Intervention de Jean-Pierre Jouyet

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 11 mars 2009 : 1ère réunion
Rémunération des dirigeants sociaux — Recommandations de l'afep et du medef - Audition de M. Jean-Pierre Jouyet président de l'autorité des marchés financiers

Jean-Pierre Jouyet, président de l'autorité des marchés financiers :

a rappelé qu'il ne traiterait que de la rémunération des dirigeants de sociétés cotées et de l'application des recommandations de l'AFEP et du MEDEF en la matière, ce qui excluait du champ de son intervention la rémunération des dirigeants de sociétés aidées financièrement par l'Etat et celle des opérateurs de marché, au sujet de laquelle le haut comité de place, regroupant les acteurs de la place financière de Paris, venait de transmettre des recommandations au ministre de l'économie, des finances et de l'emploi.

Il a souligné que la notion de rémunération devait être comprise dans un sens large, en intégrant les sommes versées aux dirigeants mandataires sociaux tant par leur société que par une société du groupe auquel elle appartient, ainsi que les parts fixe, variable ou exceptionnelle de cette rémunération, lesquelles incluent, en particulier, les options d'achat d'actions (stock-options), les actions de performance, les bons de souscription d'actions, les bons de souscription de parts de créateurs d'entreprises, les avantages en nature, les retraites chapeau et les indemnités de départ.

a précisé que le rôle de l'AMF n'était pas de se substituer aux actionnaires, au conseil d'administration ou au comité d'audit des sociétés cotées pour déterminer le montant et la nature de la rémunération accordée aux dirigeants. Il a estimé que, sur ce plan, le rôle des investisseurs institutionnels était essentiel, soulignant que l'association française de la gestion financière avait recommandé de retenir un horizon de trois à cinq ans pour le calcul de la rémunération variable afin de prendre en compte la stratégie à moyen terme des entreprises et proposé de soumettre à l'assemblée générale des actionnaires l'attribution des options d'achat d'actions.

Il a indiqué que la mission de l'AMF était de vérifier si les sociétés cotées faisaient bien état dans le cadre de leur communication financière, dans des termes clairs, compréhensibles et cohérents pour les marchés et les investisseurs, de l'ensemble des informations relatives à la rémunération de leurs dirigeants et aux avantages de leurs mandataires sociaux. Dans cette mesure l'AMF n'avait donc pas à porter de jugement sur les rémunérations octroyées, son objectif étant de s'assurer de la transparence de l'information communiquée aux marchés afin que les actionnaires soient en mesure de jouer leur rôle.

a souligné que l'AMF s'était intéressée, dès 2002, à la question de l'information à donner sur la rémunération des mandataires sociaux en diffusant une recommandation à cet effet, laquelle avait été actualisée, en décembre 2008, pour intégrer les apports des recommandations établies par l'AFEP et le MEDEF en octobre 2008. Il a indiqué que l'AMF publierait, en juillet 2009, un rapport spécifique sur la mise en oeuvre de ces recommandations.

Il a rappelé que l'AMF publiait également depuis 2004 un rapport annuel sur le contrôle interne et le gouvernement d'entreprise contenant une synthèse analytique des informations données par les émetteurs sur les rémunérations de leurs dirigeants.

Il a souligné que l'AMF avait également lancé, en décembre 2006, une enquête sur un échantillon de sociétés afin d'examiner la qualité de leurs observations financières sur la question des rémunérations, qui avait relevé un certain nombre d'insuffisances en la matière, telles que des défauts de mentions des critères pris en compte pour fixer les rémunérations, des informations peu exhaustives ou l'absence de provisionnement d'engagement pris en faveur des dirigeants.

a précisé que l'AMF exigeait des sociétés cotées qu'elles communiquent les principes de détermination des rémunérations de leurs dirigeants, que les statuts de mandataire social et de salarié soient séparés, que le montant des indemnités de départ soit limité, que les régimes de retraite supplémentaire fassent l'objet d'un encadrement renforcé, que des règles soient fixées pour les options d'achats ou les souscriptions d'actions ainsi que pour la distribution d'actions de performance et que des mécanismes de suivi soient institués. Il a ajouté qu'à cet effet l'AMF proposait des règles de présentation spécifiques.

Il a indiqué que, à ce jour, 340 sociétés sur les 594 sociétés cotées sur Euronext, représentant 94 % de la capitalisation boursière, avaient publié un communiqué précisant la position de leur conseil d'administration vis-à-vis des recommandations de l'AFEP et du MEDEF.

a souligné qu'une analyse complète du respect par les sociétés cotées des engagements pris au titre des recommandations de l'AFEP et du MEDEF ne pouvait pas encore être établie mais qu'elle serait l'objet du rapport de l'AMF de juillet 2009.

Il a rappelé que l'AMF serait particulièrement vigilante sur le fait que les sociétés apportent des explications précises quant à leur non-application éventuelle de certaines recommandations de l'AFEP et du MEDEF, dès lors que la loi du 3 juillet 2008 avait introduit dans la législation française la règle anglo-saxonne « comply ou explain ».

Il a estimé que ces explications porteraient vraisemblablement sur la règle du non-cumul entre un mandat social et un contrat de travail, dans la mesure où sa mise en oeuvre pouvait s'avérer complexe pour les petites et moyennes entreprises ou encore dans les situations où un salarié ayant fait une longue carrière dans la société se voit proposer un mandat social. Il lui a semblé que, dans le cadre des petites et moyennes entreprises, cette recommandation devait être appliquée dans un souci de proportionnalité.

Il a souligné que les critères de performance retenus par les sociétés devraient être suffisamment explicites. L'AMF serait vigilante dans les prochaines années, notamment pour s'assurer du respect de recommandations ne pouvant être appliquées que progressivement dans le temps, à l'instar de celle du non-cumul d'un contrat de travail et d'un mandat social.

a souligné que l'effort de transparence de la France s'inscrivait dans un contexte international marqué par cette problématique, que la France abordait en bonne place. Il a estimé que cette question serait traitée dans le cadre de la réunion prochaine du G20, au titre de la gouvernance et de la lutte contre les excès. Il a néanmoins souligné la difficulté de trouver des règles communes à plusieurs pays, alors même que des nationalisations d'ampleur sont engagées dans les entreprises anglo-saxones.

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