Intervention de Vincent Lamanda

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 23 septembre 2009 : 1ère réunion
Application des articles 61-1 et 65 de la constitution — Audition de M. Vincent Lamanda premier président de la cour de cassation

Vincent Lamanda, premier président de la Cour de cassation :

a indiqué qu'il souhaitait voir retenue la faculté de poser simultanément les deux questions de constitutionnalité et de conventionnalité, la première devant le conseil constitutionnel, l'autre devant la CJCE.

Il a ensuite abordé l'obligation, pour la juridiction saisie du moyen d'inconstitutionnalité, de statuer dans les deux mois : il a estimé qu'elle contraindrait le juge à décider sans avoir toujours le temps d'organiser un véritable débat contradictoire. Pour lui, même dans l'hypothèse d'un défendeur unique, le juge aura les plus grandes difficultés à se prononcer après un véritable débat contradictoire ; il devra donc se prononcer sans que l'adversaire ait pu faire véritablement valoir ses observations.

Il a considéré que, si l'exception d'inconstitutionnalité était invoquée aussi fréquemment que la question de conventionnalité, elle risquait d'être utilisée comme une manoeuvre dilatoire.

Sur le dispositif de renvoi de la question au conseil constitutionnel par la Cour de cassation, il a rappelé les trois hypothèses d'intervention de celle-ci : transmission par le juge du fond, pourvoi en cassation contre l'arrêt d'appel ayant refusé de renvoyer à la Cour de cassation mais ayant statué sur le fond, lequel serait incontestablement recevable, et moyen soulevé pour la première fois à l'occasion du pourvoi en cassation.

a estimé que, s'il était compréhensible d'obliger la juridiction suprême à se prononcer dans un délai bref pour ne pas allonger les délais de l'instance, le délai de trois mois assigné par le projet de loi organique au conseil d'Etat et à la Cour de cassation pour statuer sur la question d'inconstitutionnalité était inopportun : en cassation, le demandeur dispose de quatre mois en matière civile pour déposer son mémoire ampliatif. Dans ce cas, le Cour de cassation devra fréquemment se prononcer avant le dépôt du mémoire en défense.

Il a donc appelé à la fixation d'un délai suffisant pour permettre la vérification de la recevabilité du pourvoi. Il a également craint l'instrumentalisation des procédures. En outre, il a fait valoir que tant que le conseil constitutionnel ne se serait pas prononcé sur un texte, les tribunaux devront lui transmettre toutes les demandes s'y rapportant, même posées dans des termes identiques.

Pour lui, il serait préférable de n'imposer aucun délai à la Cour de cassation.

Puis, il a rappelé que, en 2008, les juridictions judiciaires avaient été saisies de trois millions d'affaires et remarqué que, si l'exception était soulevée dans un cas sur mille, le volume total correspondrait à l'activité d'un mois plein des six chambres de la Cour de cassation. Dans l'hypothèse où il serait porté à un sur cent, il égalerait l'activité de la Cour pendant un an.

Le premier président de la Cour de cassation a observé que la juridiction administrative ne serait pas confrontée au même problème dans la mesure où elle n'est pas marquée par l'hétérogénéité qui caractérise les magistrats judiciaires (prud'hommes, proximité ...).

Enfin, il a évoqué la disposition prévoyant le non-sursis à statuer jusqu'à la décision du conseil constitutionnel en matière de privation de liberté à raison de l'instance. Il a prédit son application fréquente devant la chambre criminelle, qui devrait conduire le conseil constitutionnel à se prononcer alors que le pourvoi aura déjà été jugé. Il a estimé qu'il conviendrait alors d'ouvrir le réexamen de la décision de condamnation pénale.

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