Notre réalité, aujourd'hui, la voici : en France, lorsque vous faites partie des plus pauvres, la probabilité que vous soyez obèse ou en surpoids est supérieure à 30 %. En revanche, cette proportion décroît nettement dans les milieux les plus favorisés. L'obésité et le surpoids sont devenus des marqueurs sociaux.
Si l'obésité et le surpoids dépendent de facteurs multiples, les habitudes alimentaires jouent un rôle déterminant dans la prévention des risques que comportent ces maladies.
Nous devons nous mettre en ordre de bataille. Il serait faux d'affirmer aujourd'hui que les Français sont égaux dans le choix de leur alimentation.
En tant que ministre de l'égalité et de la qualité des soins, j'appelle tous les acteurs du monde de la santé, la société civile et le secteur agro-alimentaire à faire preuve de responsabilité et de solidarité. Nous devons donner aux Français les moyens de reprendre la maîtrise de leur poids et donc de leur santé.
Le temps n'est plus aux manoeuvres en solitaire, aux initiatives isolées. Il nous faut travailler et agir ensemble, parce que le drame sanitaire auquel nous devons nous mesurer dépasse de loin les intérêts particuliers. Il engage notre solidarité nationale.
En 2001, le programme national nutrition santé, ou PNNS, avait fixé un certain nombre d'objectifs chiffrés relatifs à la nutrition et à l'alimentation des Français.
L'objectif était de diminuer de 20 % la prévalence du surpoids et de l'obésité chez l'adulte, et d'empêcher que le surpoids et l'obésité n'augmentent chez les enfants.
Avant d'évoquer les nouvelles étapes dans ce combat contre l'obésité, je me dois de dresser avec vous le bilan du premier PNNS.
Coordonné par mon ministère, le PNNS engage la participation active des ministères de l'éducation nationale - cela a été évoqué à de nombreuses reprises dans ce débat -, de l'agriculture, de la consommation et des affaires sociales.
Les résultats sont là : des progrès sensibles ont été réalisés. À cet égard, je répondrai à M. Bret et à Mme Goulet que le programme français national nutrition santé est un modèle pour nombre de pays, en particulier les États européens, qui puisent dans notre démarche des leçons importantes pour mettre en oeuvre leur politique de santé publique.
Du point de vue de la nutrition, l'objectif était de faire reculer le nombre de petits consommateurs de fruits et légumes. Alors que les Français mangeant moins de 3, 5 portions de fruits et légumes par jour représentaient 60 % de la population, l'objectif était, en 2001, de faire passer cette proportion à 45 %. Les résultats dépassent ces espérances, puisque désormais seuls 35 % des Français consomment trop peu de fruits et de légumes.
L'objectif de consommation moyenne de sel de 8 grammes par jour est presque atteint. En dix ans, la consommation excessive de sel a reculé : elle ne touche plus que 10, 5 % des hommes et 1, 7 % des femmes.
Par ailleurs, l'activité physique chez les femmes et les hommes a progressé : près des deux tiers des Français parviennent aujourd'hui à exercer au moins trente minutes d'activité physique par jour.
Sur d'autres points, en revanche, les avancées sont insuffisantes.
Ainsi, la consommation de féculents, pourtant recommandée, demeure insuffisante. Celle du pain a même tendance à diminuer.
À l'inverse, la consommation de produits riches en sucres rapides ne baisse pas. Elle est encore excessive chez un trop grand nombre d'enfants.
La consommation moyenne de fibres n'est que de 16 grammes par jour pour un objectif de 25 grammes par jour. Quant aux lipides, et notamment les acides gras saturés, ils restent beaucoup trop présents dans l'alimentation de nos compatriotes.
Les habitudes alimentaires des jeunes, en particulier, sont très perfectibles : ainsi, un jeune sur six affirme ne pas se nourrir de façon équilibrée, et, parmi eux, un étudiant sur trois se plaint d'une alimentation déréglée.
Les chiffres de la prévalence du surpoids et de l'obésité ne sont pas bons. Un certain nombre d'entre vous l'ont rappelé, et je ne me lasserai pas de le redire. Près de 32, 4 % des adultes français sont en surpoids et 16, 9 % sont obèses.
Les enfants paient un lourd tribut à cette épidémie : 14, 3 % des enfants de trois à dix-sept ans sont en surpoids et 3, 5 % sont obèses.
Ce drame sanitaire masque une injustice sociale. En effet, l'écart se creuse désormais entre les enfants de cadres et les enfants d'employés ou d'ouvriers. Or 80 % des enfants qui sont obèses à dix ans le resteront à l'âge adulte. Une fois n'est pas coutume, je suis d'accord avec le diagnostic qu'a rappelé M. Robert Bret !
Vous connaissez bien les conséquences de l'obésité ou du surpoids sur la santé : des risques accrus de diabète, de maladies cardio-vasculaires, voire de cancers. Être en surpoids, être obèse, c'est s'exposer à vivre moins bien, et moins longtemps.
Devant cette injustice sanitaire, nous devons nous mobiliser, et entrer dans une démarche volontaire, cohérente et coordonnée.
Les premières évaluations du PNNS mettent en lumière l'implication croissante des partenaires institutionnels, sous l'égide du ministère de la santé.
Les collectivités territoriales se mobilisent devant ces enjeux. Plus de cent vingt d'entre elles ont aujourd'hui signé la charte des « villes actives du PNNS ». Les conseils généraux sont appelés depuis le début de l'année à signer eux aussi une charte « départements actifs du PNNS ». Permettez-moi de saluer ici le conseil général de la Moselle, qui vient d'être le premier à signer cette charte.
Les messages que nous avons à faire passer autour des questions de santé et de nutrition sont nombreux, et les canaux par lesquels nous pouvons les diffuser sont complémentaires.
Aujourd'hui, nous devons viser la communication la plus cohérente et la plus large possible, afin que nos concitoyens puissent prendre la mesure de ce qui se joue pour eux autour de leur alimentation.
L'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé, l'INPES, a diffusé près de 25 millions de guides nutrition du PNNS.
Près de 500 000 outils destinés au dépistage du surpoids et de l'obésité chez les adultes et les enfants ont été distribués aux professionnels de santé.
Des campagnes nationales ont été menées pour inciter à la pratique d'une activité physique quotidienne, la limitation de la consommation de produits gras et sucrés et la promotion de la consommation de fruits et légumes. Leur impact, évalué par l'INPES, a dépassé les espérances. Une véritable prise de conscience a eu lieu.
Aujourd'hui, les pouvoirs publics ne sont plus seuls à agir, et je m'en réjouis. Je suis particulièrement satisfaite de pouvoir désormais compter sur le soutien de nombreux industriels, des distributeurs et des médias, qui s'engagent en faveur de cette action.
Nous proposons aujourd'hui des chartes d'engagements volontaires de progrès nutritionnel aux entreprises du secteur alimentaire. Une première charte vient d'être signée. D'autres entreprises mettent en avant des initiatives neuves. En signant ces chartes, l'État et ses partenaires privés s'engagent à faire respecter des critères de qualités rigoureux et objectifs. L'observation de Gérard Dériot concernant la taille des portions est intéressante. Les professionnels devraient en tenir compte dans leurs évaluations.
C'est dans cet esprit de transparence, et afin d'assurer un suivi permanent de la qualité nutritionnelle des aliments, que je viens de mettre en place, avec les ministres chargés de l'agriculture et de la consommation, un Observatoire de la qualité de l'alimentation, ou OQALI.
Cet observatoire aura pour mission d'évaluer le rapport qualité-prix des aliments en tenant compte de la valeur nutritionnelle de ces derniers. Ce nouvel outil permettra aux Français de mieux gérer leur alimentation.
Aujourd'hui, nous l'avons tous dit, en particulier Gérard Dériot et Janine Rozier, ce sont les enfants qui retiennent d'abord notre attention.
Vous avez évoqué le dépistage précoce à l'école de l'obésité et du surpoids.
Dans le cadre du PNNS, tous les professionnels de médecine scolaire et de protection maternelle et infantile, ou PMI, ont reçu des outils pratiques pour assurer le dépistage du risque d'obésité chez le jeune enfant, qu'ils pratiquent désormais systématiquement.
Nous devons à présent nous interroger, au sein du comité de pilotage du programme national nutrition santé, sur les suites à donner à cette consultation.
Que faire une fois le diagnostic établi à l'école ou en PMI ? Comment permettre au médecin traitant d'intervenir, et dans quel cadre ? Comment, en un mot, tisser un véritable réseau de santé, intégrant d'autres professionnels, qu'ils soient spécialistes de l'activité physique ou de la diététique par exemple, pour mieux tenir compte des données familiales et sociales affectant les comportements alimentaires ?
La Haute autorité de santé a été saisie pour formuler des recommandations afin d'améliorer les pratiques professionnelles et de mettre en place une prise en charge de qualité.
Pour nos enfants, l'essentiel se joue à l'école. Nous entendons à cet égard agir sur deux leviers : d'une part, en interdisant la promotion commerciale, ouverte ou déguisée, de certains produits alimentaires ; d'autre part, en améliorant la qualité des repas scolaires.
Monsieur Revet, comme vous l'avez rappelé avec raison, sur ces sujets, ce sont bien souvent les enfants qui éduquent les parents. Ce fut le cas pour le geste écologique, ...