Intervention de Henri Proglio

Commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire — Réunion du 14 décembre 2010 : 1ère réunion
Audition de M. Henri Proglio président-directeur général d'électricité de france

Henri Proglio, président-directeur général d'Électricité de France :

Je ne suis pas un zélateur de la loi Nome, mais le Parlement est finalement parvenu à un équilibre. Le prix de vente devra être en cohérence avec le tarif réglementé transitoire d'ajustement de marché (Tartam), qui était en 2009 de 42 euros. La loi nous impose de mettre à disposition de nos concurrents 25 % de nos capacités de production, sans dégager aucune marge ; le prix de vente doit au moins couvrir le coût de production, faute de quoi ce sont nos clients qui paieront la différence ! Je me suis élevé avec véhémence contre le projet caressé par quelques-uns, qui consistait à piller le patrimoine d'EDF et de la nation française. ( M. Daniel Raoul approuve) J'attends la parution du décret ; je ne comprendrais pas que le prix fixé soit inférieur à 42 euros.

EDF jouera naturellement un rôle primordial dans le marché des capacités de production et d'effacement. La France est aujourd'hui dotée de l'industrie électrique la plus compétitive au monde : les prix sont inférieurs de 40 % à la moyenne européenne. Ne détruisons pas ce qui a été rendu possible par le dévouement et le savoir-faire des générations précédentes !

L'Allemagne est un pays doté d'une vraie politique industrielle... sauf dans le domaine de l'énergie. Les Allemands refusent l'énergie thermique tirée du charbon par souci d'écologie, sans pour autant s'intéresser au charbon propre, se méfient du gaz pour ne pas être dépendants de la Russie, rejettent le nucléaire pour des raisons idéologiques, et privilégient les énergies dites « renouvelables », aléatoires et fort coûteuses. La conséquence est une forte dépendance aux exportations. Or l'Allemagne veut imposer à ses voisins, par le biais des règlementations européennes, les conséquences malheureuses de ses propres choix...

Nous détenions 45 % du capital d'EnBW, les communes de Bade-Wurtemberg possédant le reste. Or, le ministre-président du Land, au cours d'une campagne électorale difficile, avait promis de renationaliser l'électricien et de recentrer ses activités sur le territoire du Land : il nous a donc fait une proposition unilatérale de rachat, que nous aurions pu refuser ; mais à la veille du renouvellement du contrat de partenariat, nous risquions de nous retrouver dans une position d'actionnaire minoritaire, sans plus pouvoir participer à la gestion industrielle. Dans une conjoncture difficile pour l'industrie allemande, frappée par la taxe sur le nucléaire et par les fluctuations des prix du gaz, il nous a paru préférable de vendre à un prix acceptable - 20 % au-dessus du cours boursier - et de dégager ainsi 4,7 milliards d'euros que nous avons pu affecter à notre propre désendettement.

On prétend qu'EDF est surendettée : c'est faux. La dette n'est pas structurelle, mais s'explique par les lourds investissements qu'il nous faut consentir pour l'entretien du parc français et le développement international du groupe. Cependant, l'effort de désendettement atteint aujourd'hui 23 milliards d'euros.

Nous n'excluons pas de revenir en Allemagne et étudierons les opportunités qui se présenteront.

S'agissant du développement international, pour lequel nous avons toujours privilégié des partenaires français au nom du patriotisme économique, le rapport Roussely a énoncé une évidence : il est naturel que celui qui a la meilleure expertise soit le chef de file.

Lorsque je me suis rendu à Pékin au début de mon mandat, j'ai rencontré le ministre chinois de l'énergie, qui m'a d'abord fait comprendre que son pays était désormais doté de moyens financiers considérables, d'une industrie puissante, de capacités d'expertise égales à celles des pays occidentaux, d'un marché intérieur considérable, et qu'il n'avait plus besoin de notre coopération. Je lui ai alors fait remarquer qu'une chose manquait encore à l'industrie nucléaire chinoise : le retour d'expérience sur un parc nucléaire existant. Il lui faudrait pour cela attendre vingt ou trente ans. A l'issue de la réunion, nous avons signé le renouvellement pour cinquante ans de notre coopération avec l'électricien chinois CGNPC et un autre contrat de cinquante ans avec CNNC.

J'entends dire qu'un opérateur ne pourrait pas vendre d'équipements à un autre opérateur. Qu'est-ce d'autre qui a fait de Veolia le premier constructeur mondial d'usines de traitement d'eau et de déchets ? C'est justement parce que l'opérateur a l'expérience de l'exploitation des usines qu'il est le mieux placé pour les vendre. L'Afrique du Sud souhaite une coopération avec EDF, pourquoi l'Inde la refuserait-elle ?

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