Intervention de Jean Faure

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 17 novembre 2010 : 1ère réunion
Loi de finances pour 2011 — Mission sécurité programme 152 gendarmerie nationale - examen du rapport pour avis

Photo de Jean FaureJean Faure, rapporteur pour avis :

Le programme 152 relatif à la gendarmerie nationale représente, dans le projet de loi de finances pour 2011, environ la moitié (46 %) des crédits de la mission « Sécurité », contre 54 % pour la police nationale.

D'un montant prévu de 7,7 milliards d'euros de crédits de paiement, le programme enregistre, par rapport à la loi de finances initiale pour 2010, une augmentation de 97,4 millions d'euros, soit + 1,28%.

Quant aux autorisations d'engagement, avec un montant prévu de 7,6 milliards d'euros, elles connaissent une légère diminution de - 0,88 %.

Dans un contexte de gel des dépenses publiques, ces évolutions confirment la priorité accordée par le gouvernement à la sécurité.

Toutefois, l'analyse des crédits de la loi de programmation triennale des finances publiques fait apparaître une réduction de 482 millions d'euros en crédits de paiements pour la gendarmerie sur les trois prochaines années, soit une baisse de - 12 %, par rapport aux montants indiqués dans le projet de loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (dite LOPPSI 2).

Les dépenses de personnel s'élèvent à 6,5 milliards d'euros pour 2011, en augmentation de 134 millions d'euros par rapport à 2010. Elles représentent environ 84 % des crédits de la gendarmerie.

Après une suppression de 1 246 emplois en 2009, et de 1 300 postes en 2010, la gendarmerie devrait perdre à nouveau 957 postes en 2011, en application de la règle de non remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, soit une baisse de 3 500 emplois sur trois ans. Sur la période 2011-2013, ce sont 3 000 postes qui devraient être supprimés dans la gendarmerie.

On peut rappeler que, alors que la LOPSI avait fixé à 7 000 emplois les renforts nécessaires à la gendarmerie, la gendarmerie s'était vu doter de 6 050 emplois sur la période 2003-2007.

Au total, le plafond d'emploi, qui était de 101 000 en 2008, devrait passer à 97 000 en 2011.

Même si le ministre de l'intérieur s'est engagé à ne pas remettre en cause la capacité opérationnelle de la gendarmerie et la densité de son « maillage territorial », je suis néanmoins préoccupé par cette forte baisse des effectifs de la gendarmerie.

Comme nous l'a indiqué le directeur général de la gendarmerie nationale, le général Jacques Mignaux, lors de son audition, après avoir supprimé de nombreux postes au sein des écoles, des états-majors et quinze escadrons de gendarmes mobiles, la gendarmerie est aujourd'hui « à l'os ».

On peut toutefois se féliciter de la réduction des tâches indues, comme les transfèrements judiciaires, qui devraient être transférés progressivement à l'administration pénitentiaire, aux termes d'un accord entre le ministère de l'intérieur et le ministère de la justice.

Ce transfert correspond, en effet, à l'une des recommandations du groupe de travail sur l'avenir de la gendarmerie et il devrait permettre de remettre environ 1 000 gendarmes et policiers sur le terrain.

En dépit de la baisse des effectifs, le poste consacré aux rémunérations et aux charges sociales devrait augmenter en 2011, en raison notamment de mesures catégorielles, à l'image du plan d'adaptation des grades aux responsabilités exercées (PAGRE), de la mise en oeuvre de la nouvelle grille indiciaire des militaires ou encore de la transposition aux sous-officiers de gendarmerie de la revalorisation de la grille indiciaire de catégorie B du corps d'encadrement et d'application de la police nationale.

Ces mesures catégorielles doivent, en effet, permettre d'aller vers une « parité globale » de traitement et de carrière entre les policiers et les gendarmes, conformément à l'engagement du Président de la République.

Dans un contexte budgétaire contraint, la direction générale de la gendarmerie nationale a fait le choix de « sanctuariser » les dépenses de fonctionnement, à un montant de 968 millions d'euros, afin de préserver la capacité opérationnelle des unités.

Enfin, l'enveloppe budgétaire allouée à la gendarmerie au titre des investissements connaît une forte baisse.

Avec un montant de 161 millions d'euros, les crédits de paiements diminuent de 11 millions d'euros par rapport à 2010, soit une baisse de - 6,5 %.

Les autorisations d'engagement, qui correspondent à des opérations futures, avec un montant prévu de 114 millions d'euros, connaissent une réduction encore plus sensible, de 151 millions d'euros, soit - 57 %.

Cette enveloppe ne permettra pas de lancer de « grands » programmes d'investissement, comme le renouvellement des hélicoptères de type Ecureuil ou des véhicules blindés, dont le taux de disponibilité est préoccupant.

La gendarmerie devrait assurer le maintien en condition opérationnelle de ces matériels, en prélevant des pièces détachées sur les appareils hors d'usage et devrait néanmoins acquérir un hélicoptère par an.

De même, le budget pour 2011 ne permettra pas de lancer de programme d'investissement immobilier, à l'exception du pôle de police judiciaire de Pontoise. C'est à mes yeux une autre source de préoccupation.

Le parc domanial de la gendarmerie nationale, dont plus de 70 % ont plus de vingt cinq ans, a atteint un niveau préoccupant de vétusté.

A l'avenir, faute d'investissement, la maintenance risque de peser de plus en plus lourdement.

Les crédits disponibles, financés au titre de la LOPPSI 2, sont principalement consacrés aux nouvelles technologies, comme la vidéo-protection ou encore les équipements de lecture automatisée des plaques d'immatriculation.

Enfin, je voudrais dire un mot à propos de la sous-dotation des OPEX.

Près de 700 gendarmes français participent actuellement à des opérations extérieures, notamment en Afghanistan, à Haïti, au Kosovo, en Géorgie et en Côte d'Ivoire.

En tant que force de police à statut militaire, capable d'agir dans un large spectre de crise, la gendarmerie nationale est en effet particulièrement adaptée à ce type d'opérations. J'avais d'ailleurs personnellement insisté pour inscrire cette mission spécifique dans la loi relative à la gendarmerie.

Avec notre collègue Jacques Gautier, nous vous avions d'ailleurs présenté le dispositif de la gendarmerie française en Afghanistan, et, avec notre collègue André Vantomme, nous vous avions présenté le dispositif en Géorgie.

Le coût de ces OPEX est intégré dans le budget de la gendarmerie depuis 2004.

A ce titre, la gendarmerie bénéficie depuis 2007 d'un financement de 15 millions d'euros, dont 11 millions d'euros pour les dépenses de personnels et 4 millions d'euros pour le fonctionnement.

Or, si cette dotation permet généralement de couvrir les besoins de fonctionnement, elle est structurellement insuffisante.

Ainsi, chaque année, le surcoût est de l'ordre de 20 à 30 millions d'euros et cette année ce surcoût devrait dépasser 25 millions d'euros.

Pour la seule mission en Afghanistan, le surcoût prévu est de 15 millions d'euros.

Or, faute de financement suffisant, ces crédits sont prélevés sur les autres postes de dépenses, par des redéploiements de crédits, notamment par des économies provenant du non recrutement de gendarmes.

Je considère donc qu'il serait souhaitable à l'avenir de mieux évaluer le coût prévisible de ces OPEX et, en cas de dépassement, de les financer sur un fonds interministériel, à l'image des armées pour ne pas grever le budget de la gendarmerie.

Je compte d'ailleurs interroger le ministre sur ce point lors du débat en séance publique sur le projet de loi de finances.

En conclusion, je vous proposerai d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Gendarmerie nationale ».

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