Intervention de Janine Rozier

Réunion du 27 mars 2008 à 9h30
Politique de lutte contre l'obésité — Discussion d'une question orale avec débat

Photo de Janine RozierJanine Rozier :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, au nom du groupe UMP, je tiens à saluer l'initiative de notre collègue Gérard Dériot, qui nous permet de relancer le débat sur un enjeu majeur de santé publique.

Ainsi que cela vient d'être souligné, l'obésité est devenue un problème de santé publique considérable. Comme l'indique le professeur Arnaud Basdevant, chef du service nutrition à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière, c'est « une maladie de la modernité, une maladie de la transition urbaine, de la transition sociale et de la transition économique, qui touche les populations les plus vulnérables ». C'est la raison pour laquelle aucun pays n'est épargné. Cette maladie atteint soit, comme aux États-Unis et en Europe du Nord, les couches de la population les plus défavorisées, soit, au contraire, dans les pays émergents, les populations qui accèdent à plus de prospérité après avoir connu la pauvreté.

Après les collègues qui m'ont précédée à cette tribune, je dénonce, à mon tour, le fait que l'obésité progresse rapidement dans notre pays et affecte de plus en plus de jeunes : aujourd'hui, un enfant sur six est en surpoids, contre un sur vingt dans les années quatre-vingt.

Cette progression régulière pourrait avoir des conséquences catastrophiques sur la santé de nos concitoyens : les risques de complications cardiovasculaires sont multipliés par trois et de diabète par neuf. En tant que médecin, le président de la commission, Nicolas About, l'a expliqué mieux que je ne le ferais.

L'obésité prend un caractère particulièrement dramatique lorsqu'elle touche les enfants. Non seulement ils sont atteints des mêmes maladies que les adultes, mais l'on sait aujourd'hui que, si l'obésité apparaît avant la puberté, son risque de persistance à l'âge adulte est très élevé.

Des mesures ont déjà été prises. En France, la prise de conscience des menaces que fait peser l'obésité n'est pas nouvelle : dès 2001, notre pays s'est doté d'un programme national nutrition-santé, qui a établi des recommandations nutritionnelles diffusées par le biais de campagnes de communication. Sa mise en place représentait un premier pas dans l'affirmation d'une volonté politique pour combattre ce fléau.

Mes collègues l'ont dit, une deuxième étape décisive a été franchie grâce à la loi relative à la politique de santé publique du 9 août 2004.

À cette occasion, le Parlement a pris les premières mesures législatives de lutte contre l'obésité : l'une rendant obligatoire la mention d'une information à caractère sanitaire sur les publicités pour les produits alimentaires, l'autre visant à interdire les distributeurs automatiques de boissons et de produits alimentaires dans les établissements scolaires, où ils faisaient des ravages.

Je tiens à rendre hommage au travail mené par notre collègue Gérard Dériot au sein de l'Office parlementaire d'évaluation des politiques de santé, qui a permis d'approfondir la réflexion engagée lors de nos débats sur la loi de 2004 et qui représente une excellente base pour l'élaboration de nouvelles mesures.

Devant l'ampleur de la maladie et de sa progression, notamment chez les enfants, nous devons aller plus loin. Compte tenu de la vulnérabilité des enfants et de l'influence de la publicité sur leur comportement alimentaire - tous les intervenants l'ont souligné -, il est indispensable que les émissions télévisées qui leur sont destinées ne comportent plus aucune publicité les incitant à consommer des produits sucrés ou salés. Le maintien de ces publicités avec des messages de mise en garde serait une mauvaise solution, puisque, dans la plupart des cas, les enfants ne comprennent pas la teneur de ces avertissements.

Les causes de l'obésité sont multiples. Mais, si les facteurs génétiques et héréditaires comptent, c'est avant tout notre mode de vie contemporain qui est en cause : la sédentarisation croissante des individus et la consommation massive d'aliments trop sucrés ou trop salés, facilement accessibles et relativement peu coûteux, sont les vrais responsables de l'ampleur prise par cette nouvelle épidémie.

À ces considérations, valables dans de nombreux pays, s'ajoute, dans le nôtre, un facteur aggravant spécifique : la disparition progressive des traditionnels repas conviviaux, pris à des heures déterminées, au profit d'une alimentation segmentée, constituée d'une nourriture industrielle et immédiatement consommable.

En outre, l'obésité n'est pas uniquement un problème de santé publique : elle entraîne également une souffrance sociale et humaine qu'il nous faut absolument prendre en compte si nous ne voulons pas que des générations entières d'enfants et d'adultes soient mises à l'index dans notre société.

L'enfant obèse a plus de mal qu'un autre à s'intégrer dans un groupe, à pratiquer certains sports, à s'identifier à des modèles de réussite ; l'adulte obèse souffre de nombreux handicaps ; il voit sa mobilité réduite, rencontre plus de difficultés pour trouver un emploi et participer à des activités, souffre de discriminations.

Dans cette perspective, le deuxième programme national nutrition-santé, lancé en septembre 2006, a mis en place une politique globale, qui se décline en deux volets principaux :

Le premier concerne la prévention. Il s'agit de sensibiliser les citoyens à une bonne alimentation et de les inciter à exercer une plus grande activité physique quotidienne, mais aussi de parvenir à l'amélioration nutritionnelle des produits alimentaires.

Le second volet est axé sur le dépistage précoce et la prise en charge des troubles nutritionnels. À ce titre, je tiens à saluer l'action de l'Association française de pédiatrie ambulatoire, qui, lors de la Quatrième journée nationale de dépistage de l'obésité chez l'enfant, le 12 janvier dernier, a mobilisé trois cents pédiatres dans soixante villes de France pour des consultations gratuites afin d'informer et d'alerter les familles sur le problème de l'obésité infantile.

Notre rapporteur, Gérard Dériot, a présenté une brillante et parfaite synthèse des causes de l'obésité et des remèdes à y apporter.

Aussi, comme chaque fois qu'il est question d'enfants, il nous faut insister sur le rôle primordial de l'éducation au sein de la famille et à l'école. C'est là où l'enfant peut acquérir les bonnes habitudes, à la fois de nutrition - avec des repas à heure fixe, la diversité des produits, légumes et fruits à consommer - et d'hygiène de vie, en intégrant la pratique de la marche et du sport entre les séquences de télévision et de jeux vidéo, qui font trop souvent la joie des enfants et préservent la tranquillité des parents ! Ne l'oublions pas, nutrition rime avec éducation.

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