Je vous remercie, M. le Président, pour votre invitation. C'est un plaisir pour moi de venir devant vous car la discussion au Sénat est toujours directe, franche et productive.
Je vais donc vous apporter quelques éléments d'éclairage sur les quatre sujets que vous venez d'évoquer.
Un mot, tout d'abord, sur la Direction de la circulation ferroviaire (DCF), qui au-delà de sa technicité, est un sujet particulièrement important. Je rappelle que cette direction regroupe à la fois les aiguilleurs et les horairistes. Or, le Parlement a voté il y a deux ans la loi ORTF qui a notamment prescrit que les aiguilleurs et les horairistes soient dans une « case à part » à la SNCF, sous l'autorité de RFF, tout en restant cheminots. Cette loi est effectivement en oeuvre depuis janvier 2010 et pas un jour ne se passe sans que les discussions évoquent la prochaine loi pour réformer la DCF. Je pense pour ma part qu'il faut laisser le temps à ce service de prendre ses marques et montrer à tous son indépendance vis-à-vis de la SNCF.
Sur la question du fret, je vous annonce deux bonnes nouvelles. D'une part, depuis le début de l'année, la SNCF a transporté autant de wagons isolés qu'avant la réforme, alors que leur nombre avait baissé pendant la crise. Par ailleurs, pour le fret ferroviaire, le déficit cumulé sur les trois dernières années s'élève à 1,1 milliard d'euros et l'endettement de Fret SNCF arrêté en 2010 se monte à 2,5 milliards d'euros - ce qui constitue une gigantesque voie d'eau pesant sur l'avenir de l'entreprise - mais nous nous sommes engagés, et je le dis devant vous, à parvenir à un équilibre financier d'ici fin 2013 ou 2014. Ce plan de redressement se fait en outre sans dégât social (ni licenciement ni départ imposé) et nous accompagnons le reclassement des personnels. Nous les formons, y compris les personnes de plus de cinquante ans, voire de plus de cinquante-cinq ans, en collaboration notamment avec l'Association pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) et le GRETA. Ce plan s'exécute donc dans de bonnes conditions, qui ont d'ailleurs été discutées avec les partenaires sociaux.
Sur la question des gares, là encore, la loi ORTF les a maintenues dans le périmètre de la SNCF. Nous avons d'ailleurs créé à cet effet la branche Gare et Connexions, qui travaille pour tous les transporteurs, actuellement avec Eurostar, Trenitalia, Veolia, et demain la Deutsche Bahn. Une nouvelle impulsion a été donnée à la modernisation des gares, même s'il y avait beaucoup de retard à rattraper.
Enfin, sur la question de la concurrence, le rapport de M. Francis Grignon qui sera rendu cet après-midi sur l'expérimentation de l'ouverture à la concurrence des TER (Transport Express Régional), apportera un certain nombre d'éléments qu'il conviendra d'examiner. Je voudrais cependant insister sur deux points, qui me semblent particulièrement importants. Je rappelle tout d'abord que la concurrence est une question éminemment politique : c'est au Parlement de s'exprimer sur cette question. Mais si ce rapport débouchait sur un projet de loi, il faudrait impérativement veiller à ce que la concurrence soit équitable et loyale et qu'elle ne se traduise pas dans les faits par un dumping social. Il est ainsi indispensable que les cotisations sociales des opérateurs soient les mêmes et que le cadre social soit identique pour toutes les entreprises. Enfin, l'expérience a prouvé, grâce au Sénat notamment, avec les travaux menés par M. Hubert Haenel lors de la régionalisation, qu'il est indispensable de passer d'abord par l'expérimentation avant d'envisager une éventuelle extension. Nous nous sommes préparés à la concurrence mais le diable est dans les détails.