Je commencerai par répondre à vos questions, Monsieur le Président. Ce que vous décrivez correspond effectivement à une modification de l'internat qui a eu lieu en 1984 : disparition de l'internat régional, alors que des générations de médecins avaient été formés dans des régions où, très souvent, ils trouvaient à s'installer. Ce lien avec l'hôpital régional a disparu au moment de la réforme de cet internat. Faut-il revenir à une nouvelle organisation de l'internat ? C'est un point qui est tout à fait ouvert et je vous suis lorsque vous pensez que le système de bourse ne suffit pas forcément à contrebalancer un phénomène de connaissance du milieu pendant des années d'études, qui était celui de l'internat modèle 1984.
Sachez que le Québec nous sert de référence pour l'approche des politiques publiques en milieu rural, avec des réflexions qui sont, en général, très innovantes. En matière de possibilités technologiques, vous avez raison d'indiquer que la télémédecine devrait nous permettre d'ouvrir de nouveaux champs. C'est d'ailleurs pourquoi elle fait l'objet de chapitres importants dans le cadre de la loi HPST ; et la DATAR est bien évidemment aux côtés du ministère en charge de la santé pour mettre en oeuvre ces dispositions en matière de télémédecine. La DATAR participe d'ailleurs aux actions qui sont conduites par le Commissariat général aux investissements d'avenir pour mettre en oeuvre un certain nombre d'expérimentations en matière de télémédecine. Le grand emprunt a prévu un appel à projet « e-santé », considérant que la télémédecine permet, d'une part, d'apporter une médecine de qualité dans les territoires enclavés et, d'autre part, de garantir dans de meilleures conditions le maintien à domicile.
Mme Bruguière souligne que les comportements des jeunes médecins sont tout à fait différents de ceux des anciennes générations. Il faut évidemment prendre ce point en compte. Effectivement, les médecins, et pas seulement les femmes, souhaitent exercer leur métier tout en se ménageant des temps de repos importants, ce qui n'était pas le cas pour les générations de médecins de campagne qui se sont succédé depuis 150 ans. Vous avez parfaitement raison de souligner qu'il faut anticiper, dans toute la mesure du possible, les évolutions à 3 ou 5 ans, parce qu'il s'agit de choses qui se préparent.
C'est d'ailleurs ce qu'indique M. Détraigne, qui a un peu de mal à convaincre son ARS ou son préfet de région. Mais la dimension prospective et prévention des difficultés à venir figurent pourtant dans les orientations qui ont été données aux ARS par le gouvernement.
Cela étant, la maison de santé ce n'est pas la panacée. On ne va pas en ouvrir partout parce que c'est, en général, un investissement public, et il faut que cet investissement public ait un usage garanti pendant un certain nombre d'années. Le modèle qui a été développé part de l'existence d'un projet médical. Pour qu'il y ait projet médical, il faut au moins un certain nombre de médecins (mais cela peut être des médecins qui prévoient leur remplacement à terme). Ensuite, il faut que l'investissement collectif soit pertinent, c'est-à-dire qu'on ne peut pas imaginer un investissement à 100 % par des subventions publiques ; ce serait d'ailleurs contreproductif par rapport à l'objectif qui est de vérifier que le modèle est pérenne. Ce que nous préconisons, avec le ministère de la santé, c'est un financement qui soit autour de 50 % au moins par les professionnels qui s'installent dans les maisons pluriprofessionnelles.
Pour répondre à la question sur les pôles d'excellence rurale, je dirai que, dans le cadre de la dernière vague, nous avons accueilli 21 dossiers qui correspondent à 37 maisons de santé. Pourquoi en avons-nous retenu 37 ? Parce que c'était ceux qui étaient les plus exemplaires pour traiter des questions dans les territoires très enclavés, ou qui, par exemple, étaient tout à fait porteurs en matière d'utilisation de la télémédecine. Nous avons eu des critères supplémentaires qui ont permis de distinguer ces projets, sachant que ceux qui n'ont pas pu être retenus au titre des pôles d'excellence rurale seront, je l'espère, retenus au titre de l'appel à projet, dit classique, avec une capacité pour le préfet de région de moduler la subvention.
A propos de la question évoquant un retard dans une prise de décision, je dirai que, pour prendre une décision, il nous faut un projet de santé ainsi qu'un avis favorable de l'ARS (à savoir, à ce stade, une inscription dans le cadre du schéma régional médico-social) ; nous avons prévu un dispositif en matière de subventions, qui va être signifié aux préfets de région dans les prochains jours, et qui va permettre, je l'espère, de combler ce que vous qualifiez de retard dans la prise de décision.