C'est la première fois que nous nous saisissons pour avis du projet de loi de finances. J'espère que cela ne deviendra pas la règle. Si les interactions entre loi de finances et loi de financement sont en partie inévitables, elles ne devraient pas être aussi nombreuses et embrouillées !
Le Gouvernement a prévu de dégager 3,5 milliards en 2011 pour financer la réforme des retraites. Une partie de ces mesures figure dans le PLFSS, principalement l'annualisation du calcul des allégements généraux, pour 2 milliards. L'autre partie est inscrite dans le projet de loi de finances : contribution supplémentaire de 1 % sur les hauts revenus et certains revenus du capital avec le relèvement de 40 % à 41 % du taux d'imposition de la tranche la plus élevée de l'impôt sur le revenu, exclue du champ du bouclier fiscal, pour un gain attendu de 495 millions ; suppression du crédit d'impôt attaché aux revenus distribués de source française ou étrangère, pour 645 millions ; imposition, dès le premier euro, des plus-values réalisées par des particuliers à l'occasion de cession de valeurs mobilières ou de droits sociaux, pour un gain de 180 millions à partir de 2012 ; suppression du plafonnement de la quote-part des frais et charges prélevés sur les dividendes perçus de ses filiales par une société mère, pour 200 millions.
L'article 39 transfère à la Cnam et la Cnav la TVA brute collectée sur des activités ayant un lien avec l'assurance maladie ; selon le Gouvernement, cette nouvelle part de TVA pourrait atteindre 1,34 milliard.
Pour faire face à une nouvelle reprise de dette en 2011, les recettes de la Cades ont évolué. Finalement, elles seront, hors mobilisation du FRR, exclusivement constituées de la CRDS et d'une fraction de la CSG. En conséquence, 0,28 point de CSG jusqu'à présent destinée à la branche famille a été transféré à la Cades, soit 3,2 milliards. En compensation, la branche famille doit recevoir le produit de trois recettes relatives au secteur des assurances, initialement destiné à la Cades.
Ces trois nouvelles recettes comprennent : à l'article 7, la taxation des contrats d'assurance maladie solidaires et responsables à 3,5 %, réduisant la dépense fiscale de moitié à 1,1 milliard ; à l'article 8, le prélèvement « au fil de l'eau » des contributions sociales sur les compartiments euros des contrats d'assurance vie multisupports, pour un gain de 1,6 milliard en 2011 ; à l'article 9, l'instauration d'une taxe sur les sommes mises en réserve en franchise d'impôt par les entreprises d'assurance, pour 1,7 milliard, réparti entre 2011 et 2012.
Ces trois recettes ne présentent pas la solidité et la pérennité nécessaires pour assurer un financement stable des dépenses de la branche famille. L'exit tax est un fusil à un coup, tandis que le prélèvement anticipé des prélèvements sociaux sur les contrats d'assurance vie est destiné à s'éroder.
Seule la taxation des contrats responsables est stable, mais risque de renchérir le coût des complémentaires. Certains de nos interlocuteurs parlent d'augmenter les primes de six ou huit points dès l'année prochaine ; selon le Gouvernement, les complémentaires ont les réserves nécessaires pour faire face à ce nouveau prélèvement sans avoir à augmenter leurs primes de plus d'un ou deux points. Les ministres soulignent les conséquences positives pour les complémentaires des mesures d'économie sur l'assurance maladie, ainsi que la progression du nombre d'assurés pris en charge à 100 % au titre des ALD.
Afin de confronter ces deux thèses, j'ai demandé au Gouvernement le détail de ses calculs et transmis ce document aux organismes d'assurances. Je viens tout juste de recevoir la réponse de la FFSA que je vais analyser. Comme la Cour des comptes, je regrette que le secteur des organismes complémentaires ne soit pas plus transparent et que nous manquions d'informations.
L'article 40 du projet de loi de finances procède à une nouvelle répartition du droit de consommation sur les tabacs, le budget de l'Etat prenant en charge le surcroît de taxe sur les salaires versée par certains organismes publics, dont les ARS, Météo France, l'Onac ou France Télévisions. La part de ces droits qui revient à l'Etat passe donc de 2,92 % à 3,40 % afin d'assurer la neutralité des nouvelles règles d'assujettissement à la taxe sur les salaires qui revient désormais en totalité à la sécurité sociale.
Les récentes évolutions de l'affectation des droits tabacs se sont toujours faites au détriment de la sécurité sociale. Nous revendiquons depuis plusieurs années que la totalité en soit affectée à la sécurité sociale et relève de la loi de financement de la sécurité sociale. Le Gouvernement a accepté ce transfert dans le cadre de l'affectation définitive du panier de recettes destinées à compenser les allégements généraux de cotisations. Il a également attribué aux caisses l'excédent prévisible de ce panier pour les trois ou quatre prochaines années. Aussi, pour tirer les conséquences de cette décision, je vous proposerai un amendement à cet article 40.
Dans le cadre de la mission « Travail et emploi », plusieurs articles suppriment ou aménagent des dispositifs d'exonération de charges, notamment l'article 90, qui supprime l'exonération de quinze points de cotisations sociales en matière de services à la personne. Dans le cadre de la mission « Santé », l'Assemblée nationale a ajouté plusieurs articles relatifs à l'AME, qu'il nous faudra étudier.
Dans l'immédiat, je vous propose que nous prenions acte des mesures de financement de la réforme des retraites et de compensation à la branche famille de la ponction faite sur ses ressources pour alimenter la Cades. Nous resterons cependant vigilants car il faut que les recettes soient au rendez-vous. Grâce à notre initiative, l'article 12 bis du PLFSS affecte prioritairement à la branche famille l'excédent du panier de recettes de compensation des allégements généraux, à hauteur du manque à gagner pour elle de la substitution des trois recettes assurances à 0,28 point de CSG. C'est une première garantie, qui devra être pleinement mise en oeuvre dans les prochaines années.