Intervention de André Dulait

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 18 novembre 2009 : 1ère réunion
Loi de finances pour 2010 — Programme préparation et emploi des forces de la mission défense - examen du rapport pour avis

Photo de André DulaitAndré Dulait, co-rapporteur pour avis :

a tout d'abord indiqué que le programme Préparation et emploi des forces, placé sous la responsabilité du chef d'état-major des armées, regroupait la majeure partie des dépenses de personnel et de fonctionnement des armées.

Le co-rapporteur pour avis a précisé qu'il exposerait pour sa part les dépenses de personnel ainsi que les surcoûts OPEX, laissant ensuite à son collègue, M. Jean-Louis Carrère, le soin de présenter les dépenses de fonctionnement et de maintien en condition opérationnelle.

a souligné que le programme 178 rassemblait 88 % des effectifs du ministère de la défense, soit 273 000 équivalents temps plein travaillés (ETPT), dont 82 % de militaires et 18 % de civils. Il a estimé qu'il concentrait toutes les problématiques de la gestion des ressources humaines des armées et constituait par conséquent le coeur de la grande manoeuvre des ressources humaines en cours.

Evoquant les chances et les risques liés à la réforme de l'outil de défense en matière de ressources humaines, il a rappelé que le projet de budget pour 2010 s'inscrivait dans le cadre fixé par la loi de programmation militaire (LPM) adoptée en juillet 2009, qui prévoyait une diminution sans précédent du format, avant 2014, à savoir plus de 20 % des effectifs, avec la suppression de 54 000 postes.

S'agissant de la réorganisation des méthodes, comme la mutualisation et la rationalisation du soutien commun, des restructurations territoriales, du déploiement des bases de défenses ou de la poursuite des expérimentations d'externalisation, M. André Dulait, co-rapporteur pour avis, a estimé qu'elles constituaient autant de défis en matière de logistique, d'organisation et de gestion des hommes et que l'effort demandé aux armées serait considérable.

Il a ensuite indiqué les grandes lignes du cadre budgétaire fixé par la loi de programmation. Les économies attendues sur la période 2009-2014 sont de 2,7 milliards d'euros pour le titre 2, grâce aux réductions d'effectifs. Ces économies seront entièrement réinvesties dans l'outil de défense. La réduction portera principalement, à 75 %, sur les soutiens et devra respecter une proportion de 25/75 % entre civils et militaires.

a fait valoir que les opportunités présentées par cette réforme étaient réelles et que l'enjeu était que les économies de personnels résultent bien des réorganisations et des mutualisations. Il a estimé que si l'on diminuait les effectifs sans réformer l'organisation en profondeur, c'est l'outil militaire dans sa globalité qui serait mis en péril. En outre, il a fait observer que mener ces deux opérations de front impliquait que les objectifs de baisse d'effectifs soient en phase avec le calendrier des restructurations. Sur la période 2009-2011, le ministère prévoit, en moyenne, une baisse de 8 400 ETPT par an par régulation des flux, reclassement dans la fonction publique ou attribution de pécule.

Le coût total des mesures sociales d'accompagnement sur l'ensemble de la LPM représentera un rythme annuel moyen de 150 millions d'euros. Le coût des 1 200 départs de militaires incités financièrement représente 70 millions d'euros chaque année. L'indemnité représente entre 24 et 48 mois de solde, calculée sur le traitement indiciaire hors prime. S'agissant des ouvriers d'État, il est prévu d'inciter financièrement à 400 départs par an.

a noté que, pour ce qui concerne les départs vers la fonction publique, l'objectif de doubler les mobilités dés 2009 pour atteindre 2 100 postes était particulièrement ambitieux et, selon lui, difficile à atteindre dans une période où toutes les administrations sont soumises aux rigueurs de la révision des politiques publiques,

Sur l'exécution du programme en 2009, le rapporteur pour avis a indiqué que la réduction s'était poursuivie au même rythme qu'en 2008 mais, compte tenu de l'avance prise, cette réduction était de l'ordre de quelque 4 000 postes supplémentaires par rapport aux prévisions. Certains militaires ont anticipé la réforme et choisi de quitter les armées tandis que les objectifs en matière de recrutement n'ont pas toujours été atteints, notamment en raison d'une insuffisance des crédits du titre 2.

Il a considéré que, dans une période qui enregistre une baisse d'effectifs, recrutement et fidélisation restaient plus que jamais les maîtres mots, et que, si la baisse des effectifs se fait en resserrant de manière trop importante les recrutements, cela pourra se traduire par le vieillissement des armées, un déséquilibre de la pyramide des grades, un encombrement des carrières, et, vraisemblablement, un gonflement des soutiens. Elle risquerait d'aboutir à une désorganisation des structures opérationnelles, contrairement à l'objectif recherché. Il a recommandé la vigilance sur le déroulement de la réforme, en particulier en matière d'effectifs.

Il a ajouté que le projet de loi de finances pour 2010 constituait un moment charnière de la nouvelle programmation et qu'il importait de négocier ce tournant dans de bonnes conditions.

Abordant les crédits du titre 2 du programme 178 pour 2010, M. André Dulait, co-rapporteur pour avis, a indiqué que, comme en 2009, les dépenses de personnel du programme 178 pour 2010 s'étaient stabilisées à 15,4 milliards d'euros et la masse salariale à 9,8 milliards d'euros contre 9,9 milliards en 2009.

Il a noté que cette stabilité cachait, d'un côté, les gains issus de la réduction des effectifs et, de l'autre, les dépenses nouvelles liées aux mesures d'accompagnement de la réforme.

Il a indiqué que les gains liés à la réduction des armées étaient de 163 millions d'euros auxquels il fallait ajouter un solde du glissement vieillesse-technicité (GVT) négatif de l'ordre de 88 millions d'euros et que les dépenses nouvelles comprenaient des mesures catégorielles de l'ordre de 93,2 millions d'euros, des mesures indiciaires qui avoisinent les 46 millions et l'accompagnement social des restructurations de l'ordre de 25 millions, le tout atteignant environ 160 millions d'euros. Le gain budgétaire net de la déflation est de l'ordre de 90 millions d'euros en 2010. Par ailleurs, 65 % des gains bruts sont utilisés pour les mesures catégorielles.

a constaté que, dans l'immédiat, les suppressions d'effectifs dégageaient des marges de manoeuvre limitées. Il est en effet prévu, dans le premier temps de la réforme, des gains limités et un réinvestissement massif dans la condition militaire, et, dans un second temps, des gains a priori plus substantiels.

Il a ajouté que l'une des difficultés de cette « manoeuvre » tenait dans la concordance entre le cadrage financier retenu pour l'évolution de la masse salariale et les objectifs en matière d'effectifs. Des difficultés pourraient notamment résulter de l'insuffisance des instruments disponibles en matière de pilotage de la masse salariale et des ressources humaines, notamment des systèmes d'information. Il a indiqué que, en 2009, une sous-évaluation du titre 2 de 100 millions d'euros avait conduit à une réduction des recrutements. Enfin, il a craint que les tensions sur le titre 2 conduisent à une accélération non souhaitée de la réduction des effectifs.

Afin de parvenir à faire coïncider, dans le temps et selon les types d'emplois, les départs naturels et les besoins en réduction de postes, il a souligné la nécessité d'ajuster les nouveaux recrutements aux besoins les plus urgents, de mettre en oeuvre des formations adaptées aux spécialités et d'assurer un soutien spécifique aux mobilités géographiques inévitables.

Il a estimé que, d'un point de vue qualitatif, la réussite de la manoeuvre dépendait de la capacité de mener à bien l'ambitieux chantier de la réorganisation et de la modernisation du soutien et de l'administration générale, faute de quoi le rééquilibrage au profit des capacités opérationnelles serait compromis. L'un des principaux axes de cette modernisation concerne la création des bases de défense (BdD) qui doit permettre de mutualiser les actions conduites en matière de soutien général.

D'un point de vue budgétaire, sur l'ensemble du programme 178, il a recommandé de contrôler le coût des effectifs hors territoire métropolitain. Il a évoqué les territoires d'outre-mer, où la réduction sera vraisemblablement moins importante que prévu. Il a également cité le renforcement de la présence française à Abou Dhabi où les effectifs devraient atteindre 500 hommes. Certes, les infrastructures ont été payées par les autorités émiriennes, mais le coût de fonctionnement de la base avoisine les 20 millions d'euros par an.

a ensuite considéré qu'il faudrait également prendre en considération le coût de l'intégration dans l'OTAN.

Avant même sa pleine réintégration, la France était déjà présente dans les structures de l'OTAN avec un effectif de 161 militaires. La décision d'une pleine réintégration de la France dans les structures de l'alliance devrait porter sa présence à environ 1 200 personnes dans les différents états-majors et organismes de l'OTAN. La montée en puissance des effectifs s'étalera jusqu'à l'été 2012. Les militaires français seront alors présents sur les vingt-cinq sites répartis dans treize pays. Il s'agit d'un coût annuel supplémentaire en année pleine de plus de 100 millions d'euros.

Il a rappelé que le coût budgétaire de cette réintégration n'avait pas été programmé dans la LPM.

a ensuite évoqué les OPEX. En effet, avec 570 millions d'euros pour 2010 contre 510 pour 2009, la dotation allouée aux surcoûts des opérations extérieures progresse, approchant ainsi une budgétisation intégrale. Il a rappelé que, pour 2009, les besoins s'élevaient à 873 millions d'euros, mais que, contrairement aux années précédentes, en 2010 comme en 2009, conformément à la loi de programmation militaire, le financement résiduel des OPEX ne reposerait pas sur les crédits d'équipement de la défense mais sur la réserve de précaution interministérielle.

Il a considéré que les OPEX appartenaient désormais au fonctionnement ordinaire des armées, qu'elles ne sont plus ni imprévisibles, ni ponctuelles, qu'elles se caractérisent, comme l'a indiqué le chef d'état-major des armées, par leur durée, leur durcissement, leur dispersion géographique et leur diversité. Elles doivent donc être prévues en construction budgétaire dès la loi de finances initiale.

En conclusion, M. André Dulait, co-rapporteur pour avis a formulé les remarques suivantes :

- en construction budgétaire, le programme 178 souffre d'un certain sous-calibrage. Cette sous-dotation fait peser deux types de risques : une réduction d'effectifs plus importante que prévu pour rester dans l'enveloppe et une mise en cause des programmes d'équipements par des annulations sur le titre 5 pour compenser le titre 2.

Au cours des dernières années, le projet de loi de finances rectificative a pu apparaître comme une « session de rattrapage » pour corriger les insuffisances de dotation de la loi de finances initiale. Ces deux dernières années, ce mécanisme n'a pas fonctionné et les armées ont dû absorber les surcoûts.

Selon le rapporteur pour avis, dans l'intérêt même des armées, et dans le contexte budgétaire actuel, la loi de finances initiale doit être viable en tant que telle, dans la mesure, bien sûr, de ce qui est prévisible.

Sous le bénéfice de ces observations, M. André Dulait, co-rapporteur pour avis, a recommandé l'adoption des crédits de la mission Défense.

Enfin, la commission a examiné les crédits de fonctionnement du titre 3 du programme 178, affectés au soutien et à l'entraînement des forces, ainsi qu'au maintien en condition opérationnelle (MCO) des matériels.

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