a tout d'abord exprimé sa profonde tristesse et sa grande émotion à la suite du décès du Président Serge Vinçon, survenu le 16 décembre 2007. Il a salué son action en tant que membre, puis en tant que président de la commission, et a souligné ses grandes qualités humaines appréciées par l'ensemble des membres de la commission.
Puis, à son invitation, les membres de la commission ont observé une minute de silence.
La commission a ensuite entendu une communication de M. Patrice Gélard, Président du groupe interparlementaire d'amitié France-Russie du Sénat, sur la situation de la Russie, après les élections législatives du 2 décembre 2007 et à la veille de l'élection présidentielle de mars 2008.
Evoquant d'abord la situation intérieure de la Russie, M. Patrice Gélard, a rappelé qu'après la disparition de l'URSS, en 1991, la Russie avait été confrontée, dans les années 1990, sous la présidence de Boris Eltsine, à une situation anarchique marquée par l'effondrement de l'économie et une déliquescence de l'Etat.
Depuis 2000, sous les deux mandats successifs de Vladimir Poutine, la Russie a connu un important redressement. En matière économique, la Russie a enregistré ces dernières années des performances remarquables, avec un taux annuel de croissance de l'ordre de 7 % en moyenne, notamment grâce à la forte hausse du prix des hydrocarbures (pétrole et gaz), dont elle est un des premiers producteurs au niveau mondial. Le budget est en excédent et la Russie a remboursé la quasi-totalité de sa dette auprès de ses créanciers étrangers. Le niveau de vie des Russes s'est notablement amélioré et l'espérance de vie moyenne, qui était tombée en dessous de la barre des 60 ans, s'est redressée, de même que le taux de natalité. La Russie est proche du plein emploi et le gouvernement fait même appel à de la main d'oeuvre étrangère, en provenance des pays issus de l'ex-URSS ou de Chine.
Les deux mandats successifs de Vladimir Poutine à la présidence de la fédération de Russie ont aussi été marqués par un net renforcement du rôle de l'Etat, a souligné M. Patrice Gélard.
S'il existe encore quelques médias indépendants, comme le journal « Novaia Gazeta » ou la station de radio « Echo de Moscou », on a assisté à une prise de contrôle par le Kremlin des principaux médias, notamment les grandes chaînes de télévision, ce qui n'est pas sans rappeler l'époque soviétique, a indiqué M. Patrice Gélard.
Les oligarques, qui avaient pris le contrôle des principales entreprises sous la présidence de Boris Eltsine, ont également été mis au pas, a indiqué M. Patrice Gélard, certains ayant été emprisonnés ou contraints de s'exiler, l'Etat dirigeant ainsi les centres stratégiques économiques, notamment dans le domaine énergétique.
Vladimir Poutine a également restauré la « verticale du pouvoir » en réformant le fédéralisme russe. Les gouverneurs des républiques qui composent la fédération ne sont plus élus directement par la Douma locale, mais proposés par le Président de la Fédération et confirmés ensuite par la Douma locale, qui, si elle n'approuve pas le candidat proposé par le Kremlin, peut être dissoute. Cette réforme s'est donc traduite par un net renforcement du pouvoir central sur les entités fédérées, a souligné M. Patrice Gélard, mettant ainsi un terme à des tentations séparatistes dans certaines républiques et au comportement de « potentat local » de certains gouverneurs, encouragés par le fait, qu'étant membres de droit du Conseil de la Fédération, la chambre haute du Parlement russe, ils bénéficiaient de l'immunité parlementaire, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui. Trois gouverneurs ont ainsi été condamnés pour corruption, dont celui de Vladivostok, a indiqué M. Patrice Gélard. La mise en place, au-dessus des gouverneurs, de sept super-préfets, désignés directement par le Président et chargés des questions de sécurité au sens large, dans le cadre de sept grandes zones, a également renforcé l'autorité du pouvoir central..
Si les organisations humanitaires font état de la persistance des enlèvements et des disparitions de civils, la situation en Tchétchénie tend à se stabiliser, les troupes russes ayant laissé la place aux forces tchétchènes pro-russes dirigées par Ramzan Kadyrov, qui se comporte comme un véritable dictateur.
La Tchétchénie a toujours été une épine pour la Russie, depuis son annexion au XIXe siècle, comme en témoignent les guerres du Caucase sous Catherine II ou les déportations massives pratiquées par Staline. La population de cette province a diminué de moitié, revenant d'un million à 500 000 habitants, en raison de la guerre et des bombardements, mais aussi du départ de nombreux habitants, d'origine tchétchène, mais aussi russe et ukrainienne, victimes d'exactions commises par l'armée russe ou les forces rebelles.
D'une manière générale, la situation dans le Caucase du Nord, au Daghestan, en Ossetie du Nord ou en Ingouchie, reste instable, avec une montée en puissance de l'islamisme.
C'est surtout sur le plan de la démocratie, des droits de l'homme et des libertés individuelles, que le bilan de Vladimir Poutine est contesté, a indiqué M. Patrice Gélard, en rappelant que l'on avait assisté, sous ses deux mandats successifs, à un accroissement du rôle de l'Etat.
Une loi sur les organisations non gouvernementales de 2006 s'est ainsi traduite par d'importantes restrictions pour les ONG étrangères présentes en Russie, comme en témoigne la fermeture récente du « British council » de Moscou.
La loi électorale a été profondément modifiée avant le scrutin du 2 décembre dernier, a rappelé M. Patrice Gélard. Alors qu'auparavant la moitié des députés de la Douma étaient élus au scrutin uninominal majoritaire dans le cadre de circonscriptions régionales et l'autre moitié au scrutin proportionnel au niveau national, il a été décidé d'instaurer la proportionnelle pour tous les députés, mais dans le cadre de circonscriptions régionales, un peu à l'image des élections régionales ou du mode d'élection des députés européens en France, a indiqué M. Patrice Gélard.
Les partis politiques enregistrés, qui sont les seuls à pouvoir concourir, présentent donc des listes différentes selon les régions, à l'exception des trois premières têtes de listes, qui sont les mêmes pour toute la Russie. Cette réforme s'est également traduite par la suppression de la possibilité pour les électeurs de voter contre tous les candidats ou le relèvement du seuil nécessaire pour les partis politiques pour être représentés à la Douma de 5 à 7 % des suffrages. Pour sa part, le Conseil de la Fédération est composé pour moitié de membres élus par les assemblées locales, et pour l'autre moitié, de représentants des gouverneurs désignés par le Kremlin.
Enfin, en partant du constat qu'il n'existait pas réellement de société civile en Russie, Vladimir Poutine a souhaité favoriser son organisation, en instituant notamment une chambre sociale, un peu sur le modèle du Conseil économique et social, qui comprend parmi ses membres des représentants des entreprises, des syndicats, des associations, mais aussi des représentants des religions présentes en Russie.
Les élections législatives du 2 décembre dernier ont été marquées par un taux de participation de 62 %, supérieur à celui des précédentes élections législatives de 2003, qui était de 55 %, a indiqué M. Patrice Gélard.
Le parti « Russie Unie », emmené par Vladimir Poutine, est arrivé largement en tête, avec 64 % des suffrages. Avec quelque 315 sièges sur 450, il obtient donc la majorité absolue à la Douma et même la majorité des 2/3 nécessaire pour modifier la Constitution.
Le parti communiste est arrivé en deuxième position, avec 11,5 % des suffrages. S'il continue sa lente érosion, puisqu'il avait recueilli 12,5 % des suffrages en 2003, il reste le principal parti d'opposition et il disposera de 57 députés à la Douma.
En troisième place, le parti libéral démocratique de Russie (LDPR) de Vladimir Jirinovski, qui, comme l'a rappelé M. Patrice Gélard, n'est ni libéral, ni démocratique, mais un parti nationaliste et xénophobe, obtient 8 % des suffrages, contre 11,5 % en 2003. Il disposera de 40 sièges.
Enfin, en quatrième position, le parti de centre-gauche pro-Kremlin « Russie juste », dirigé par le Président du Conseil de la Fédération, Serguei Mironov, créé par Vladimir Poutine lui-même pour concurrencer le parti communiste, franchit de justesse la barre des 7 % nécessaires pour être représenté à la Douma, où il aura 38 députés.
Les partis « libéraux » d'opposition, déjà quasiment inexistants à la Douma, à l'exception de quelques députés indépendants, subissent une déroute, avec 1,2 % pour Iabloko et 1,1 % pour l'Union des forces de droite (SPS).
Enfin, le parti d'opposition « Une autre Russie », dirigé par l'ancien champion du monde d'échecs Garry Kasparov, n'avait pas pris part à ces élections et avait appelé au boycott.
Si quatre partis politiques seront représentés à la Douma, en réalité, seul le parti communiste fait figure de parti d'opposition, a estimé M. Patrice Gélard, étant donné que les députés du parti « Russie juste » et ceux du parti de Vladimir Jirinovski soutiennent le président russe et votent généralement les mesures proposées par le gouvernement.
Ce scrutin s'est-il déroulé dans des conditions démocratiques ?
a rappelé que les autorités russes avaient décidé de limiter de manière drastique le nombre d'observateurs étrangers pour contrôler les 95 000 bureaux de vote, répartis sur un territoire immense de 17 millions de km². De ce fait, le bureau des institutions démocratiques et des droits de l'homme de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) avait renoncé à l'envoi d'observateurs pour superviser ces élections. En définitive, seul, un nombre limité d'observateurs étrangers de l'Assemblée parlementaire de l'OSCE et du Conseil de l'Europe ont participé au contrôle du déroulement de ces élections, a indiqué M. Patrice Gélard, qui a toutefois relevé la présence, certes en nombre insuffisant, mais avec une part active, de représentants russes d'organisations non gouvernementales ou de petits partis.
Après l'annonce des résultats, plusieurs gouvernements ont exprimé leurs préoccupations, a rappelé M. Patrice Gélard.
Par la voix de son porte-parole, le gouvernement allemand a émis les critiques les plus vives, en déclarant que « ces élections n'étaient pas des élections libres, équitables et démocratiques ».
Le gouvernement britannique a également exprimé son inquiétude « quant aux allégations d'irrégularités électorales, qui, si elles étaient avérées, suggéreraient que les élections russes n'étaient ni libres ni honnêtes ».
Pour sa part, le ministère français des affaires étrangères a pris note des résultats des élections législatives en Russie. Il a relevé les allégations d'irrégularité concernant ce scrutin, tout en déclarant ne pas être en mesure d'évaluer leur impact sur le résultat des élections. Il a donc émis le souhait que les autorités russes fassent toute la lumière sur ces allégations.
Des plaintes déposées par le parti communiste et l'opposition libérale ont également été déposées devant la commission centrale de contrôle des élections russe, mais elles ont toutes été rejetées jusqu'à présent.
Ce scrutin a, à l'évidence, été entaché d'irrégularités a estimé M. Patrice Gélard. Il suffit de mentionner le cas de la Tchétchénie, où la participation et le score de « Russie Unie » ont atteint plus de 99 %.
Toutefois, d'une manière générale, le taux élevé de la participation et la victoire du parti « Russie Unie » ne font que confirmer la très grande popularité de Vladimir Poutine, crédité de 80 % d'opinions favorables dans un récent sondage.
En réalité, ce scrutin a largement été transformé en plébiscite pour Vladimir Poutine, qui avait créé la surprise en annonçant qu'il prendrait la tête du parti « Russie Unie » en vue de ces élections, a souligné M. Patrice Gélard.
Le Président russe dispose maintenant de la légitimité nécessaire pour organiser sa succession dans l'optique de l'élection présidentielle du 2 mars prochain.
Ainsi, contrairement à une idée reçue, ce n'est pas l'élection présidentielle qui sera déterminante pour l'avenir du pays, mais ce seront bien les élections législatives, a estimé M. Patrice Gélard.
D'ailleurs, peu après le résultat de ces élections, le 10 décembre, il a été annoncé que Dmitri Medvedev serait le candidat officiel du parti « Russie Unie » pour l'élection présidentielle.
Celui-ci a tout de suite reçu le soutien de Vladimir Poutine.
Agé de 42 ans, Dmitri Medvedev est un proche de Vladimir Poutine, a indiqué M. Patrice Gélard. Comme lui, il est originaire de Saint-Pétersbourg, il est diplômé de la même faculté de droit, et ils ont travaillé tous les deux à la mairie de Saint-Pétersbourg, dans l'équipe d'Anatoli Sobtchak. Toutefois, à la différence de son mentor, Dmitri Medvedev n'est pas passé par le KGB.
Dmitri Medvedev a été nommé adjoint du chef de l'administration présidentielle, en décembre 1999, lorsque Vladimir Poutine est devenu président par intérim de la Russie, et il a dirigé sa campagne électorale en vue de l'élection présidentielle de mars 2000. Il a été nommé peu après au poste stratégique de Président du Conseil des directeurs (l'équivalent du conseil de surveillance) de Gazprom.
En novembre 2005, Dmitri Medvedev a été nommé premier vice-premier ministre chargé des grands projets nationaux, concernant la santé, l'éducation, le logement et l'agriculture.
L'annonce de la candidature de Dmitri Medvedev a été présentée par les médias comme la victoire du camp des « libéraux » sur le clan des « siloviki », composé d'anciens membres des services de sécurité et dont l'un des principaux représentants est l'autre vice-premier ministre et ministre de la défense, Serguei Ivanov.
Dmitri Medvedev se présente, en effet, comme un « vrai démocrate » au sein de l'équipe de Poutine, a rappelé M. Patrice Gélard.
Il est aussi considéré comme un « occidental », favorable à un rapprochement avec les Etats-Unis et l'Union européenne, par opposition aux « slavophiles », partisans d'une alliance avec la Chine au sein d'un ensemble « eurasiatique ».
Si Dmitri Medvedev a toutes les chances d'être élu à la présidence de la République, son avenir est étroitement lié à celui de Vladimir Poutine, a estimé M. Patrice Gélard.
A cet égard, on peut distinguer plusieurs scénarios.
Le premier scénario, selon lequel Vladimir Poutine resterait Président de la Russie, qui a été pendant longtemps privilégié par les observateurs, ne paraît plus aujourd'hui d'actualité, a souligné M. Patrice Gélard.
En effet, la Constitution russe interdit de briguer plus de deux mandats consécutifs à la présidence de la Fédération de Russie et Vladimir Poutine s'est toujours refusé à réviser la Constitution sur ce point, malgré les nombreux appels en ce sens de ses partisans.
En tout état de cause, il est désormais trop tard pour réviser la Constitution, compte tenu des délais nécessaires pour cette procédure, a rappelé M. Patrice Gélard.
Toutefois, étant donné que l'interdiction ne concerne que le seul fait d'exercer deux mandats consécutifs, on pourrait très bien concevoir, d'après M. Patrice Gélard, que le successeur de Vladimir Poutine à la tête de la Fédération démissionne peu après son élection, voire dès le lendemain de son intronisation, ce qui entraînerait l'organisation d'une nouvelle élection présidentielle, à laquelle Vladimir Poutine pourrait se représenter, étant donné qu'il y aurait eu dans l'intervalle, un autre président, et compte tenu de sa popularité, il ne fait pas de doute que Vladimir Poutine serait alors élu facilement.
Selon une deuxième hypothèse, Vladimir Poutine prendrait la tête de l'Union russo-biélorusse.
Au moment où était annoncée la candidature de Dmitri Medvedev à l'élection présidentielle, Vladimir Poutine effectuait, par une curieuse coïncidence, une visite d'Etat en Biélorussie, où il a évoqué, avec le Président Alexandre Loukachenko, l'avenir de l'Union entre la Russie et la Biélorussie.
Si certains évoquent l'idée que Vladimir Poutine prenne la tête de l'Union russo-biélorusse, après avoir quitté ses fonctions à la tête de la fédération de Russie, M. Patrice Gélard a fait part de son scepticisme sur une telle hypothèse, compte tenu des relations difficiles entre Vladimir Poutine et Alexandre Loukachenko et du peu de consistance de cette union russo-biélorusse, qui reste encore une « coquille vide ».
Le troisième scénario, selon lequel Vladimir Poutine serait le futur Premier ministre, qui paraissait difficile à imaginer il y a encore quelques semaines, semble se dessiner actuellement. En effet, peu après l'annonce de sa candidature à l'élection présidentielle, Dmitri Medvedev a annoncé, s'il était élu à la présidence, qu'il proposerait le poste de Premier ministre à Vladimir Poutine, et celui-ci s'est déclaré prêt à diriger le gouvernement.
Ce scénario paraît le plus logique dans un régime parlementaire, où le chef du parti majoritaire a vocation à diriger le gouvernement, même s'il paraît difficile à imaginer, étant donné que, d'après la Constitution russe et dans la pratique, le Premier ministre ne joue pas un très grand rôle et que le véritable chef de l'exécutif est clairement le Président.
Ce scénario constituerait en réalité une rupture par rapport à l'histoire de la Russie et par rapport au régime soviétique, où le poste de premier ministre a toujours eu un caractère technique et non une dimension politique, a rappelé M. Patrice Gélard, en citant l'exemple de l'actuel premier ministre Viktor Zoubkov.
Certes, une modification de la Constitution pour renforcer les pouvoirs du Premier ministre face au Président serait envisageable, pour aller davantage vers un régime parlementaire, mais Vladimir Poutine lui-même a exclu cette éventualité.
On peut toutefois relever qu'en cas de vacance du poste de président, c'est le premier ministre qui est chargé d'assurer l'intérim jusqu'à l'organisation d'une nouvelle élection, a indiqué M. Patrice Gélard. Quel que soit le poste qu'il occupera à l'avenir, Vladimir Poutine devrait continuer à jouer un rôle important en Russie. En effet, Vladimir Poutine incarne aujourd'hui aux yeux des Russes la figure d'un leader national, comme en témoigne sa forte popularité, qui a restauré l'autorité de l'Etat et renforcé le prestige de la Russie sur la scène internationale.
Dans ce contexte, il faut reconnaître que sa décision de ne pas modifier la Constitution pour briguer un troisième mandat, afin de rester dans l'histoire comme celui qui aura conduit la Russie de manière irréversible vers la démocratie et l'Etat de droit, alors qu'il disposait de toutes les cartes pour le faire, ne manque pas de panache, a estimé M. Patrice Gélard.
Vladimir Poutine reste cependant prisonnier de l'histoire de son pays qui, chaque fois qu'il a été confrontée à des crises, s'est toujours trouvé un « sauveur », tels Ivan le terrible ou Staline.
Aujourd'hui, Vladimir Poutine, incarne, volontairement ou malgré lui, une telle figure aux yeux des Russes, ce qui rend son départ problématique.
C'est la raison pour laquelle Vladimir Poutine, même s'il quitte ses fonctions à la présidence de la fédération de Russie, continuera de jouer un rôle très important dans la vie politique de son pays, a estimé M. Patrice Gélard.
Evoquant ensuite la politique étrangère russe, M. Patrice Gélard a rappelé que ces dernières années avaient été marquées par un retour de la Russie sur la scène internationale.
L'étranger proche » reste la priorité de la politique étrangère russe. Les institutions de la Communauté des Etats indépendants (CEI), qui regroupe l'ensemble des Etats issus de l'ex-URSS, à l'exception des trois pays baltes, ne fonctionnant pas très bien, à l'exception de l'assemblée interparlementaire, la Russie a privilégié les relations bilatérales avec les anciennes républiques soviétiques. Pour ce faire, elle a souvent joué au « pompier-incendiaire », en provoquant des crises pour ensuite apporter son aide pour les résoudre. La Russie a ainsi encouragé les aspirations séparatistes dans certaines régions, comme la Transnistrie en Moldavie, ou l'Abkhazie et l'Ossétie du Sud en Géorgie. Avec les Etats du Caucase du Sud, ce sont avant tout les enjeux des futures voies d'évacuation énergétiques et le conflit du Haut Karabakh, qui lui permet de se poser en arbitre entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan, qui dominent la vision de Moscou, mais aussi le souci de préserver son influence face aux autres puissances régionales que sont l'Iran et la Turquie.
En Asie centrale, le double souci russe de garantir l'approvisionnement énergétique et de lutter contre le risque terroriste, conduit la Russie à soutenir les équipes en place, alors que ces régimes évoluent de plus en plus vers des régimes autoritaires au Kazakhstan, au Kirghizistan, en Ouzbekistan, au Turkmenistan ou au Tadjikistan.
Face aux « révolutions de couleur », en Ukraine ou en Géorgie, la Russie utilise plusieurs moyens de pression, comme l'arme énergétique ou l'embargo économique, en s'appuyant aussi sur les tensions séparatistes en Géorgie, mais encore en Ukraine, où vit une importante minorité russe en Crimée et dans la partie orientale.
La Russie reste donc fortement présente dans l'espace de l'ex-URSS, à l'exception des trois pays baltes, notamment grâce au gaz et au pétrole, mais aussi avec une présence militaire et une influence culturelle, qui reste forte.
La Russie a aussi noué des relations étroites avec la Chine, en particulier dans le cadre de l'Organisation de coopération de Shanghai, qui a notamment pour vocation de lutter contre le terrorisme d'inspiration islamiste et les affirmations séparatistes.
Elle a également établi une coopération avec l'Iran, notamment dans le domaine du nucléaire civil, et elle cherche à s'affirmer comme acteur au Proche-Orient et dans le monde musulman, en renouant avec ses anciens alliés, comme la Syrie, ou en tissant des coopérations avec les autres pays producteurs énergétiques, comme l'Algérie ou la Libye.
Si les relations avec les Etats-Unis se sont considérablement dégradées, notamment en raison de la question de l'élargissement de l'OTAN à la Géorgie, voire à l'Ukraine, de son opposition à l'indépendance du Kosovo ou encore à cause du projet d'installation d'élements du système américain de défense anti-missiles en Pologne et en République tchèque, le partenariat avec l'Union européenne, qui représente son premier partenaire commercial, conserve toute son importance aux yeux de la Russie.
La Russie et l'Union européenne sont liées par un accord de partenariat et de coopération, mais les différends se sont multipliés ces dernières années, comme l'illustrent les difficultés rencontrées au sujet de l'enclave russe de Kalinigrad ou vis-à-vis des minorités russophones dans les pays baltes.
Toutefois, l'Union européenne n'arrivant pas à parler d'une seule voix, en raison des divergences entre les Etats membres sur l'attitude à adopter vis-à-vis de la Russie, en particulier depuis l'élargissement aux pays d'Europe centrale et orientale, mais aussi à cause de leur plus ou moins grande dépendance énergétique à l'égard de la Russie, celle-ci tendant à privilégier les relations bilatérales avec les grands pays, comme l'Allemagne, le Royaume-Uni, la France ou l'Italie. En définitive, l'Union européenne fait souvent preuve d'une grande timidité à l'égard de la Russie, à la différence du Conseil de l'Europe, où la Russie est souvent critiquée, notamment devant la Cour européenne des droits de l'homme, où elle figure au premier rang des Etats en matière de plaintes pour violation des droits de l'homme.
En conclusion, M. Patrice Gélard a estimé que, si la Russie actuelle ne pouvait être qualifiée de véritable démocratie, à l'image des démocraties occidentales, ce pays n'avait jamais été aussi proche d'un régime démocratique dans toute son histoire.
La Russie a clairement fait le choix de la démocratie, de l'économie de marché et de l'Etat de droit et le choix d'un libéral, Dmitri Medvedev, pour succéder à Vladimir Poutine, plutôt qu'un représentant des forces de sécurité, comme Sergei Ivanov, semble confirmer le fait qu'elle ne reviendra pas en arrière, a-t-il souligné.
Toutefois, l'instauration de la démocratie et de l'Etat de droit est un processus qui prend du temps, surtout dans un pays dépourvu de toute tradition démocratique, qui est passé d'un régime autocratique à une dictature communiste et doté d'un immense territoire, a estimé M. Patrice Gélard.
En déplorant l'image très négative de la Russie véhiculée par les médias en Occident, M. Patrice Gélard a souligné que cette perception négative contrastait avec la forte popularité que Vladimir Poutine recueillait auprès de la population russe.
Il existe, en réalité, un profond malentendu entre la Russie et l'Occident, a-t-il souligné, qui explique que le discours sur les droits de l'homme est largement inaudible dans la Russie d'aujourd'hui. En témoigne un sondage récent réalisé en Russie, d'après lequel, à la question de savoir quel type de régime conviendrait le mieux à la Russie, 35 % des personnes interrogées répondent le système soviétique, 26 % le régime actuel et 16 % la démocratie de type occidental.
Cette perception négative de la démocratie et des valeurs occidentales s'explique par le fait que les années 1990, qui ont été marquées par l'instauration de la démocratie et du libéralisme économique, ont coïncidé avec l'effondrement de l'économie et des valeurs de l'ancien système, a estimé M. Patrice Gélard. De ce fait, on constate aujourd'hui une certaine confusion, dans l'opinion russe, à l'égard des notions de « démocratie » et de « droits de l'homme ». C'est à la lumière de cette différence de perception qu'il faut appréhender la situation politique actuelle de la Russie, qui peut s'apparenter à une sorte de « despotisme éclairé ».
Comment exiger d'un pays comme la Russie de réaliser en quelques années ce que les démocraties occidentales ont mis plusieurs siècles à accomplir, s'est-il interrogé. Et comment expliquer la différence de traitement avec d'autres pays comme la Chine, dont le régime est pourtant bien plus autoritaire que celui de la Russie, s'est demandé M. Patrice Gélard.
A l'issue de cette communication, un débat s'est engagé au sein de la commission.
En réponse à une question de M. André Dulait sur les difficultés rencontrées dans les relations entre l'Union européenne et la Russie au sujet de Kalinigrad, M. Patrice Gélard, président du groupe interparlementaire d'amitié France-Russie du Sénat, a indiqué que la question du transit des personnes et des marchandises entre l'enclave russe de Kaliningrad et le reste du territoire de la fédération de Russie avait trouvé une solution satisfaisante, malgré l'adhésion des pays entourant cette enclave à l'Union européenne, grâce à un régime de transit facilité. La seule difficulté reste le transport des militaires et de leur armement, qui s'effectue par voie maritime ou aérienne.
Rappelant qu'il avait présenté un rapport d'information sur les relations entre l'Union européenne et la Russie, dans le cadre de la délégation pour l'Union européenne, M. Yves Pozzo di Borgo, a indiqué que, si elle était parvenue à redresser son économie et à renforcer sa position sur la scène internationale, notamment grâce à l'arme énergétique, la Russie restait un « colosse aux pieds d'argile », notamment en raison de ses difficultés démographiques, et que le renforcement du partenariat avec l'Union européenne, qui constitue son principal débouché, restait indispensable, notamment face à l'émergence de la Chine à ses frontières. Il s'est à cet égard félicité de l'amélioration récente des relations entre Varsovie et Moscou, souhaitée par le nouveau gouvernement polonais, qui devrait permettre de lever le veto polonais au lancement des négociations sur le nouvel accord de partenariat et de coopération entre l'Union européenne et la Russie, et d'approfondir ainsi les relations en matière énergétique, mais aussi en matière économique, scientifique, d'éducation et de culture. En indiquant qu'il partageait cette analyse, M. Patrice Gélard a souligné les progrès qu'il reste à accomplir du côté de l'Union européenne en matière de délivrance des visas aux citoyens russes et a souligné l'importance des relations économiques entre la France et la Russie, avec la présence de nombreuses entreprises françaises, comme Total, Auchan ou Renault, et la coopération en matière énergétique ou industrielle, avec notamment EADS ou le lancement de fusées Soyouz à partir de la base de Kourou.
s'est interrogé sur l'ampleur de la corruption en Russie, sur l'état de l'environnement et sur l'attitude de l'OTAN à l'égard de la Russie, en estimant que la Russie n'avait sans doute pas entièrement tort en ressentant comme agressive l'attitude de cette organisation à son égard.
En réponse, M. Patrice Gélard a indiqué que, malgré certains progrès, notamment dans le domaine judiciaire où les salaires des juges ont été fortement augmentés, la corruption restait un phénomène assez répandu en Russie, plus au niveau local qu'au niveau central. En matière de protection de l'environnement, tout reste à faire, a-t-il indiqué, en citant l'exemple de la circulation automobile à Moscou ou du chauffage urbain. Enfin, il a déclaré partager l'analyse de M. André Rouvière sur l'OTAN.
Tout en remerciant M. Patrice Gélard pour sa communication, M. Josselin de Rohan a indiqué qu'il ne partageait pas son optimisme sur l'évolution de la situation de la Russie. Il a considéré que les élections législatives du 2 décembre ne s'étaient pas déroulées dans des conditions démocratiques satisfaisantes, en raison de l'opposition russe à l'envoi d'un nombre suffisant d'observateurs internationaux et des moyens mis en oeuvre par le pouvoir pour empêcher l'opposition de s'exprimer. Il s'est interrogé sur les raisons d'un tel comportement de la part des autorités russes, qui nuit à la crédibilité de la Russie, étant donné la forte popularité dont jouit l'actuel président. Il a également exprimé son inquiétude sur les positions adoptées par la Russie sur la scène internationale, et sa crispation à l'égard des Etats-Unis, de l'Otan et de l'Union européenne, notamment sur le dossier du Kosovo et sur le sentiment assez répandu dans la société russe d'un prétendu « complot de l'Occident ».
En réponse, M. Patrice Gélard a admis que les dernières élections législatives ne s'étaient pas déroulées dans des conditions satisfaisantes, mais il a rappelé que la Russie revenait de loin, après près d'un siècle de dictature communiste, et qu'elle n'avait jamais été aussi proche de la démocratie qu'actuellement, même s'il reste d'importants progrès à accomplir. Sur la crispation de la Russie vis-à-vis de l'Occident, M. Patrice Gélard, a mis cette attitude sur le compte d'un sentiment d'amour propre blessé et de la volonté de retrouver un statut de grande puissance. Concernant le Kosovo, il a estimé qu'il s'agissait plus d'un instrument de chantage pour la Russie, notamment au regard de la Géorgie, que d'une opposition de principe à l'indépendance de cette province. Les Russes considérent que la Serbie s'était montrée peu reconnaissante, notamment dans le domaine énergétique, au soutien qu'ils lui avaient apporté au moment des frappes de l'Otan.
Revenant sur la situation intérieure de la Russie et l'avenir de Vladimir Poutine, M. Robert del Picchia, président, s'est demandé si, en sa qualité de dirigeant du principal parti politique, celui-ci ne pourrait pas jouer à l'avenir un rôle comparable à celui du secrétaire général du parti communiste à l'époque soviétique, les institutions de l'Etat étant concurrencées par les instances du parti « Russie Unie ».
a estimé que ce scénario était peu probable compte tenu de la mauvaise organisation des partis politiques russes, à l'exception du parti communiste.
s'étant interrogé sur la manière dont certains oligarques avaient réussi à faire main basse sur les principales richesses du pays sous la présidence de Boris Eltsine, M. Patrice Gélard a rappelé que cela avait été facilité par le mode de privatisation des grandes entreprises, qui s'était fait par un système de coupons, ou « vouchers », distribués très largement, qui avaient été ensuite rachetés pour une somme généralement modique par certaines personnalités, souvent issues de l'ancienne nomenklatura.
Présidence de M. Jean François-Poncet, vice-président. -
a salué la mémoire du président Serge Vinçon, dont il a souligné les grandes qualités humaines et rappelé l'action au sein de la commission. A son invitation, il a été procédé à une minute de silence.
s'est associé à l'hommage rendu au président Serge Vinçon. Il a notamment évoqué sa contribution de longue date aux questions de défense et notamment, en dernier lieu, le diagnostic pertinent qu'il avait porté sur notre politique d'équipement militaire dans un rapport d'information publié au mois de juillet.
a ensuite indiqué que la commission souhaitait entendre le ministre sur l'évolution de notre participation aux différentes opérations extérieures et il a particulièrement mentionné les perspectives de notre dispositif en Afghanistan. Evoquant la cadre international dans lequel s'effectuent ces opérations, il s'est interrogé sur le rôle respectif que nous souhaitons voir jouer à l'OTAN et à la politique européenne de sécurité et de défense. Enfin, il a souligné que la question des opérations extérieures était indissociable de celle plus générale, de l'adéquation entre les ambitions et les moyens de la France, qui est actuellement au coeur des réflexions sur la redéfinition de notre politique de défense.
a rappelé que la présence militaire française en Afghanistan s'inscrivait à la fois dans le cadre de la Force internationale d'assistance à la sécurité (FIAS) mise en place par une résolution du Conseil de sécurité des Nations-unies de 2001, et de l'opération Enduring freedom conduite en coalition avec les Etats-Unis au titre de la lutte contre le terrorisme.
La FIAS est actuellement la plus importante opération de l'OTAN, qui en assure le commandement depuis 2003. Elle compte 43 000 hommes provenant de 39 nations contributrices. Elle a mis en place 25 équipes de reconstruction (Provincial reconstruction team - PRT), auxquelles la France n'a pas souhaité se joindre. La participation française à la FIAS s'élève à environ 1 500 hommes. Ils stationnent, pour l'essentiel, dans la zone de Kaboul, où ils participent à des missions de contrôle, mais aussi de déminage et de dépollution. La France déploie également des équipes d'instructeurs chargés d'assister et de former des unités de l'armée nationale afghane dans lesquelles elles sont insérées. Ces OMLT (Operational Mentoring Liaison Team) comptent 50 à 70 militaires. Suite à une décision prise l'été dernier en Conseil de défense, leur nombre a été porté d'une à quatre. En outre, une OMLT supplémentaire sera déployée dans le sud de l'Afghanistan, afin de renforcer les troupes néerlandaises stationnées dans la province de l'Uruzgan.
La France déploie également environ 400 hommes au titre de l'opération Enduring freedom, pour trois types de missions : une présence navale en mer d'Arabie, avec un à deux bâtiments ; la formation des officiers de l'armée nationale afghane ; la formation des forces spéciales afghanes.
A cela s'ajoutent les forces affectées au dispositif aérien (370 hommes). Pour des raisons opérationnelles de plus grande proximité avec le théâtre d'opérations, les avions de combat sont désormais stationnés à Kandahar. La France continue cependant à utiliser ses installations de Douchanbe, au Tadjikistan, qui pourraient de nouveau être utilisées en cas de besoin par les avions de chasse.
a souligné les progrès enregistrés pour la formation de l'armée nationale afghane, qui compte désormais près de 36 000 hommes aptes à des missions opérationnelles, mais estimé qu'il restait encore beaucoup à faire pour qu'elle puisse assurer la sécurité de l'ensemble du pays. Il a indiqué qu'après une phase d'amélioration, de 2003 à 2006, la situation sécuritaire s'était dégradée, y compris à Kaboul. Il a jugé indispensable que les alliés, notamment européens, maintiennent leur investissement en troupes, considérant que tout signe d'un moindre engagement de tel ou tel pays aurait des répercussions négatives sur l'ensemble de la FIAS et sur son efficacité.
Il a également insisté sur la nécessité de renforcer les institutions judiciaires et la police, secteurs dans lesquels la reconstruction de l'Etat a donné de moins bons résultats que dans l'armée.
Enfin, le ministre de la défense a considéré que la communauté internationale avait sans doute sous-estimé la difficulté de mettre en place des institutions et un modèle de développement imparfaitement adaptés à la société afghane. Il a également souligné la nécessité de trouver les réponses efficaces pour réduire la dépendance du pays à l'égard de la production de stupéfiants.
Evoquant le Kosovo, M. Hervé Morin a indiqué qu'aucun signe ne laissait actuellement supposer une dégradation de la situation sécuritaire. Il a rappelé que le Conseil de sécurité des Nations unies allait statuer sur la mise en place d'une mission civile de l'Union européenne qui prendrait le relais de la MINUK début 2008, et il a précisé qu'un général français assurerait, en principe, le commandement de cette opération européenne. Il a souligné que l'unité européenne avait été préservée lors du Conseil européen de Lisbonne. Il a ajouté que l'engagement des Européens en faveur de la paix et de la stabilité du Kosovo au cours des dernières années donnait à ceux-ci une légitimité particulière pour appeler les dirigeants kosovars à une certaine retenue, de manière à éviter une crispation des positions dans les prochaines semaines.
En ce qui concerne la Côte d'Ivoire, M. Hervé Morin a rappelé que la force Licorne, dont l'effectif a été ramené à 2 400 militaires français, constituait la force de réaction rapide destinée à appuyer les forces de l'ONUCI, composées de 9 000 militaires africains. Les troupes françaises effectuent des missions de présence, de renseignement, mais également de reconstruction. Leur volume pourrait de nouveau être réduit au cours des prochains mois. La situation en Côte d'Ivoire évolue positivement, même si la fusion entre les forces armées ivoiriennes et les forces rebelles n'est toujours pas réalisée. Il importe désormais d'organiser rapidement les élections, comme le souhaitent l'ensemble des forces politiques. Cela suppose toutefois que le processus d'établissement des listes électorales soit préalablement mené à bien.
a ensuite indiqué que le déploiement de la force européenne au Tchad était espéré pour le mois de janvier, des contributions supplémentaires ayant été annoncées par certains pays, notamment en ce qui concerne le soutien médical. Il a estimé que les difficultés rencontrées pour la constitution de la force illustraient néanmoins l'insuffisance globale des moyens que l'Europe consacre à sa défense, plusieurs pays se trouvant dans l'incapacité de dégager des moyens pour cette opération compte tenu de leurs engagements sur d'autres théâtres. Le ministre a souligné qu'en moyenne 10 à 12 000 hommes étaient engagés en opérations extérieures, qui, ajoutés aux forces prépositionnées en Afrique et aux forces de souveraineté outre-mer, portaient à 33 000 le nombre des personnels déployés hors du territoire métropolitain.
Il a précisé que la France aurait pu compléter le dispositif de l'opération au Tchad, mais que cela aurait eu pour effet de porter à 75 % la part des militaires français, dans l'effectif de la force européenne. Il a estimé que si les autres Etats européens ne fournissaient pas l'effort nécessaire, l'opération n'aurait pas lieu.
Il a indiqué que l'état-major des armées disposait encore de 3 à 4 000 hommes supplémentaires pour des opérations extérieures. La difficulté était cependant d'ordre budgétaire et capacitaire, notamment en matière d'aéromobilité.
Il a ajouté qu'à ce rythme, le surcoût des opérations extérieures pourrait approcher le milliard d'euros en 2008.
a observé que l'OTAN accomplissait tout le spectre des opérations en Afghanistan, y compris celui des opérations militaires , alors qu'un partage des tâches aurait pu être envisagé avec l'Union européenne.
a considéré que l'OTAN n'éviterait pas un débat sur ses missions, sur la rénovation de ses structures, mais aussi sur le rôle de la politique européenne de sécurité et de défense. Ce débat, difficile, devrait s'engager à partir d'avril 2008, au sommet de Bucarest. Il a réaffirmé sa conviction que des avancées sur la politique européenne de sécurité et de défense ne pourraient être opérées que si elles n'apparaissaient pas en contradiction avec l'OTAN. Il a rappelé la demande française de la constitution d'un centre de commandement et de planification pour les opérations de l'Union européenne, considérant qu'il faudrait aboutir à un partage des tâches entre les opérations de grande ampleur, dévolues à l'OTAN, et les autres opérations, civilo-militaires, ou de moindre intensité qui pourraient être assurées par l'Union européenne, également concernée au premier chef par les opérations sur le continent européen ou en Afrique. Il a rappelé que l'évolution de l'Europe de la défense était aussi liée aux positions prises par les Etats-Unis.
s'est associé, au nom du groupe socialiste, à l'hommage rendu au président Vinçon.
Il s'est interrogé sur les nouvelles conditions de l'engagement français en Afghanistan, en soulignant qu'elles semblaient avoir été fortement orientées par les Etats-Unis et que des doutes semblaient par ailleurs se faire jour sur l'efficacité de cette opération. Rappelant que le Président de la République avait fait part de ses interrogations sur la présence française en Afghanistan, laissant présager un retrait des troupes françaises, il a demandé des précisions sur le changement opéré dans la posture militaire française. Il a souhaité savoir dans quelle mesure la France participait à la définition de la stratégie de l'OTAN en Afghanistan et quel sens revêtait l'augmentation des contingents dans ce pays, alors que la clef du conflit semblait se trouver au Pakistan.
s'est interrogé sur le coût des opérations extérieures sur les principaux théâtres. Il a estimé que les coûts des opérations menées, tant dans le cadre de l'OTAN que dans celui de l'Union européenne, devaient être répartis de façon plus équitable. Il s'est enfin interrogé sur la qualité de l'armée afghane.
a apporté les éléments de réponse suivants :
- le coût des opérations extérieures a représenté 553 millions d'euros en 2005, 603 millions d'euros en 2006, 684 millions d'euros en 2007, et pourrait atteindre 800 à 900 millions d'euros en 2008 ;
- des mécanismes plus équitables sont effectivement souhaitables pour le financement des opérations de l'OTAN et de l'Union européenne. Pour l'opération au Tchad et en République centrafricaine, la France souhaite obtenir une définition plus large des coûts communs qui ne s'applique, dans le cadre du mécanisme « Athena », qu'aux frais de mission, aux quartiers généraux et aux travaux d'infrastructure de soutien. La promotion d'une démarche véritablement européenne suppose des financements communs.
L'armée nationale afghane compte actuellement 36.000 hommes. Le taux de désertion s'établit à environ 20 %. L'objectif est cependant de transférer progressivement aux Afghans les instruments de la maîtrise de leur souveraineté. Au cours de l'année 2008, l'armée nationale afghane pourrait assumer la responsabilité de la sécurité dans un district. 4 000 officiers ont été formés pour prendre en main l'encadrement.
Le Président de la République a effectivement indiqué, au cours de sa campagne, que la France n'avait pas vocation à rester en Afghanistan pour une longue période. Cette idée reste valable, c'est pourquoi la France consent à un effort particulier sur la formation des troupes afghanes. Les échecs de différentes forces d'occupation se répètent dans l'histoire de l'Afghanistan. Aussi bien, convient-t-il d'éviter une présence trop longue qui ferait apparaître comme telles les forces de l'OTAN.
La France participe à la définition de la stratégie de l'OTAN en Afghanistan et un centre de commandement et de planification international est installé à Kaboul. Elle défend l'idée d'un coordinateur entre des actions de la communauté internationale, placé sous l'égide des Nations unies.
a souligné que l'autorité de l'Etat afghan semblait singulièrement diluée et que le narcotrafic restait très important dans le pays, y compris au bénéfice de personnes proches du pouvoir. Il s'est interrogé sur la possibilité de voir se constituer un véritable Etat, en soulignant le risque d'une présence longue dans ce pays pour un faible résultat politique. Evoquant le coût très élevé des opérations extérieures, il s'est interrogé sur leurs conséquences sur l'entraînement des forces et l'efficacité des unités qui envoient régulièrement des personnels en opérations. Il a souhaité que soit défini un ordre de priorité entre les différentes opérations auxquelles la France prend part.
a indiqué que la France participait à une cinquantaine d'opérations extérieures, parfois à hauteur de quelques personnels, mais qu'il lui semblait difficile de se retirer des théâtres où notre présence était plus importante, comme en Afghanistan, au Kosovo, au Liban, en Côte d'Ivoire ou au Tchad. Il a souligné le caractère motivant de la participation aux opérations extérieures pour les personnels militaires, tout en reconnaissant qu'elle affectait l'entraînement des unités restées en métropole. Il a considéré que beaucoup restait à faire en Afghanistan, mais que de réels progrès avaient été accomplis par l'armée afghane.
a souligné que la participation aux opérations extérieures était liée au statut international de la France et à sa responsabilité particulière en tant que membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies.
a souligné que la France participait à des engagements longs, coûteux et risqués et a souhaité que des arbitrages, impliquant le Parlement, soient réalisés entre les différentes opérations. Il a souligné l'impact de la participation aux opérations extérieures sur la vie de famille des personnels.
A M. Philippe Nogrix, qui l'interrogeait sur les risques liés au stationnement des avions français sur la base de Kandahar et sur l'utilité des drones sur le théâtre afghan, M. Hervé Morin a indiqué que la base aérienne de Kandahar offrait certaines garanties de protection et que les drones français étaient déployés sur d'autres théâtres.