Je n'ai pas de certitude. Bien des membres de l'Afssaps font face à des conflits d'intérêts, je crois qu'ils les tranchent dans le sens de l'intérêt général, qu'ils sont honnêtes. J'ai eu moi-même à recevoir des dirigeants des laboratoires Servier qui, sans me parler d'argent, étaient venus me dire que deux nouveaux médicaments devaient être introduits sur le marché, que c'était l'intérêt général... Je n'ai pas accédé à leur demande.
Je crois que les expérimentateurs pharmacologiques ont besoin des industriels pharmaceutiques, et que nous perdrions beaucoup à instaurer un climat de suspicion général, qui conduirait les laboratoires à préférer travailler dans d'autres pays que le nôtre. En revanche, nous progresserons avec un réseau efficace de pharmacovigilance, avec un mécanisme de déclaration obligatoire. L'affaire du Mediator montre que les effets néfastes étaient repérables en cardiologie beaucoup plus que dans la population générale, où ils étaient statistiquement trop faibles pour être repérés par l'Afssaps.
Je crois donc qu'il ne faut pas changer l'architecture de notre système, mais l'assainir et lui donner plus de moyens. Cela passe par un véritable statut de l'expert, avec une rémunération suffisante : j'ai initié le mouvement, en obtenant de Bercy que les chefs de cliniques libéraux qui viennent donner leur avis sur des médicaments, puissent être rémunérés. Il faut aller plus loin, parce que, s'il est toujours plus facile de se reposer sur le privé pour financer l'expertise, je ne crois pas que ce soit la solution la plus saine pour la santé publique.