Intervention de Hervé Morin

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 19 décembre 2007 : 1ère réunion
Défense — Opérations extérieures - Audition de M. Hervé Morin ministre de la défense

Hervé Morin, ministre de la défense :

a rappelé que la présence militaire française en Afghanistan s'inscrivait à la fois dans le cadre de la Force internationale d'assistance à la sécurité (FIAS) mise en place par une résolution du Conseil de sécurité des Nations-unies de 2001, et de l'opération Enduring freedom conduite en coalition avec les Etats-Unis au titre de la lutte contre le terrorisme.

La FIAS est actuellement la plus importante opération de l'OTAN, qui en assure le commandement depuis 2003. Elle compte 43 000 hommes provenant de 39 nations contributrices. Elle a mis en place 25 équipes de reconstruction (Provincial reconstruction team - PRT), auxquelles la France n'a pas souhaité se joindre. La participation française à la FIAS s'élève à environ 1 500 hommes. Ils stationnent, pour l'essentiel, dans la zone de Kaboul, où ils participent à des missions de contrôle, mais aussi de déminage et de dépollution. La France déploie également des équipes d'instructeurs chargés d'assister et de former des unités de l'armée nationale afghane dans lesquelles elles sont insérées. Ces OMLT (Operational Mentoring Liaison Team) comptent 50 à 70 militaires. Suite à une décision prise l'été dernier en Conseil de défense, leur nombre a été porté d'une à quatre. En outre, une OMLT supplémentaire sera déployée dans le sud de l'Afghanistan, afin de renforcer les troupes néerlandaises stationnées dans la province de l'Uruzgan.

La France déploie également environ 400 hommes au titre de l'opération Enduring freedom, pour trois types de missions : une présence navale en mer d'Arabie, avec un à deux bâtiments ; la formation des officiers de l'armée nationale afghane ; la formation des forces spéciales afghanes.

A cela s'ajoutent les forces affectées au dispositif aérien (370 hommes). Pour des raisons opérationnelles de plus grande proximité avec le théâtre d'opérations, les avions de combat sont désormais stationnés à Kandahar. La France continue cependant à utiliser ses installations de Douchanbe, au Tadjikistan, qui pourraient de nouveau être utilisées en cas de besoin par les avions de chasse.

a souligné les progrès enregistrés pour la formation de l'armée nationale afghane, qui compte désormais près de 36 000 hommes aptes à des missions opérationnelles, mais estimé qu'il restait encore beaucoup à faire pour qu'elle puisse assurer la sécurité de l'ensemble du pays. Il a indiqué qu'après une phase d'amélioration, de 2003 à 2006, la situation sécuritaire s'était dégradée, y compris à Kaboul. Il a jugé indispensable que les alliés, notamment européens, maintiennent leur investissement en troupes, considérant que tout signe d'un moindre engagement de tel ou tel pays aurait des répercussions négatives sur l'ensemble de la FIAS et sur son efficacité.

Il a également insisté sur la nécessité de renforcer les institutions judiciaires et la police, secteurs dans lesquels la reconstruction de l'Etat a donné de moins bons résultats que dans l'armée.

Enfin, le ministre de la défense a considéré que la communauté internationale avait sans doute sous-estimé la difficulté de mettre en place des institutions et un modèle de développement imparfaitement adaptés à la société afghane. Il a également souligné la nécessité de trouver les réponses efficaces pour réduire la dépendance du pays à l'égard de la production de stupéfiants.

Evoquant le Kosovo, M. Hervé Morin a indiqué qu'aucun signe ne laissait actuellement supposer une dégradation de la situation sécuritaire. Il a rappelé que le Conseil de sécurité des Nations unies allait statuer sur la mise en place d'une mission civile de l'Union européenne qui prendrait le relais de la MINUK début 2008, et il a précisé qu'un général français assurerait, en principe, le commandement de cette opération européenne. Il a souligné que l'unité européenne avait été préservée lors du Conseil européen de Lisbonne. Il a ajouté que l'engagement des Européens en faveur de la paix et de la stabilité du Kosovo au cours des dernières années donnait à ceux-ci une légitimité particulière pour appeler les dirigeants kosovars à une certaine retenue, de manière à éviter une crispation des positions dans les prochaines semaines.

En ce qui concerne la Côte d'Ivoire, M. Hervé Morin a rappelé que la force Licorne, dont l'effectif a été ramené à 2 400 militaires français, constituait la force de réaction rapide destinée à appuyer les forces de l'ONUCI, composées de 9 000 militaires africains. Les troupes françaises effectuent des missions de présence, de renseignement, mais également de reconstruction. Leur volume pourrait de nouveau être réduit au cours des prochains mois. La situation en Côte d'Ivoire évolue positivement, même si la fusion entre les forces armées ivoiriennes et les forces rebelles n'est toujours pas réalisée. Il importe désormais d'organiser rapidement les élections, comme le souhaitent l'ensemble des forces politiques. Cela suppose toutefois que le processus d'établissement des listes électorales soit préalablement mené à bien.

a ensuite indiqué que le déploiement de la force européenne au Tchad était espéré pour le mois de janvier, des contributions supplémentaires ayant été annoncées par certains pays, notamment en ce qui concerne le soutien médical. Il a estimé que les difficultés rencontrées pour la constitution de la force illustraient néanmoins l'insuffisance globale des moyens que l'Europe consacre à sa défense, plusieurs pays se trouvant dans l'incapacité de dégager des moyens pour cette opération compte tenu de leurs engagements sur d'autres théâtres. Le ministre a souligné qu'en moyenne 10 à 12 000 hommes étaient engagés en opérations extérieures, qui, ajoutés aux forces prépositionnées en Afrique et aux forces de souveraineté outre-mer, portaient à 33 000 le nombre des personnels déployés hors du territoire métropolitain.

Il a précisé que la France aurait pu compléter le dispositif de l'opération au Tchad, mais que cela aurait eu pour effet de porter à 75 % la part des militaires français, dans l'effectif de la force européenne. Il a estimé que si les autres Etats européens ne fournissaient pas l'effort nécessaire, l'opération n'aurait pas lieu.

Il a indiqué que l'état-major des armées disposait encore de 3 à 4 000 hommes supplémentaires pour des opérations extérieures. La difficulté était cependant d'ordre budgétaire et capacitaire, notamment en matière d'aéromobilité.

Il a ajouté qu'à ce rythme, le surcoût des opérations extérieures pourrait approcher le milliard d'euros en 2008.

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