Intervention de Frédéric Van Roekeghem

Commission des affaires sociales — Réunion du 28 octobre 2009 : 1ère réunion
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 — Audition de M. Frédéric Van roekeghem directeur général de l'union nationale des caisses d'assurance maladie uncam et de la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés cnam

Frédéric Van Roekeghem, directeur général de l'Uncam et de la Cnam :

a tout d'abord estimé que la modification du taux K en 2010 est justifiée par une situation de crise exceptionnelle dont l'ampleur ne pouvait être entièrement mesurée lorsqu'a été fixé le principe d'un taux triennal à la fin de l'année 2008. A propos des solutions envisageables pour rétablir durablement l'équilibre des comptes de l'assurance maladie, il a fait valoir que le transfert de certaines charges vers les assurances complémentaires ne suffira pas à résoudre le problème posé par une évolution des dépenses de santé supérieure à l'évolution du Pib. Il faut rappeler que 60 % des assurés touchent 10 % des remboursements tandis que 40 % en perçoivent 90 % ; 66 % des remboursements sont concentrés sur 13 % des assurés, dont les pathologies justifient 80 % de la croissance des dépenses. L'essentiel de ces dépenses se concentre sur les maladies cardio-vasculaires, le diabète, les cancers et les maladies psychiatriques, en particulier les démences. Dès lors que les dépenses croissent plus vite que le Pib tandis que les recettes évoluent au même rythme, l'assurance maladie est confrontée à un problème systémique qui justifie qu'on améliore substantiellement la productivité et l'organisation du système pour les pathologies les plus lourdes, afin de soigner mieux en dépensant moins. Certains patients sont à l'origine de dépenses de plusieurs millions d'euros chaque année et aucune assurance complémentaire ne pourra les prendre en charge.

En réalité, les transferts de l'assurance maladie obligatoire vers les assurances complémentaires concernent le plus souvent des dépenses dites de confort ou des dépenses peu dynamiques, ce qui laisse entier le déséquilibre structurel entre recettes et dépenses. Mécaniquement, plus on sort du champ de l'assurance maladie obligatoire les dépenses les moins dynamiques, plus ce champ se concentre sur celles qui croissent le plus rapidement. La démarche consistant à rembourser des médicaments nouveaux à prix élevé et à forte demande potentielle tout en déremboursant ceux présentant un service médical rendu faible et à prix peu élevé relève de la même problématique. Par conséquent, il serait préférable de faire en sorte que, grâce à des gains de productivité, les dépenses de santé n'évoluent pas plus vite que le Pib sur le moyen terme, tout en prenant en compte le fait que la santé participe à la croissance de l'économie. Une telle évolution reposera nécessairement sur un triptyque constitué de l'innovation, de la productivité et du financement.

Des gains de productivité considérables sont encore possibles. Ainsi, il existe des écarts importants dans le taux de recours aux soins entre les régions françaises. Cet écart, corrigé de la structure d'âge, atteint par exemple 26 % entre la région Pays de la Loire et la région Paca. Par ailleurs, le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie (HCaam) a encore récemment chiffré à 25 % l'écart de tarifs entre les établissements publics et les établissements privés. On constate aussi que, depuis six ans, les dépenses consacrées au diabète ont progressé de 80 % ; or, dans le même temps, selon une étude comparative récente, la France demeure très en retard dans la prévention de cette pathologie et le nombre de patients suivis par examen du fond de l'oeil reste insuffisant. En ce qui concerne la cataracte, trop peu d'opérations sont encore réalisées en ambulatoire à l'hôpital public alors que, dans de nombreux pays, elles ne sont plus effectuées en milieu hospitalier mais dans les centres de soins ; aujourd'hui, le tarif de cette intervention demeure supérieur à son coût de revient réel. Dans le même ordre d'idées, la dialyse à domicile demeure très peu développée en France.

De son côté, l'assurance maladie a entrepris d'importants efforts de productivité puisqu'entre 2003 et 2009, le nombre d'emplois a été réduit de 11 000 unités sous l'effet de moindres remplacements des départs en retraite. Cette évolution s'est réalisée sans réduction de la qualité de service, les effectifs ayant même été augmentés pour les fonctions présentant une forte valeur ajoutée.

L'exclusion des dépenses liées à la grippe A du niveau de dépenses à partir duquel le comité d'alerte est tenu de se réunir est proposée par le PLFSS pour répondre à l'inquiétude des partenaires sociaux qui redoutaient le déclenchement de l'alerte alors même que les dépenses de maladie seraient convenablement maîtrisées par les professionnels de santé. Il est vrai que l'évaluation de ces dépenses sera malaisée et que la pandémie est d'ores et déjà en cours, de sorte que son impact sur les comptes de 2010 pourrait rester limité.

En ce qui concerne la convergence tarifaire, le conseil de la Cnam s'est déclaré favorable à la poursuite de ce processus et à la mise en oeuvre d'une convergence partielle sans attendre les nombreuses études qui doivent encore être réalisées. Cette évolution vers un tarif unique se heurte au problème de l'intégration des honoraires médicaux mais la création d'un secteur optionnel à dépassements limités pourrait faciliter la réalisation du processus. Enfin, il est encore difficile de savoir quand le secteur optionnel pourra être effectivement créé, dès lors que des élections professionnelles pourraient se tenir au cours du premier semestre 2010, ce qui rendra difficile la signature d'une nouvelle convention médicale à brève échéance.

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