a indiqué que si le groupe de travail formé autour du président Gérard Larcher s'est efforcé de mettre la réforme constitutionnelle « en musique », les orientations doivent encore être traduites dans le règlement du Sénat et dans les pratiques internes. Ceci étant, les travaux ont été denses, menés dans un climat de collégialité et de respect mutuel, sous la conduite de deux corapporteurs, MM. Jean-Jacques Hyest et Bernard Frimat. Cette réforme offre au Parlement de nombreux outils pour mieux légiférer et mieux contrôler. Ils permettront de favoriser la présence en commission ou en séance et d'intéresser davantage les citoyens aux débats sénatoriaux.
En ce qui concerne la maîtrise accrue du calendrier, le groupe de travail a prévu de consacrer en priorité trois journées - les mardi, mercredi et jeudi - à la séance publique et aux réunions de commission. Les commissions permanentes se tiendraient le mercredi matin, mais aussi le mardi matin jusqu'à 10 heures 30 pour permettre aux groupes politiques de se réunir ensuite de 10 heures 30 à 13 heures. Le but est d'éviter, autant que possible, les télescopages de réunions et de favoriser la présence.
L'établissement de l'ordre du jour s'organise désormais sur une période de quatre semaines, le dernier trimestre de l'année restant dévolu à l'examen de la loi de finances et de la loi de financement de la sécurité sociale. Une plus grande publicité des travaux du Sénat pourrait être envisagée tant au stade des travaux préparatoires de ces deux lois qu'à celui de l'évaluation de leur exécution. L'expérience a montré l'intérêt des auditions publiques des membres du Gouvernement et des services concernés au cours desquelles les rapporteurs et les autres membres de la commission peuvent poser des questions aux ministres et sensibiliser le Gouvernement aux difficultés que rencontrent les Français.
La nouveauté réside dans la semaine dont disposera désormais le Sénat dans l'ordre du jour partagé, dans celle dévolue au contrôle et à l'évaluation et dans la « niche parlementaire » mensuelle réservée aux groupes d'opposition et aux groupes minoritaires. Les travaux du Sénat seront programmés sur la durée d'une session ordinaire. La conférence des présidents organisera cette programmation, en lien étroit avec le Gouvernement et avec les représentants des commissions. Au début de chaque session ordinaire, elle déterminera les semaines de séance en les répartissant conformément au cadre tracé par la Constitution, ce qui permettra une meilleure visibilité des travaux. Il y aura bien entendu des adaptations en cours de session en fonction de l'actualité et des priorités politiques du moment.
a ensuite présenté la nouvelle procédure législative ordinaire, que les commissions des lois et des affaires économiques ont d'ailleurs déjà décidé d'expérimenter.
Il n'y aura pas de changement pour la discussion des projets de loi de finances et de financement : pas d'études d'impact car d'autres documents sont déjà prévus, inscription possible en priorité à l'ordre du jour par le Gouvernement, discussion sur la base du texte transmis par l'Assemblée nationale, absence de délai d'examen entre le dépôt du texte et la séance publique.
Pour les autres textes, et hors procédure accélérée, le parcours d'un projet de loi déposé en première lecture au Sénat sera le suivant :
- la première étape sera l'établissement par le Gouvernement d'une étude d'impact afin d'expliquer les raisons pour lesquelles il faut légiférer, d'énumérer les textes abrogés ou remplacés, de déterminer le coût des mesures nouvelles, les modes de financement retenus et les conséquences pratiques de la loi nouvelle. Il ne faudrait pas que ces études soient ou bien trop sommaires ou, au contraire, tellement détaillées que la lecture ne puisse en être réservée qu'à des spécialistes. La conférence des présidents de la première assemblée saisie est chargée d'y veiller avec la possibilité de saisir le Conseil constitutionnel ;
- la deuxième étape, facultative, consistera en la tenue d'un débat préalable, qualifié de « général », où s'exprimeront le Gouvernement et les représentants des groupes politiques. La conférence des présidents en décidera, lorsqu'elle l'estimera opportun, certainement sur des textes d'importance politique majeure, comme le projet de loi de financement de la sécurité sociale ;
- la troisième étape sera celle de l'établissement du rapport, qui intégrera désormais non seulement les amendements du rapporteur mais tous les autres amendements adoptés par la commission, qu'ils émanent du Gouvernement ou des sénateurs, membres ou non de la commission. Désormais, la discussion en séance publique portera sur le texte du rapport et non sur celui du projet gouvernemental. Cela signifie que les commissaires qui voudront présenter des amendements auront le plus grand intérêt à venir en séance de commission. Si leur amendement est incorporé au rapport, il aura, en effet, de plus grandes chances d'être définitivement adopté et cette intégration leur évitera de devoir le défendre longuement en séance publique. Les noms des auteurs d'amendements intégrés au rapport pourraient y être mentionnés pour qu'ils puissent en rendre compte à leurs électeurs. Le président de chaque commission aura la charge de statuer sur les irrecevabilités financières de l'article 40 de la Constitution ;
- la quatrième étape sera, comme actuellement, celle de l'avis de la commission sur les amendements extérieurs au rapport.
Enfin, pour ce qui concerne les règles de vote en commission, le principe « un sénateur, une délégation » sera respecté. Le bureau de la commission sera chargé de vérifier les pouvoirs et leurs motifs en plus du contrôle du secrétariat général de la présidence.
Après ces quatre étapes aura lieu le débat en séance publique. La discussion générale sera organisée. Il n'y aura aucune procédure de discussion globale programmée contrairement à ce que prévoit l'Assemblée nationale.
Puis M. Jean-Pierre Cantegrit a présenté les procédures de contrôle et d'évaluation des politiques publiques.
Désormais une semaine de séance sur quatre sera réservée par priorité au contrôle de l'action du Gouvernement et à l'évaluation des politiques publiques. Il a été envisagé de créer un deuxième hémicycle dédié de préférence à ces travaux.
Le contrôle se fera d'abord selon les formes traditionnelles éprouvées. S'agissant des commissions d'enquête, des droits spécifiques seront reconnus aux groupes minoritaires et d'opposition : un droit de tirage annuel et la répartition des fonctions de président et de rapporteur entre la majorité et l'opposition. Ces groupes bénéficieront également d'un droit de tirage annuel pour les missions d'information. Il faut donc s'attendre à la création de davantage de formations de ces deux types.
De nouvelles formes de contrôle et d'évaluation sont prévues : le vote de résolutions, les déclarations du Gouvernement sur un sujet déterminé, les questions cribles qui auront lieu tous les quinze jours pendant trois quarts d'heure, et les débats d'initiative sénatoriale.
Les résolutions pourront être présentées par un ou plusieurs sénateurs. Seront irrecevables celles qui mettent en cause la responsabilité du Gouvernement ou contiennent des injonctions à son égard. On ignore, à ce stade, si les commissions pourront être saisies des propositions de résolution en raison d'une divergence entre les deux assemblées : l'Assemblée nationale exclut tout renvoi aux commissions et le Sénat préférerait le prévoir à titre facultatif, sur demande de la commission compétente.
Enfin, les débats d'initiative sénatoriale pourront avoir lieu sur décision de la conférence des présidents, à la demande d'un groupe politique, d'une commission, de la commission des affaires européennes, d'une délégation ou d'un office parlementaire. Le débat sera ouvert par le représentant du groupe ou de l'instance auteur de la demande.
Avant de conclure, M. Jean-Pierre Cantegrit a évoqué la question des affaires européennes sur laquelle l'accord du groupe de travail reste à préciser. Sous cette réserve, celui-ci a délibéré de la meilleure manière de coordonner les travaux de la commission des affaires européennes et des commissions permanentes. La commission des affaires européennes aura pour rôle de centraliser les documents et de les diffuser aux sénateurs, aux groupes et aux commissions. Elle sera également chargée d'une mission générale d'information et d'instruction. Chaque commission pourra toujours désigner un représentant pour participer à l'examen d'un texte européen par la commission des affaires européennes.
Pour ce qui concerne l'adoption des rapports et résolutions européens, chaque commission permanente pourra se saisir en amont d'un texte européen dans les quinze jours suivant sa publication. Tout sénateur pourra déposer des amendements et le texte adopté par la commission sera réputé adopté par le Sénat sauf si le président du Sénat, un président de groupe, un président de commission ou le Gouvernement demande sa discussion en séance publique. La conférence des présidents pourra soit inscrire le texte à l'ordre du jour du Sénat, soit y faire obstacle dans les sept jours, auquel cas la résolution sera réputée adoptée.
Tout sénateur pourra également déposer une proposition de résolution. Dans ce cas de figure, soit la commission permanente compétente décidera de s'en saisir dans le délai de quinze jours et l'on appliquera la procédure, ou bien elle s'abstiendra de le faire et le dossier sera instruit par la commission des affaires européennes puis transmis à la commission permanente.
a considéré que chaque sénateur ne devrait pas hésiter à se saisir de cette faculté pour relayer les difficultés rencontrées par les citoyens européens, par exemple en matière de sécurité sociale ou d'aide sociale. En sa qualité de sénateur représentant les Français établis hors de France, il suivra cette question très attentivement.
Il a conclu en saluant l'inventivité du constituant dans son désir de rééquilibrage des pouvoirs publics. Il faut souhaiter que les nombreuses procédures nouvelles pourront contribuer à accroître l'attractivité des travaux du Sénat, en accordant des délais plus longs au travail législatif et du temps supplémentaire au contrôle et à l'évaluation.