Intervention de Pierre Fauchon

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 27 janvier 2010 : 1ère réunion
Protection temporaire — Examen du rapport

Photo de Pierre FauchonPierre Fauchon, rapporteur :

Constatant que la proposition avait pour finalité la mise en oeuvre du mécanisme de la protection temporaire, institué par une directive de 2001, au bénéfice des réfugiés afghans, M. Pierre Fauchon, rapporteur, a estimé que les règles dans le domaine de l'asile restaient minimales, même si elles s'appuient sur une compétence communautaire. Il a relevé que la présidence française de l'Union européenne avait toutefois permis d'avancer sur le sujet, avec notamment la présentation du premier « paquet asile » fin 2008. Un second « paquet asile » a été présenté fin 2009.

Il a rappelé que la directive relative à la protection temporaire a été conçue à la lumière de l'expérience européenne dans les Balkans dans les années 1990, et notamment du problème des réfugiés du Kosovo.

Il a évoqué les travaux de la commission des affaires européennes, sur le rapport de M. Hubert Haenel, président de la commission, qui concluaient que les critères permettant l'attribution de la protection temporaire n'étaient pas remplis.

a fait état de deux objections à l'encontre de la proposition de résolution.

D'une part, ayant donné lecture de l'article 88-4 de la Constitution, il a constaté que la proposition de résolution ne se situait pas dans ce cadre et qu'elle présentait, par conséquent, un problème sérieux de recevabilité. En effet, la proposition ne se fonde ni sur un projet d'acte européen ni sur un document émanant d'une institution de l'Union européenne. Elle n'a pas pour objet de prendre position sur un projet de texte européen, mais elle invite à la mise en oeuvre d'une procédure prévue par une directive.

Il a estimé que cette initiative aurait dû se fonder sur le droit général de résolution de l'article 34-1 de la Constitution, tel qu'il résulte de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.

D'autre part, après avoir rappelé la procédure d'attribution de la protection temporaire, M. Pierre Fauchon, rapporteur, a rappelé les trois critères sur lesquels devait se fonder le Conseil pour décider, sur proposition de la Commission, d'attribuer la protection temporaire : les Etats membres de l'Union européenne doivent être confrontés à un afflux massif, actuel ou imminent, de personnes déplacées ; les systèmes d'asile des Etats membres doivent se trouver dans l'incapacité de faire face dans des conditions normales à cet afflux massif ; les personnes déplacées doivent se trouver dans l'impossibilité de retourner dans leur pays d'origine dans des conditions sûres et durables.

Il a rappelé que la protection temporaire ne pouvait s'appliquer que pour une durée limitée de trois ans au plus.

a considéré que l'arrivée sur le territoire de l'Union européenne de ressortissants afghans ne présentait pas le caractère d'un afflux massif, les chiffres n'étant pas du même ordre que ceux concernant les Balkans. Ayant rappelé les statistiques des demandes d'asile présentées en France par des ressortissants afghans, il a estimé que le système d'asile n'était pas dans l'incapacité d'y répondre. Par ailleurs, aucun Etat membre n'a signalé se trouver dans une telle incapacité.

A l'appui de ses propos, il a cité une contribution écrite transmise par le Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, selon laquelle les critères d'attribution de la protection temporaire ne sont effectivement pas remplis dans le cas des ressortissants afghans. Selon cette contribution, le traitement individuel des demandes de protection, qu'il s'agisse de l'asile ou de la protection subsidiaire prévue par une directive de 2004, reste le moyen le plus adapté d'accueillir les réfugiés afghans en Europe et leur assure au demeurant une meilleure protection.

Concernant le troisième critère, celui de l'impossibilité du retour dans le pays d'origine, M. Pierre Fauchon, rapporteur, a constaté également qu'il n'était pas rempli, quelle que soit l'appréciation que l'on puisse avoir sur les mesures d'éloignement de ressortissants afghans de l'automne 2009.

Pour ces motifs, M. Pierre Fauchon, rapporteur, a proposé à la commission de ne pas adopter la proposition de résolution.

Souhaitant néanmoins élargir le débat, il a proposé à la commission d'émettre le voeu selon lequel le processus d'harmonisation européenne en matière d'accueil et de protection des réfugiés puisse aboutir rapidement, dans l'intérêt des personnes déplacées et des réfugiés.

Si cette harmonisation n'était pas envisageable à brève échéance, il a rappelé l'utilité des coopérations spécialisées qui permettent, sur l'exemple du casier judiciaire européen, d'avancer à plusieurs Etats membres seulement lorsqu'il n'est pas possible d'avancer ensemble pour tous les Etats membres. A cet égard, il a cité les propos tenus par Robert Schuman, lors de sa déclaration du 9 mai 1950 : « L'Europe ne se fera pas d'un coup, ni dans une construction d'ensemble : elle se fera par des réalisations concrètes créant d'abord une solidarité de fait ». A titre d'exemple de coopération spécialisée en matière d'asile, il a cité la possibilité de la mise en place par les Etats volontaires du bureau européen d'appui en matière d'asile, qui est une proposition du « paquet asile » mais qui suscite d'importantes réticences de la part de certains Etats.

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