Intervention de Alain Milon

Commission mixte paritaire — Réunion du 12 juillet 2011 : 1ère réunion
Commission mixte paritaire sur la proposition de loi modifiant certaines dispositions de la loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients à la santé et aux territoires

Photo de Alain MilonAlain Milon, rapporteur pour le Sénat :

Je propose, une nouvelle fois, de supprimer cet article qui porte aux droits des patients une atteinte dont la constitutionnalité est plus que douteuse et qui est, en outre, franchement disproportionnée par rapport à son objectif, à savoir débarrasser les établissements de santé de dossiers sous forme papier qu'ils jugent encombrants.

Dans le cadre de la loi HPST, nous avions déjà autorisé d'étendre l'hébergement des données aux dossiers sous forme papier afin de permettre aux établissements de santé d'externaliser leurs archives. Le transfert de ces données requérait donc le consentement exprès des intéressés. L'article 12 propose tout bonnement de réputer ce consentement accordé pour tous les patients dont l'hospitalisation aurait cessé avant l'entrée en vigueur de la proposition de loi, aussi bien pour les données informatiques que pour les dossiers sous forme papier. On se dispenserait du même coup, comme la loi l'impose, de demander leur accord sur les personnes ayant le droit d'accéder à ces données.

Cela constitue une atteinte à une exigence de valeur constitutionnelle et me paraît tout à fait contraire à la directive communautaire relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel. Il est difficile d'admettre que le souci de « vider les armoires » hospitalières l'emporte sur ces considérations, d'autant plus que les établissements de santé n'ont fait aucun effort pour gérer plus rationnellement leurs archives. Ils ne se sont apparemment jamais préoccupés de recueillir le consentement de leurs patients à l'hébergement éventuel de données informatiques, ou de dossiers sous forme papier, et considèrent les intéressés comme introuvables dès la fin de leur hospitalisation.

On constate en outre que la France est, avec l'Italie, un des pays où les documents sous forme papier occupent la place la plus importante dans les dossiers des patients : 70 %, contre 28 % en Suède ou 53 % en Allemagne.

Cette situation est surprenante, alors que, depuis un certain nombre d'années, les données de santé produites à l'hôpital font l'objet d'une saisie informatique et peuvent être stockées sur des supports numériques, tout comme les documents sous forme papier éventuellement transmis aux établissements, qui peuvent être scannés.

Les établissements de santé peuvent par ailleurs transférer et conserver les données concernant leurs patients sur support informatique sans leur consentement, à condition d'en conserver seuls l'accès.

Ils ne sont enfin tenus de conserver sur place les dossiers sous forme papier que pendant vingt ans et peuvent donc, chaque année, déposer en un autre lieu une année d'archives. J'ajoute que tous les professionnels de santé sont tenus aux mêmes obligations et semblent s'en acquitter avec moins de moyens, sans demander périodiquement que la loi soit modifiée ou qu'il soit porté atteinte aux droits de leurs patients pour régler leurs problèmes de rangement.

La mesure proposée paraît donc peu admissible et l'on peut d'ailleurs s'étonner que l'administration de la santé ait demandé au Parlement d'adopter de telles dispositions.

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