présenterait un amendement visant à verser, pour 2007, 6 millions d'euros supplémentaires en complément de l'effort déjà produit en 2006.

En outre, il faut regretter que les mesures correctrices déjà prises ne se soient pas encore traduites par une réduction significative de la durée des séjours dans les CHRS et par une diminution de la part des demandeurs d'asile parmi les personnes accueillies. La persistance de ces deux dérives crée ainsi un engorgement des CHRS et ne leur permet plus d'assumer pleinement leur mission d'accueil des publics en difficulté et d'accompagnement social adapté. La solution réside dans l'augmentation de l'offre de logements dans le parc social et dans le développement des dispositifs d'accueil des demandeurs d'asile.

En revanche, il convient de souligner la création de 1.500 places nouvelles dans les maisons relais, ce qui portera à près de 6.000 la capacité d'accueil de ces structures en 2007.

Enfin, le plan triennal d'hébergement d'urgence prévoit la pérennisation de 2.000 places d'accueil, la transformation de 1.000 autres en places de CHRS, l'allongement de la période d'ouverture des centres d'hébergement et le renforcement de l'accompagnement sanitaire et social.

a ensuite souligné l'effort significatif réalisé en faveur des centres d'accueil pour demandeurs d'asile (Cada), dont les capacités d'hébergement ont été multipliées par quatre depuis 2000, pour atteindre presque 20.000 places à la fin de 2006. Ce dispositif, renforcé par l'existence de 5.700 places d'hébergement d'urgence, la création en 2007 de 1.000 places nouvelles et la revalorisation du tarif journalier des places d'hébergement, privilégie ainsi l'hébergement sur le versement d'une allocation.

Parallèlement, malgré la diminution de 70 % de l'enveloppe budgétaire qui lui est consacrée, la nouvelle allocation temporaire d'attente est revalorisée d'1,8 % à compter du 1er janvier 2007. Les économies réalisées résultent à la fois de la baisse du nombre des demandeurs d'asile, du raccourcissement des délais d'instruction des dossiers et de l'augmentation des places disponibles en Cada.

En ce qui concerne les crédits destinés à améliorer les conditions d'accès aux soins, la diminution de 80 % en deux ans de la contribution de l'Etat au financement du fonds CMU est inquiétante. Elle s'explique par la participation accrue de l'assurance maladie au financement du fonds CMU, compensée par le transfert d'une partie de la taxe sur les alcools et des droits tabacs, ce qui a permis à l'Etat de réduire considérablement sa subvention d'équilibre.

De même, les crédits consacrés au financement de l'aide médicale d'Etat (AME) demeurent insuffisants. Le Conseil d'Etat a annulé les deux décrets du 28 juillet 2005, alors qu'ils devaient permettre d'enrayer la dérive des dépenses constatée chaque année, grâce à un resserrement des conditions d'accès à cette aide. Rappelant que la dette cumulée de l'Etat auprès de la Cnam atteint déjà près de 681 millions d'euros à la fin 2005, le rapporteur pour avis a proposé d'adopter un amendement visant à redéployer des crédits de la mission au profit de l'AME.

Enfin, M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a détaillé les mesures relevant de la troisième priorité du plan de cohésion sociale : l'intégration des étrangers et la lutte contre les discriminations.

Le contrat d'accueil et d'intégration connaît une montée en charge d'une rapidité exceptionnelle, puisque plus de 160.000 contrats seront signés à la fin de 2006. L'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations (Anaem), qui assure désormais sa mise en oeuvre, sera dotée pour 2007 de 28,6 millions d'euros.

Le budget pour 2007 financera aussi le développement des activités de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (Halde), dont les missions ont été étendues par la loi pour l'égalité des chances du 31 mars 2006. Ses interventions concernent d'ailleurs essentiellement le règlement de litiges relatifs aux discriminations liées à l'origine ou à l'emploi.

Puis M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a dressé un bilan rapide de l'évolution du RMI et de l'allocation de parent isolé (API), qui participent pour une large part à la politique nationale de lutte contre les exclusions.

Trois ans après sa décentralisation, le bilan du RMI est contrasté :

- le ralentissement de la hausse du nombre d'allocataires, 3,9 % en 2005 et 2,4 % en 2006, constitue un élément positif, tempéré par l'échec relatif des dispositifs favorisant le retour à l'activité. En effet, au 30 juin 2006, seuls 8.000 contrats d'insertion - RMA et environ 6.500 contrats d'accompagnement dans l'emploi (CAE) ont été signés, tandis que les contrats d'avenir ont remporté une plus large adhésion (33.000 contrats signés). Par ailleurs, il est encore trop tôt pour percevoir les effets des mesures adoptées dans le cadre de la loi du 23 mars 2006 relative au retour à l'emploi des bénéficiaires de minima sociaux ;

- malgré le dérapage très important des dépenses constatées en 2005, le Gouvernement a ouvert une enveloppe complémentaire de 500 millions d'euros, qui a permis de limiter le surcoût pour les départements à 250 millions. Pour autant il convient que le Gouvernement trouve une solution durable pour garantir le paiement de ce surcoût, d'ores et déjà estimé, pour 2006, à plus d'un milliard d'euros.

Par ailleurs, M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a estimé que les crédits consacrés au financement de l'API, 917 millions d'euros pour 2007, sont encore largement insuffisants, bien que les hypothèses retenues pour évaluer l'augmentation du nombre de bénéficiaires soient plus réalistes qu'en 2006. Il faut espérer que les articles 55 et 56 rattachés à la mission, qui limitent le recours à l'API et révisent son mode de calcul, permettent d'en réduire le coût.

Pourtant, au vu de la dette cumulée de l'Etat à l'égard de la branche famille qui, au 30 juin 2006, s'élevait à 232 millions d'euros, il a jugé opportun de prévoir un amendement permettant de redéployer une partie des crédits de la mission « Solidarité et intégration » au profit de l'API.

En ce qui concerne la politique du handicap, ses crédits s'élèvent à 8 milliards d'euros en 2007 et ils ne représentent qu'une petite partie de l'effort public en faveur des personnes handicapées qui mobilise en réalité 47 milliards d'euros, tous financeurs confondus.

Les ressources d'existence pour les personnes handicapées sont le premier poste de dépenses pour l'Etat : les crédits relatifs à l'allocation aux adultes handicapés (AAH) s'élèvent en effet en 2007 à 5,4 milliards d'euros. Certes, le nombre prévisionnel des bénéficiaires pour 2007 est plus fiable que l'an passé mais le montant moyen versé aux bénéficiaires est, lui, largement sous-estimé : il ne tient compte ni de la montée en charge des nouveaux compléments d'AAH, ni du dérapage général observé en 2006. Cette imprévision de l'Etat fait peser sur la branche famille une dette croissante. Il a donc proposé de majorer, par amendement, les crédits affectés à cette allocation.

Puis M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a approuvé le remplacement de la notion d'« impossibilité de se procurer un emploi du fait du handicap » par celle de « restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi » comme fondement de l'octroi de l'AAH pour les personnes dont le taux d'invalidité est compris entre 50 % et 80 %. Pour clarifier encore les conditions d'attribution de cette allocation, il a proposé de supprimer la condition d'ancienneté au chômage d'un an requise de ces personnes.

La seconde priorité de la politique du handicap en 2007 est d'assurer la montée en charge du droit à compensation, plus particulièrement de la prestation de compensation du handicap (PCH) entrée en vigueur le 1er janvier 2006. Malgré la publication des dispositions réglementaires nécessaires, le versement des premières aides a été retardé à cause des délais de mise en place des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH). Au 31 août 2006, seules 6.500 prestations avaient été attribuées, alors que 38.000 demandes avaient été déposées.

La PCH a toutefois permis de réels progrès, notamment pour le financement des aides humaines : les montants attribués sont supérieurs de 80 % à ceux versés dans le cadre de l'ancienne allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP). Au total, en 2007, le financement de la PCH mobilise 1,2 milliard d'euros de la part des départements et de la caisse nationale de solidarité (CNSA).

Les retards pris dans la mise en place des fonds départementaux de compensation du handicap, chargés d'aider les personnes handicapées à couvrir les frais restant à leur charge après déduction de la PCH sont inquiétants : en septembre 2006, seuls, 50 % des départements avaient installé ce fonds et l'implication de l'Etat reste modeste, équivalente à sa contribution d'autrefois aux sites pour la vie autonome (SVA).

De plus, lorsque ce fonds existe, le versement des aides aux personnes handicapées est affecté par une interprétation extrêmement restrictive de ses possibilités d'intervention : la plupart des gestionnaires considèrent la limitation du « reste à charge » pour les personnes handicapées à 10 % de leurs ressources non pas comme un plancher, mais comme un plafond d'intervention. Un amendement sera donc proposé pour revenir à la position première du Sénat en la matière, afin de préciser que la règle des 10 % s'appliquera aux tarifs et montants-plafonds de la PCH et que le fonds interviendra ensuite pour réduire encore le « reste à charge » si cela est nécessaire.

L'Etat participe à deux autres dispositifs en faveur du droit à compensation : la compensation collective à travers le financement de l'accueil en établissements et services médico-sociaux et le financement des tutelles et curatelles. Sur le premier point, 2.500 places d'établissements et services d'aide par le travail, financées par l'Etat, seront créées en 2007 ainsi que 5.900 places en établissements et services pour adultes et enfants lourdement handicapés, financées par l'assurance maladie et la CNSA. La répartition de ces nouvelles places se fera désormais dans le cadre des programmes interdépartementaux d'accompagnement des handicaps et de la perte d'autonomie (Priac), en fonction des opérations prioritaires pour équilibrer à l'échelle de la région l'offre d'accueil.

Abordant enfin la question de la participation des personnes handicapées à la vie de la cité, M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a salué les progrès remarquables obtenus pour la scolarisation en milieu ordinaire des enfants handicapés : en deux ans, leur nombre a augmenté de 36 % dans le premier degré et de 55 % dans le second degré, grâce au développement des dispositifs d'accompagnement des élèves handicapés, notamment les auxiliaires de vie scolaire (AVS). En 2007, l'éducation nationale financera près de 6.500 postes d'AVS, soit 5 % de plus qu'en 2006.

En matière d'emploi des personnes handicapées, les employeurs publics ont vu pour la première fois leur non-respect de l'obligation d'emploi sanctionné par une contribution au fonds « fonction publique » qui a collecté à ce titre plus de 52 millions d'euros. Le fait qu'aucune aide n'ait été versée en 2006 s'explique par les délais incompressibles pour la mise en place du fonds et de ses structures locales. Il est en revanche incompréhensible que les fonds ainsi collectés soient placés à la Caisse des dépôts et consignations sur un compte non rémunéré, alors que le produit du placement de ces sommes pourrait accroître les crédits destinés à l'insertion des fonctionnaires handicapés. De même, le refus du fonds « fonction publique » de financer le réseau des « Cap Emploi » ne se justifie pas : le décret qui précise les actions susceptibles d'être financées par ce fonds doit être modifié pour l'imposer.

En conclusion, il a proposé d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Solidarité et intégration » et des articles qui lui sont rattachés, sous réserve des amendements qu'il présentera.

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