a rappelé que l'ASN est une autorité administrative indépendante, qui fait partie de l'Etat mais ne reçoit pas d'instructions de la part du Gouvernement, et qui rend des comptes au Parlement. Sa mission est double :
- d'une part, elle assure au nom de l'Etat le contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection pour protéger les travailleurs, les patients, le public et l'environnement des risques liés à l'utilisation du nucléaire. A ce titre, elle contrôle 150 grandes installations, qui sont des centrales nucléaires, des usines de retraitement, ou des sites du Commissariat à l'Energie Atomique (CEA), ainsi qu'une multitude de sources radioactives, notamment les appareils de radiothérapie au contrôle desquels l'ASN consacre une attention particulière ;
- d'autre part, elle contribue à l'information des citoyens, en observant une politique de transparence qui la conduit à publier systématiquement ses positions importantes. Ainsi, les lettres de suite des 2000 inspections réalisées chaque année sont toutes publiées sur le site Internet de l'ASN.
a ensuite observé que le contrôle de la sûreté du projet d'EPR par l'ASN est une procédure ancienne, qui a débuté en 1993 par la définition par les autorités de sûreté française et allemande des objectifs de sûreté de l'EPR. Elle s'est poursuivie en 1997 par une position de ces deux autorités sur l'avant-projet ; en 2000 par l'adoption par le Groupe Permanent Réacteurs (GPR) des directives techniques ; en 2004 par la prise de position de l'ASN ; et enfin en 2007 par l'avis de l'ASN sur l'autorisation de création de l'EPR de Flamanville. La prochaine échéance sera l'autorisation de mise en service, en vue de laquelle l'ASN a examiné certains sujets, tels que le dispositif de contrôle-commande.
L'intervenant a indiqué que l'examen de la sûreté de l'EPR obéit à un processus itératif, les industriels proposant des solutions et l'ASN prenant position sur ces propositions. Les positions de l'ASN peuvent naturellement conduire à des évolutions de conception. Un tel dialogue technique approfondi permet à l'ASN de renforcer les choix de sûreté, et sa lettre sur le contrôle-commande n'est qu'une étape de ce processus itératif.
a souligné que ce processus d'examen présente un caractère fondamentalement international. Jusqu'en 1998, il s'agissait d'un processus franco-allemand, avec des évaluations communes aux deux autorités de sûreté nucléaire, des avis conjoints des groupes d'experts et des lettres de position cosignées par les deux autorités. Cette coopération s'est distendue après l'abandon de l'option nucléaire par l'Allemagne en 1998, à la suite du changement de la coalition gouvernementale. A partir de 2005, une coopération s'est engagée avec la Finlande, à la suite de la décision de ce pays d'acquérir un EPR, qui a été étendue au Royaume-Uni. Des experts britanniques et finlandais participent ainsi au GPR. Enfin, une initiative franco-américaine vise à mettre en commun les résultats des évaluations de sûreté, pour parvenir à des positions les plus harmonisées possible. C'est pourquoi la position de l'ASN sur le système de contrôle-commande est parfaitement cohérente avec celle de ses homologues étrangères.
S'agissant du dispositif de contrôle-commande de l'EPR, il se compose d'un niveau de base, où se trouvent les capteurs, d'un niveau supérieur, où se trouve la salle de commande réunissant les moyens de conduite principaux et les moyens de conduite de secours, ainsi que d'un niveau intermédiaire, où se trouvent deux plateformes, l'une « classique » et l'autre spécifiquement nucléaire. La question essentielle est de savoir si ces deux plateformes sont suffisamment sûres prises séparément, et suffisamment indépendantes l'une de l'autre pour continuer de fonctionner en cas de défaillance de l'une d'entre elles. Il s'agit de systèmes informatiques programmés extrêmement complexes.
a rappelé que la mise en place du dispositif de contrôle-commande avait été difficile pour la génération précédente de réacteurs. En effet, ce dispositif utilise des systèmes de l'industrie « classique », dont la pertinence pour une utilisation nucléaire doit être démontrée. La démonstration de sûreté à laquelle EDF va devoir se livrer pour l'EPR sera forcément complexe. Quant aux étapes de l'évaluation du dispositif de contrôle-commande, elles ont été jusqu'à présent les suivantes :
- en mars 2007, l'ASN a rendu son avis sur l'autorisation de création, selon lequel un dispositif de contrôle-commande numérique pour l'EPR était acceptable dans son principe ;
- en février 2008, l'ASN a adressé à EDF une lettre d'alerte sur la conception détaillée envisagée, selon laquelle EDF prenait un « risque industriel » en s'engageant dans une option qui pourrait ne pas être finalement validée ;
- en juin 2009, le GPR a rendu son avis sur la base d'une analyse de l'IRSN ;
- en octobre 2009, l'ASN a adressé à EDF une lettre qui relève la complexité de la conception proposée et démontre que son caractère faisable n'est pas acquis. Des positions similaires des autorités de contrôle finlandaise et britannique ont été communiquées à AREVA.
En conclusion de son exposé, M. André-Claude Lacoste a estimé que la position de l'ASN sur le dispositif de contrôle-commande de l'EPR, cohérente avec celle de ses homologues étrangères, résulte de la difficulté pour EDF et AREVA de produire, jusqu'à présent, les éléments en démontrant la sûreté. Il a considéré que le fait d'avoir rendu publique cette position s'inscrit totalement dans la démarche voulue par la loi du 13 juin 2006 sur la transparence et la sûreté en matière nucléaire. Il a observé que le jour même où cette position était rendue publique, l'autorité de sûreté américaine a adressé une lettre à l'entreprise Westinghouse pour la mettre en garde contre certaines failles de sûreté du réacteur AP 1000, notamment en matière de résistance aux tremblements de terre. M. André-Claude Lacoste a affirmé que l'ASN pourra se prononcer de façon conclusive, et publiquement, sur le caractère acceptable d'une solution de contrôle-commande lorsqu'EDF aura produit les éléments demandés avec l'appui d'AREVA. Il a estimé ce dialogue technique « musclé » nécessaire pour assurer la sûreté de l'EPR.