a précisé que, en matière budgétaire, les responsabilités du chef d'état-major des armées portaient sur le programme 178 « préparation et emploi des forces » et sur le programme 146 « équipement des forces » de la mission « défense ».
Il a rappelé que lors de l'examen de la loi de programmation militaire 2009-2014, la commission avait identifié un certain nombre de défis à relever, tels que le redéploiement des moyens au profit de l'équipement, la réalisation d'opérations de cession destinées à fournir des ressources exceptionnelles ou encore la maîtrise de certains facteurs de surcoût sur les programmes d'armement et le maintien en condition opérationnelle des matériels.
Il a souhaité que le chef d'état-major des armées replace l'analyse du projet de budget pour 2010 dans le contexte des premières indications sur la mise en oeuvre de la loi de programmation, en mentionnant les points de satisfaction et ceux qui appellent une vigilance particulière. Il a également demandé au général Jean-Louis Georgelin d'évoquer l'évolution du dispositif des armées en opérations extérieures.
Le général Jean-Louis Georgelin, chef d'état-major des armées a précisé qu'il ne s'exprimait pas en tant que responsable de programmes mais en tant que chef d'état-major des armées, responsable de l'emploi des forces.
Le général Jean-Louis Georgelin, chef d'état-major des armées, a déclaré que le projet de budget de la défense pour 2010 confirmait la priorité donnée à l'équipement des forces et à la revalorisation de la condition du personnel. Il intervient dans un contexte marqué par la crise économique, la dégradation des finances publiques et la mise en oeuvre du plan de relance. Il traduit l'effort de la Nation pour sa défense, autorise la poursuite des réformes et permet le renouvellement de l'équipement des armées.
Le général Jean-Louis Georgelin a ensuite indiqué que sa principale préoccupation était de disposer, dans la durée, des ressources humaines et financières permettant de conduire les réformes dans des conditions satisfaisantes. Il a insisté sur le fait que la construction d'un outil de défense performant s'inscrit dans le temps long et qu'elle nécessite constance et détermination afin de pouvoir, à toute heure, faire face à une surprise stratégique toujours possible.
Le général Jean-Louis Georgelin, chef d'état-major des armées, est ensuite revenu sur les événements de l'année 2009. Cette période a été marquée par le vote de la loi de programmation militaire, l'approbation de la poursuite des opérations extérieures et la réintégration par la France des structures de commandement de l'OTAN. Il s'agit donc d'une année dense pour le Parlement mais également importante pour les armées.
Dans le domaine des opérations, cela s'est traduit par le maintien d'un niveau conséquent de déploiements. Près de 10 000 hommes sont engagés quotidiennement sur les théâtres extérieurs, près de 3 000 hommes exercent au titre de la fonction « protection », près de 14 000 hommes assurent les missions de souveraineté et près de 6 000 hommes sont déployés sur les bases françaises à l'étranger.
Les armées appliquent le principe de juste suffisance : le niveau des ressources consenti à un engagement dépend toujours de l'analyse sécuritaire du théâtre d'opération. Ainsi, les différents dispositifs français en Afrique ont été progressivement réduits, de même que les forces déployées au Kosovo, en accord avec l'OTAN. Selon le même principe, un effort a été effectué afin de lutter contre la piraterie au large de la Somalie. La France a déployé dans ce pays des moyens supplémentaires et a entrepris la formation de bataillons de l'armée somalienne tout en maintenant son soutien à la mission de l'Union africaine. Les succès obtenus face aux pirates sont bien réels et résultent d'une coordination tactique entre les moyens européens d'Atalante, les moyens de l'OTAN et ceux des différents dispositifs nationaux.
Concernant l'Afghanistan, l'année 2009 est marquée par le redéploiement du dispositif français. En novembre, nos moyens militaires seront concentrés dans les districts de Surobi et de Kapisa afin de pouvoir y conduire des actions coordonnées. En liaison avec les forces de sécurité et les autorités afghanes, il devrait être possible de ramener ces districts sur la voie de la stabilité dans les deux ans. Le général Jean-Louis Georgelin a indiqué s'être rendu sur ce théâtre à plusieurs reprises et avoir constaté une situation bien meilleure que les descriptions qu'en fait parfois la presse. La coordination des actions civiles et militaires est indispensable si l'on veut que la situation s'améliore. Il faut également faire en sorte que les Afghans retrouvent confiance dans leur administration.
Le général Jean-Louis Georgelin a fait part de deux enseignements tirés de ces opérations :
- le premier est la nécessité de disposer d'un outil de défense réactif, susceptible de s'adapter à la diversité des crises. Cela suppose une formation particulière du personnel ainsi qu'une mise à disposition rapide des équipements ;
- le second est le besoin d'un soutien de la Nation et de sa représentation afin de conduire des opérations dans la durée.
L'année 2009 a aussi été marquée par la participation pleine et entière de la France aux structures de l'OTAN. Dès l'été, des officiers français ont commencé à occuper les postes attribués à notre pays. Le surcoût de la participation française n'est pas encore stabilisé, car le périmètre des investissements à financer n'est pas totalement connu à ce jour. Le général Jean-Louis Georgelin a également souligné l'importance de maintenir l'attractivité des affectations des militaires qui rejoindront l'OTAN ; condition du succès d'une pleine participation française sur le long terme.
L'année 2009 a enfin été marquée par des décisions permettant de placer l'organisation et le fonctionnement des armées dans la perspective du regroupement des états-majors et des directions du ministère sur le site de Balard. Le décret du 15 juillet 2009 confirme le décret de 2005, il place les armées au centre de l'organisation du ministère de la défense et renforce le travail interarmées.
Dans un deuxième temps, le général Jean-Louis Georgelin a tiré les enseignements de cette première année d'exécution de la loi de programmation militaire, qui repose, selon lui, sur quelques principes simples : le maintien au sein du budget de la défense des économies résultant de la réduction du format des armées ; l'optimisation du dispositif de maintien en condition opérationnelle ; la réalisation du volet « export » de nos programmes d'équipement et l'obtention de recettes exceptionnelles.
Au terme de cette première année, l'évolution du format des forces armées se situe dans l'épure du format du Livre Blanc. Les objectifs de déflation des effectifs ont été atteints. Au titre des seuls budgets 2009 et 2010, 16 500 postes seront supprimés ; les équipements destinés à être retirés du service actif l'ont été. Cela a été le cas, par exemple, de deux bâtiments de guerre des mines, de deux bâtiments de soutien, d'une centaine de chars Leclerc et d'une quarantaine d'avions de combat ; par ailleurs, vingt-quatre emprises ont été libérées et une vingtaine d'emprises supplémentaire le seront avant la fin de l'année ; onze bases de défense expérimentales ont été créées et quarante-trois formations auront été déplacées ou dissoutes en 2009 ; enfin, les nouveaux commandements et services permettant de rationaliser l'emploi de nos moyens, comme le commandement interarmées des hélicoptères, ont été créés ou sont en cours de création comme le commandement interarmées de l'espace, l'organisation interarmées des soutiens, le service industriel de maintenance des matériels terrestres, le service du commissariat des armées.
Selon le général Jean-Louis Georgelin, ces réformes sont d'une ampleur considérable et leur exécution n'est pas sans risque. La « manoeuvre » concernant les ressources humaines, en particulier, est délicate à conduire. La préservation de la capacité opérationnelle des armées passe, en effet, par le maintien d'un bon niveau, tant qualitatif que quantitatif, de recrutement des jeunes cadres et militaires du rang. Il est indispensable d'obtenir les sorties nécessaires pour ne pas pénaliser les recrutements.
Dans le domaine du soutien, le retour d'expérience des premières bases de défense mises en place prendra un peu de temps. Ce temps est nécessaire afin de bien évaluer ce qu'il est réellement possible de mutualiser avant de modifier complètement l'organisation du ministère.
Par ailleurs, des incertitudes pèsent sur des programmes majeurs comme le Rafale, eu égard aux possibilités d'exportation, et l'A 400M, dont le retard nécessite des mesures palliatives.
Les recettes exceptionnelles prévues dans le budget 2009 ne sont pas au rendez-vous. Certaines ont dû être décalées pour des raisons conjoncturelles, d'autres sont inférieures aux prévisions. Ces difficultés en matière de ressources ont été atténuées par l'autorisation de consommer 900 millions d'euros de crédits reportés de la gestion 2008 ainsi que la mise en oeuvre d'avances au titre du plan de relance. Ces avances ont été soustraites des crédits demandés au titre de 2010.
Le plan de relance a permis de conclure plusieurs contrats dont les plus emblématiques sont l'acquisition, en anticipation, d'un bâtiment de projection et de commandement, la livraison de deux Rafale supplémentaires en 2011, l'acquisition de cinq hélicoptères EC 725, l'avancement d'un an de la fin des livraisons des véhicules blindés de combat d'infanterie (VBCI), l'achat de pièces de rechanges de Rafale pour 50 millions d'euros, la mise aux normes de l'installation de conditionnement d'air du sous-marin nucléaire lanceur d'engins « Le Triomphant » pour 11 millions d'euros.
Enfin, dans un troisième temps, le général Jean-Louis Georgelin a souligné les principales caractéristiques du projet de loi de finances pour 2010, qui témoigne, selon lui, de l'effort significatif de la France pour sa défense dans une période difficile. Le projet de budget s'élève, hors pensions, à 30,12 milliards d'euros. Cette somme est complétée par 770 millions d'euros provenant du plan de relance et 1,26 milliard d'euros de recettes exceptionnelles. Au total, les ressources prévues s'élèvent à 32,15 milliards d'euros, en léger retrait par rapport à 2009, mais en conformité avec la loi de programmation militaire. En prenant en compte l'ensemble des ressources attendues, l'effort de défense est maintenu aux environs de 2 % du PIB.
Les ressources attribuées permettent de poursuivre le processus de réforme des armées et de remplir les contrats opérationnels. Elles permettent également de conduire une politique d'équipement ambitieuse au profit de la fonction connaissance et anticipation, de la protection du combattant et de l'adaptation des équipements aux nouvelles menaces.
Le général Jean-Louis Georgelin a toutefois fait observer que l'exercice budgétaire 2009 avait montré le caractère incertain de la mise à disposition effective des ressources exceptionnelles. L'obtention de ces ressources doit faire l'objet d'une attention particulière car elle conditionne la poursuite de l'effort d'équipement des forces.
Le général Jean-Louis Georgelin a ensuite déclaré que le projet de budget avait pour caractéristique d'accorder la priorité à la « recapitalisation » de l'outil de défense. Après la forte augmentation de l'année passée, les ressources totales consacrées aux équipements s'élèvent à 17 milliards d'euros, soit une progression de 11 % par rapport à leur niveau de 2008. Ces ressources permettront de réaliser ou d'engager des commandes portant sur les équipements modernes dont les armées ont besoin pour faire face à la situation sécuritaire définie par le Livre Blanc. Elles se traduiront par des moyens de renseignement renforcés : C160 Gabriel rénové, AWACS rénové, satellites HELIOS et MUSIS, nacelles de reconnaissance ; des moyens de protection pour nos combattants : VBCI, VBL, PVP, FELIN et brouilleurs, ainsi que des moyens permettant d'améliorer l'efficacité de l'outil de défense : Rafale, Tigre, NH90, SAMP/T, EXOCET, M51, FREMM...
Le projet de loi de finances se donne également les moyens d'accompagner la conduite de la réforme. Les marges de manoeuvre dégagées par les réductions d'effectifs, soit une suppression brute de 8 400 postes, et le resserrement du dispositif des implantations militaires, notamment autour des dix-huit bases de défense pilotes, permettront l'accompagnement des restructurations, à hauteur de 180 millions d'euros, et l'amélioration de la condition du personnel, pour un total de 203 millions d'euros dont 114 millions d'euros de mesures nouvelles.
Le projet de budget maintient l'effort indispensable en matière de préparation des forces nationales. Les ressources prévues pour financer l'entraînement et l'entretien programmé des matériels permettront aux armées de réaliser leurs activités de préparation opérationnelle. Il est fondamental que les hommes et leurs équipements soient bien prêts avant l'envoi des forces en opération.
Enfin, la provision pour les opérations extérieures pour 2010 s'élève à 570 millions d'euros, en hausse de 60 millions d'euros par rapport à l'an dernier. Cette provision couvrirait 65 % des besoins estimés pour l'année 2009, soit 873 millions d'euros. Cet effort de financement marque un progrès. Il est indispensable que les surcoûts qui ne manqueront pas de dépasser cette provision ne soient pas imputés sur la mission défense, car cela se ferait alors au détriment des équipements ou de l'activité des forces.
Le général Jean-Louis Georgelin a encore déclaré qu'il fallait maintenir l'adéquation entre les ressources et les besoins. Un trop grand optimisme quant aux économies à réaliser et la difficulté à maîtriser les besoins peuvent conduire à un écart. Les réformes engagées demandent du temps et nécessitent de la constance. Elles ne produiront pas immédiatement les effets positifs escomptés. Dans le domaine des ressources humaines, par exemple, l'expérience de la précédente LPM a démontré que le respect des hypothèses de départ pouvait se heurter à la dure loi de la gestion et des contraintes budgétaires ; conduisant ainsi à une déflation des effectifs plus forte que prévue. Ce risque de découplage a été identifié et une clause de sauvegarde a été introduite dans la loi de programmation. Il conviendra de la mettre en oeuvre si le besoin s'en fait sentir.
De la même façon, le Livre Blanc définit le dispositif stationné à l'étranger ou dans les départements et collectivités d'outre-mer. Afin d'en retirer les dividendes, il convient de le mettre en oeuvre tel qu'il a été envisagé.
Enfin, le général Jean-Louis Georgelin suit attentivement l'évolution de nouveaux besoins de financement. Il a évoqué les coûts, aujourd'hui mieux appréciés, liés à l'OTAN et à l'implantation de la base française aux Emirats Arabes Unis, ainsi que les coûts nouveaux liés au démantèlement des équipements ou aux réglementations environnementales qui viennent mettre sous tension l'équilibre des ressources et des besoins.
En conclusion, le général Jean-Louis Georgelin a rappelé que la réforme demandée aux armées représente un effort considérable. Elle lui apparaît sans commune mesure avec ce que connaissent les autres ministères. Cette réforme a été lancée à partir de principes qui ont présidé aux arbitrages de la loi de programmation 2009-2014. Pour assurer l'équilibre financier de celle-ci et permettre la tenue de ses objectifs, il est indispensable que les ressources budgétaires soient effectivement disponibles et que les recettes exceptionnelles prévues au titre du projet de loi de finances 2010 soient au rendez-vous ou que, à défaut, elles soient compensées.
La réalisation de la profonde transformation de l'outil de défense française se poursuit sur fond d'engagement des forces dans des opérations difficiles, notamment en Afghanistan. Cet engagement de nos soldats constitue la finalité des armées, la raison d'être du ministère et de ce budget.
A l'issue de l'exposé du général Jean-Louis Georgelin, M. Josselin de Rohan, président, a rappelé que lui-même et deux de ses collègues, MM. Jean-Pierre Chevènement et Didier Boulaud, avaient eu l'occasion de vérifier, lors d'un récent déplacement sur le théâtre afghan, dans la zone de Nijrab, combien les soldats français remplissaient leurs tâches avec dévouement, rigueur et compétence.
Par ailleurs, il a souhaité savoir si la France pourvoyait au niveau prévu les postes qui lui revenaient désormais dans la structure de commandement de l'OTAN, en particulier les postes d'officiers généraux. Il a estimé que cette structure de commandement, aujourd'hui très lourde, devait être allégée et a insisté pour que la France agisse en faveur de sa rationalisation. Il a également demandé si l'état-major des armées contribuait aux réflexions sur le concept stratégique de l'OTAN.