Intervention de Jean-Pierre Godefroy

Réunion du 24 février 2006 à 22h20
Égalité des chances — Article 1er

Photo de Jean-Pierre GodefroyJean-Pierre Godefroy :

Cet amendement tend à empêcher une remise en cause de l'obligation scolaire jusqu'à l'âge de seize ans et une orientation prématurée des jeunes.

Monsieur le ministre, nous argumentons depuis longtemps pour essayer de vous convaincre. Permettez-moi donc de vous apporter une voix extérieure, en me référant à une tribune parue dans le journal Les Échos le 2 février dernier, sous la signature de M. Michel-Édouard Leclerc, président des magasins qui portent son nom.

M. Leclerc ne peut pas être assimilé à un gauchiste déchaîné ou à un patron inconséquent ; le succès de ses centres de distribution le prouve. Or que dit-il ?

Il indique d'abord sa confiance en l'apprentissage, qu'il assimile à une voie prépondérante de formation professionnelle, y compris de haut niveau. Nous sommes tous d'accord.

Il écrit ensuite : « J'ai fait un rapide sondage. [...] Pour nos directeurs de magasins, accueillir des apprentis dès quatorze ans n'est pas idéal. Les métiers sont parfois durs, avec des tâches de plus en plus complexes, nécessitant un niveau CAP et BEP pour les produits techniques et jusqu'au BTS pour la vente, par exemple.

« Par ailleurs, ils font valoir bon nombre d'objections pratiques qu'on ne saurait passer sous silence dans ce débat. D'abord, à quatorze ans, les jeunes sont encore en pleine croissance, pas toujours aptes à suivre les horaires d'entreprise. Ensuite, les problèmes liés à la sécurité ne sont pas moindres -outils tranchants, manutention d'engins mécaniques ou électroniques. La cohabitation avec des adultes n'est pas évidente pour les uns comme pour les autres. Enfin, la formation de ces jeunes nécessitera des capacités de tutorat renforcées et des systèmes de contrôle très lourds qui font défaut à nombre d'entreprises. Bref, s'il s'agit de créer une pré-préparation scolaire à l'apprentissage, pourquoi pas ? Pour travailler dans l'entreprise, non. »

Il ajoute : « L'honnêteté intellectuelle, comme la préservation de l'idéal républicain, mériteraient que, au lieu de lancer l'apprentissage à quatorze ans, on se préoccupe d'abord de ne pas les laisser sortir du primaire sans le moindre bagage d'écriture et de langage, ce qui leur fera défaut quelle que soit la filière choisie. »

M. Leclerc, avec lequel je n'ai aucun contact direct, évoque ainsi les difficultés que nous ne cessons de rappeler, qu'il s'agisse de la présence des jeunes dans l'entreprise, du tutorat ou de la nécessité de bien maîtriser les savoirs de base pour s'assurer un avenir professionnel. Il évoque même, en conclusion, la nécessité de soutenir les jeunes à l'école primaire, ce qui est à l'opposé de votre projet de loi.

À cet égard, nombre d'acteurs que nous avons auditionnés, y compris des chefs d'entreprise, tiennent tous le même langage. Il y a donc quelqu'un qui se trompe !

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