En 1946, les dépenses de santé représentaient 3 % du Pib, aujourd'hui elles s'établissent à 11 % ou 12 % ; aux Etats-Unis, elles comptent, globalement, pour 17 % de la richesse nationale et 8 % à 9 % de celle-ci si l'on ne retient que les programmes Medicare et Medicaid. On constate effectivement un consensus pour qu'une part importante de la richesse nationale soit consacrée à la santé ; de ce point de vue, un système socialisé est un bon choix mais il doit être mieux géré. Aux Etats-Unis par exemple, les dépenses sont plus élevées et les résultats moins bons ; le marché n'est en effet pas forcément le meilleur régulateur pour la santé et l'influence des industriels y est sans doute différente aussi. En outre, il n'y a pas d'outil de pilotage d'ensemble du système et les mécanismes que nous connaissons de la régulation des prix et de l'opposabilité des tarifs n'y existent pas. Le cabinet McKinsey a d'ailleurs montré qu'une partie de l'inefficacité du système américain était due au problème de la formation des prix.
Pour équilibrer le système français, il faudrait que les dépenses augmentent sur le long terme comme le Pib et que le financement de ces dépenses évolue également dans les mêmes proportions. Or, ce n'est pas le cas avec, en particulier, des dépenses qui progressent sensiblement plus vite, ce qui explique la situation de déséquilibre structurel que connait la maladie.
L'analyse précise des coûts est un travail relativement récent car il n'a pu être mis en place qu'avec le codage des médicaments en 1999, le codage des actes médicaux en 2005 et le rapprochement de la base de données de la Cnam avec le programme de médicalisation des systèmes d'information (PMSI) en 2007. La T2A est également un élément important pour la transparence sur l'activité hospitalière ; elle ne doit toutefois pas donner lieu aux changements incessants que l'on a observé ces derniers temps ; plus on augmente le nombre des tarifs et plus on crée de risques inflationnistes. Pour pouvoir progresser, la connaissance des évolutions économiques de la santé est essentielle.
Les ARS peuvent représenter une grande avancée si elles permettent une meilleure maîtrise de la gestion de l'hôpital. Elles ont d'importantes missions institutionnelles et de terrain ; il est important qu'elles accordent une priorité aux résultats et que la coopération, notamment avec les représentants régionaux de l'assurance maladie, soit fructueuse.
Il est vrai que la mise en place de la T2A a entraîné un accroissement des dépenses, évalué à 2,5 % par l'agence technique de l'information sur l'hospitalisation (Atih). Dans tous les pays où on a mis en place une tarification à l'activité, on a constaté la même progression. Celle-ci est liée par exemple à la mise en évidence d'activités non perçues jusque là et, bien sûr aussi, à des pratiques d'optimisation financière. On peut effectuer certains contrôles, comme aux Hospices civils de Lyon où pour la troisième année consécutive l'assurance maladie a relevé des formes d'optimisation de la tarification, mais la systématisation de ces contrôles est difficile. L'important est, en tout état de cause, de ne pas changer les règles chaque année car on rouvre à chaque fois les possibilités d'optimisation.
Le rapport Briet a le mérite de mettre l'accent sur les progrès à accomplir concernant l'élaboration de l'Ondam. Il est aussi utile de faire la différence entre les crédits servant à financer des prestations résultant de droits définis par la loi et les crédits à caractère limitatifs tels que ceux qui correspondent aux missions d'intérêt général (Mig). Le gel de crédits entrant dans cette deuxième catégorie permettra de mieux faire apparaître ces questions. Le rapport propose essentiellement des outils de régulation infra-annuelle ; il ne s'intéresse pas à la question du déficit structurel, soit 10 milliards. Ce déficit né de la crise est, il faut le souligner, inférieur à celui qui était apparu après la crise de 2001-2003, du fait d'un meilleur pilotage des dépenses. Néanmoins, il ne sera pas facile à résorber car les coupes dans les dépenses ne sont pas faciles ; seules des ressources complémentaires pourront venir le combler ; parmi ces ressources, on peut mentionner l'alignement du taux de CSG des retraités sur celui des actifs ou l'évolution du taux de cotisation de l'Etat employeur.
Les relations entre les caisses locales d'assurance maladie et les ARS sont encore en période de rodage. Il est important qu'il n'y ait pas de double pilotage mais une véritable coopération.
Des progrès ont été mis en oeuvre dans les politiques de prévention et de suivi des malades, par exemple avec le programme Sophia pour le diabète ou les initiatives des assurances complémentaires pour l'hypertension artérielle. Des marges de manoeuvre importantes existent cependant, au nombre desquelles figure effectivement la restructuration des ALD cardiovasculaires. Sur la chirurgie, des progrès doivent être accomplis dans deux directions : l'accroissement du taux de l'ambulatoire et une meilleure gestion des sorties d'hôpital. Il faut également réfléchir à une meilleure organisation de l'activité programmée, autour de plateaux techniques plus importants dont la productivité sera harmonisée avec les plateaux les plus performants. Il parait important d'accroître l'information des assurés sur ces questions afin qu'ils sachent, par exemple, quel est le nombre d'actes techniques pratiqués, par catégorie d'intervention, sur chaque plateau.
La situation des services de soins de suite est très différente selon les régions. Il faut qu'on puisse développer ces services là où c'est nécessaire et les restructurer là où les besoins ne sont pas avérés. Ce sera l'un des enjeux du dialogue avec les ARS sur les objectifs quantifiés de l'offre de soins (Oqos).
Les effectifs de l'assurance maladie ont diminué de 13 % entre 2006 et 2009, ce qui a représenté un effort important de la part de chacune des caisses qui se sont d'ailleurs toutes réorganisées. Il est important que ces gains de productivité soient supportables par les agents. Les enjeux majeurs pour la gestion du réseau sont aujourd'hui en particulier liés à la télétransmission par les médecins généralistes et à l'amélioration des systèmes d'information.