Premier des trois programmes qui composent la mission, le programme 169, « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » en absorbe 92 % des crédits. Mettant en oeuvre les mesures de réparation et de solidarité, il retrace les subventions versées aux deux opérateurs du ministère, l'office national des anciens combattants (Onac) et l'institution nationale des invalides (Ini). Le programme 167, « Liens entre la Nation et son armée », qui représente 4 % des crédits, ne concerne les anciens combattants qu'au titre de la politique de mémoire. Avec 3,5 % de l'enveloppe, le programme 158 rassemble les dispositifs d'indemnisation des victimes de spoliations et des orphelins de victimes de persécutions antisémites ou d'actes de barbarie commis pendant la Seconde Guerre mondiale.
La dotation affectée au paiement des retraites du combattant est pratiquement stabilisée (- 0,75 %) malgré les 60 000 sorties attendues, ce qui permet de financer à hauteur de 2 millions supplémentaires les augmentations du point d'indice intervenues en 2010 et l'extension en année pleine de la majoration de deux points intervenue au 1er juillet dernier (27,9 millions). Une dynamique vertueuse a été engagée depuis 2006 pour atteindre les 48 points, soit l'équivalent d'une pension indemnisant une invalidité de 10 %, d'ici à la fin de la législature. Inchangé depuis 1978, l'indice est passé progressivement de 33 à 43 points, soit une hausse de près de 138 euros par pensionné et par an pour un effort budgétaire sans précédent de 184,5 millions, soit 23 % du volume des pensions servies en 2010.
Les arbitrages budgétaires n'ont pas permis d'inscrire dans le projet initial une nouvelle hausse de la retraite du combattant. En seconde délibération, le Gouvernement est revenu sur les amendements adoptés contre son avis à l'Assemblée nationale qui prévoyaient une nouvelle majoration de deux points au motif qu'ils auraient mis en péril la Journée défense et citoyenneté, mais il a annoncé son intention d'octroyer un point supplémentaire au 1er juillet prochain, pour une dépense de 4,7 millions en 2011 et de 18,4 millions en année pleine. J'attends la concrétisation de cette annonce au Sénat et note que, pour une fois, les avancées ne se feront pas à l'Assemblée nationale...
Les crédits affectés aux pensions militaires d'invalidité atteignent 1,7 milliard ; leur contraction (- 4,4 %) est en ligne avec la baisse prévisionnelle du nombre de bénéficiaires (16 000 en 2011) ; un abondement de 4,5 millions répond aux hausses de la valeur du point, le ratio moyen des pensions versées progressant de 0,5 %.
La baisse de 7,1 % des crédits finançant les droits liés aux pensions d'invalidité (199 millions) s'explique non seulement par la démographie, mais encore par la non-reconduction de l'avance de 6,1 millions accordée l'an dernier à la caisse nationale militaire de sécurité sociale pour la reprise d'activité opérée dans le cadre de la réforme du ministère. Seul un tiers des bénéficiaires potentiels recourent à l'enveloppe « soins médicaux », qui, comme l'enveloppe « appareillage », intègre la hausse continue des coûts de santé tandis que les réductions dans les transports s'ajustent aux consommations constatées.
Malgré leur niveau (430 millions), les dépenses fiscales en faveur des anciens combattants sont totalement épargnées par le coup de rabot opéré sur les niches fiscales. Elles comprennent pourtant l'exonération d'impôt sur le revenu des sommes perçues au titre des retraites (200 millions), la demi-part supplémentaire accordée aux contribuables de plus de soixante-quinze ans titulaires de la carte du combattant ainsi qu'à leurs veuves (195 millions) et les déductions d'impôt sur le revenu des versements pour la retraite mutualiste (35 millions), qui ont bénéficié en 2009 à 2,9 millions de ménages.
Bien que relevant, d'un strict point de vue budgétaire, du compte d'affectation spéciale « Pensions », l'achèvement du processus de décristallisation des pensions versées aux anciens combattants d'« outre-mer » constitue l'une des mesures emblématiques de cette année. Si j'avais salué les mesures de décristallisation partielle intervenues en 2002 et 2007, j'avais aussi regretté l'an dernier le maintien de différences de traitement injustifiées : ces mesures étaient en effet limitées aux seules prestations du feu, à l'exclusion des pensions civiles et militaires de retraite. La Halde et les juridictions administratives les avaient déjà critiquées ; le Conseil constitutionnel les a abrogées, comme contraires au principe d'égalité à l'occasion de la première mise en oeuvre de la question prioritaire de constitutionnalité. Cependant, comme leur abrogation immédiate aurait paradoxalement réactivé des dispositions encore plus défavorables, le législateur avait jusqu'au 1er janvier 2011 pour intervenir. C'est pourquoi l'article 100 du projet de loi de finances propose une véritable décristallisation intégrale de toutes les pensions, sans considération de lieu de résidence actuel ou passé, ni de nationalité, pour un coût annuel de 150 millions. Conforme au principe d'égalité, le dispositif montera progressivement en charge : l'alignement de la valeur du point sera automatique au 1er janvier quand celui des indices servant au calcul des pensions déjà en paiement nécessitera l'instruction d'un dossier que les intéressés déposeront dans les trois ans. Si la demande expresse se justifie par la nécessité de reconstituer les carrières des pensionnés, il est indispensable que l'information sur la procédure soit largement diffusée. J'y serai vigilante afin que le défaut d'information constaté par le passé ne se reproduise pas.
L'indemnisation des victimes des essais nucléaires fait l'objet d'une nouvelle provision de 10 millions. Visant une réparation intégrale et sans discrimination de nationalité ou de statut, la reconnaissance d'une présomption de causalité entre l'exposition aux essais entre 1960 et 1996 et l'apparition de pathologies radio-induites assure une base satisfaisante aux premières indemnisations qui interviendront d'ici la fin de l'année.
Cette mesure de réparation vient s'ajouter aux dispositifs d'indemnisation du programme 158, en hausse de 18,7 %.