Puis la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Joël Bourdin, rapporteur spécial, sur la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales » et le compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural ».
a indiqué qu'il est proposé de doter la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales » (APAFAR) de 3,424 milliards d'euros en autorisations d'engagements (AE) et 3,448 milliards d'euros en crédits de paiement (CP) en 2010. L'Assemblée nationale propose de majorer ces montants de 229 millions d'euros en AE et de 163,5 millions d'euros en CP.
Avant de procéder à une présentation détaillée du budget de la mission pour 2010, il a souhaité replacer cette mission, portée par le ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche (MAAP), dans le contexte des grands chantiers de politiques publiques qui la façonnent : la révision générale des politiques publiques (RGPP), le Grenelle de l'environnement, ou encore le bilan de santé de la politique agricole commune (PAC).
Il a rappelé tout d'abord que, suite à la RGPP, le ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche est entré dans un processus de modernisation ambitieux, tant du point de vue de l'organisation de ses services, de ses opérateurs que de ses dispositifs d'intervention. Il a précisé que, à terme, ces réformes devront permettre de dégager des économies.
La réorganisation des administrations déconcentrées consiste surtout dans la fusion des directions départementales de l'équipement (DDE) et des directions départementales de l'agriculture et de la forêt (DDAF) dans de nouvelles directions départementales des territoires (DDT) créées en 2010. Il a ajouté que, s'agissant des opérateurs, l'Agence unique de paiement (AUP) et le Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles (CNASEA) ont été fusionnés en 2009 au sein de l'Agence de services et de paiement (ASP), organisme unique de paiement dans le secteur agricole. Les principaux offices agricoles ont également été regroupés au sein d'un établissement unique baptisé FranceAgriMer. Il a indiqué que ce regroupement des opérateurs concerne aussi la politique forestière, puisque l'Office national des forêts (ONF) pourrait absorber en 2010 l'Inventaire forestier national (IFN) et que le Centre national professionnel de la propriété forestière et les centres régionaux sont fusionnés en un établissement unique.
Il a évoqué alors le bilan de ces réformes dressé par le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche et a remarqué que ce point a fait l'objet d'une présentation assez détaillée lors de l'audition de celui-ci par la commission des finances, le 14 octobre 2009.
a ensuite développé certaines mesures résultant du Grenelle de l'environnement. Il a souligné que l'impact de celui-ci sur les politiques agricoles est important et, souvent, direct. Il a mentionné les politiques opérationnelles suivantes :
- le plan « agriculture biologique : horizon 2012 » qui prévoit de tripler la surface cultivée en agriculture biologique ;
- le plan pour la certification environnementale des exploitations ;
- le plan « Ecophyto 2018 » destiné à réduire l'utilisation de produits phytosanitaires de moitié avant dix ans ;
- le plan pour la performance énergétique des exploitations agricoles qui doit permettre d'atteindre un taux de 30 % d'exploitations agricoles à faible dépendance énergétique avant 2013.
Pour ce qui concerne l'accord sur le bilan de santé de la PAC, signé il y a un an, le 20 novembre 2008, M. Joël Bourdin, rapporteur spécial, a précisé qu'il a permis d'exprimer le refus par les Etats membres de l'Union européenne (UE) d'une transformation de la PAC en une simple politique de développement rural. L'accord a donc finalement garanti le maintien des instruments de régulation des marchés tels que les interventions et les aides à l'écoulement et au stockage privé. Surtout, il a instauré une plus grande flexibilité dans la mise en oeuvre des règles en fonction des choix nationaux. M. Joël Bourdin, rapporteur spécial, s'est demandé à cet égard si cette inflexion révèle une évolution vers la renationalisation des politiques agricoles européennes.
Il a déploré que l'impact budgétaire à moyen terme des réformes importantes conduites par le MAAP, qu'elles soient liées à la RGPP, au Grenelle de l'environnement, ou encore au bilan de santé de la PAC, ne soit pas évalué avec précision. La programmation pluriannuelle des crédits de la mission, qui apparaît largement caduque à ce stade, devrait être réévaluée en explicitant les hypothèses de gains et de coûts liés à ces réformes.
a ensuite présenté son analyse des crédits de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales ».
Il a reconnu que la crise grave que traversent l'ensemble des filières agricoles peut conduire à s'interroger sur la dotation de la mission en 2010, caractérisée par une évolution contrastée par rapport aux crédits votés en loi de finances initiale pour 2009 : les AE progressent de 6,1 % tandis que les CP sont en baisse de 0,8 %. Hors crédits de personnel, ceux-ci sont même en baisse de 2,6 % par rapport à 2009.
Il a cependant déclaré que le projet de loi de finances pour 2010 témoigne d'un effort notable pour le monde agricole au regard de la programmation pluriannuelle des crédits de la mission. En effet, la programmation 2009-2012 de la mission, telle qu'elle figure dans la loi du 9 février 2009 de programmation des finances publiques, prévoyait une diminution marquée des crédits en 2010 et en 2011. Le niveau de CP devait ainsi décroître de 11 % entre 2009 et 2010. Cet objectif n'a pas résisté à la crise généralisée du monde agricole.
Le niveau de crédits inscrits pour 2010 est en effet nettement supérieur aux plafonds prévus par la loi de programmation : de 17 % en AE et de 10 % en CP.
a indiqué qu'il est très probable que la mission soit abondée par des ouvertures de crédits supplémentaires, comme en témoigne déjà la proposition de majoration des crédits faite par l'Assemblée nationale. Il s'agit notamment de traduire au niveau budgétaire le plan d'urgence pour l'agriculture annoncé à Poligny, le 27 octobre 2009, par le Président de la République.
Il a ensuite souligné qu'il est fort possible que d'autres éléments conduisent à doter la mission APAFAR de crédits supplémentaires en cours d'année, dans la mesure où il est d'usage de ré-abonder en gestion cette mission au gré des crises subies par le monde agricole, qu'elles soient de nature climatique, économique ou sanitaire.
a ainsi constaté que l'exécution budgétaire en 2008 et en 2009 présente, une fois de plus, un profil perturbé, résultant de la survenue de crises mais aussi de la budgétisation insuffisante de certains postes. Il a estimé que la question des aléas ne fait pas l'objet d'une prise en charge satisfaisante par les différents programmes de la mission. Il a regretté notamment que, une fois de plus, il ne soit pas prévu de doter en loi de finances initiale le Fonds national de garantie des calamités agricoles (FNGCA).
a ajouté que la répartition des crédits manifeste clairement la vocation de ministère d'intervention du MAAP. 47 % des CP de la mission sont en effet destinés à des dépenses de titre 6 (soit 1,6 milliard d'euros), 28 % aux dépenses de personnel (976 millions d'euros) et 24 % aux dépenses de fonctionnement (823 millions d'euros).
Il a souhaité rapprocher la mission des autres concours publics à l'agriculture, et, en particulier, des dotations communautaires accordées au titre de la PAC : le périmètre de la mission ne s'élève, en effet, qu'à un peu plus de 10 % de l'ensemble des concours publics annuels à l'agriculture.
Il a fait part ensuite de ses observations principales sur chacun des programmes de la mission.
S'agissant du programme 154 « Economie et développement durable de l'agriculture, de la pêche et des territoires » tout d'abord, M. Joël Bourdin, rapporteur spécial, a déclaré qu'il s'agit du support privilégié de la politique d'intervention du ministère. Il a remarqué que ce programme est doté de la moitié des CP de la mission. Il a observé la montée en puissance, en son sein, des dispositifs liés à la promotion de l'agriculture biologique et des pratiques agricoles respectueuses de l'environnement, comme la prime herbagère agro-environnementale (PHAE) ou la mesure en faveur de l'assolement. De même, bénéficient d'un soutien particulier les dispositifs d'aides à l'installation et au maintien de l'activité en zones difficiles, en particulier grâce à l'indemnité compensatrice de handicap naturel (ICHN).
Il a observé que la plupart des subventions allouées aux opérateurs du programme augmentent en 2010. Seule la dotation destinée aux Haras nationaux est en baisse. Il a souhaité que la réforme des principaux opérateurs du programme se poursuive et, surtout, permette de réaliser des économies.
Pour ce qui concerne le programme 149 « Forêt » qui vise le double objectif de la valorisation de la ressource bois et la préservation de la biodiversité, M. Joël Bourdin, rapporteur spécial, a constaté que, en 2010, le renforcement du soutien à la filière bois vise principalement à surmonter les graves conséquences du passage de la tempête Klaus en janvier 2009.
Il a rappelé que la situation financière de l'Office national des forêts (ONF) est préoccupante, comme l'a révélé l'audition pour suite à donner à l'enquête de la Cour des Comptes, le 21 octobre dernier. Il a estimé toutefois qu'il convient de ne pas abandonner la trajectoire définie par la RGPP pour l'amélioration de la gestion de l'office.
Au sujet du programme 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation », M. Joël Bourdin, rapporteur spécial, a remarqué que la nouvelle priorité donnée à l'alimentation par le MAAP se traduit par la hausse de 33 %, par rapport à la loi de finances initiale pour 2009, de son action 8 « Qualité de l'alimentation et offre alimentaire ». Il a estimé qu'il s'agit notamment de donner aux services régionaux du ministère les moyens de mettre en oeuvre une politique ambitieuse en matière d'offre alimentaire.
Il a précisé que la réduction des crédits du programme, de l'ordre de 10 %, n'est qu'apparente : la plupart des actions bénéficient en fait de moyens renforcés en 2010. La baisse résulte principalement de l'extinction progressive de la dotation consacrée à l'élimination des farines animales, en raison de la baisse annuelle des stocks de farines à détruire.
Il a abordé ensuite l'autre facteur de réduction des crédits du programme, moins significatif : la réforme du service public de l'équarrissage. Il a expliqué que la libéralisation de celui-ci, depuis le 18 juillet 2009, conduit les filières à assurer elles-mêmes la gestion et le financement de l'équarrissage. L'Etat ne reste payeur que du seul service public résiduel. Les crédits restent toutefois assez importants en 2010 en raison de la poursuite du remboursement par l'Etat de la dette des éleveurs auprès des équarisseurs. Il a plaidé pour que cet apurement se fasse le plus rapidement possible de manière à réduire substantiellement les dépenses consacrées au service public de l'équarrissage.
S'agissant du programme 215 « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture », qui est en fait le programme support de la mission, M. Joël Bourdin, rapporteur spécial, a souligné la stabilité de ses crédits, à l'exception de la hausse liée au financement du recensement général agricole, dont le coût devrait toutefois rester faible. Il a ajouté que le plafond d'emplois baisse de 613 équivalents temps pleins travaillés (ETPT) en 2010, après avoir été réduit de 1 124 ETPT en 2009. La démarche de suppressions d'emplois du MAAP est donc poursuivie. Il a observé, en outre, que la concentration des crédits de titre 2 de la mission au sein d'un programme unique ne se justifie pas et qu'une ventilation des dépenses de personnel entre les différents programmes serait donc souhaitable pour la présentation du projet de loi de finances pour 2011.
Pour conclure, il a évoqué la mission « Développement agricole et rural », qui correspond au compte d'affectation spéciale éponyme, dit « CAS-DAR ». Ses recettes, évaluées à 114,5 millions d'euros en 2010, augmentent année après année alors que ses dépenses leur sont toujours inférieures. Il a donc estimé que cet écart persistant plaide pour une meilleure utilisation des crédits ou une baisse de la fraction du produit de la taxe affectée au CAS-DAR.
Enfin, la justification des dotations paraît insuffisante pour s'assurer que celles-ci ne sont pas distribuées en vertu d'une logique d'abonnement des organisations par lesquelles elles transitent. M. Joël Bourdin, rapporteur spécial, a donc proposé d'accroître la part des actions financées par le biais de procédures d'appels à projets.