a tout d'abord rappelé que le projet de loi instituait un élu unique, le conseiller territorial, appelé à siéger à la fois au conseil général et au conseil régional : 80 % des sièges seraient pourvus au scrutin uninominal à un tour et 20 % au scrutin de liste, à la proportionnelle au plus fort reste.
Puis il s'est interrogé sur la compatibilité de ce dispositif avec l'article premier de la Constitution selon lequel « la loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives ».
Il a alors indiqué qu'on recensait aujourd'hui 1 880 conseillers régionaux dont 47,6 % de femmes, soit 896 élues, grâce au recours à un scrutin de liste incorporant un mécanisme imposant l'alternance, dans la présentation des listes, de candidats de sexes opposés. Il a rappelé, en revanche, que les femmes ne représentaient que moins de 13 % des élus aux élections cantonales qui se tiennent au scrutin uninominal à deux tours.
a souligné que, selon les calculs de l'Observatoire de la parité, la mise en application du dispositif prévu par le projet de loi se traduirait par une proportion de 20 % de femmes élues dans les nouveaux conseils, soit environ 600 élues sur un total de 3000 conseillers territoriaux. Il en a déduit que, par rapport à la situation actuelle des conseils régionaux, le projet de loi « défavorisait » en quelque sorte l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux puisqu'il aurait pour effet de diminuer de près de 300 l'effectif des femmes élues à l'échelon régional et que, à ce titre, il serait contraire aux dispositions de l'article premier de la Constitution.
Il a cependant observé qu'il convenait de prendre en considération le fait que le projet de loi comporte également des mesures de renforcement de la démocratie locale favorables à la parité et notamment celles qui prévoient l'extension du scrutin de liste proportionnel, aujourd'hui appliqué aux communes de plus de 3 500 habitants, à celles dont la population est comprise entre 500 à 3 499 habitants. 13 150 communes, au total, seraient dès lors concernées par ce scrutin, ce qui amènerait, selon les projections, 29 876 conseillères municipales supplémentaires (88 895 contre 59 019 à l'heure actuelle).
Il a ajouté que cette amélioration de la parité dans les conseils municipaux allait mécaniquement accroitre celle des conseils communautaires, qui demeurent à l'heure actuelle insuffisamment paritaires.
s'est alors demandé si, lorsqu'il aurait à statuer sur la conformité de ce projet de loi à la Constitution, le Conseil constitutionnel prendrait en considération l'augmentation globale du nombre de femmes élues qui en résulterait, ou s'il estimerait plutôt que le « retour en arrière » au niveau régional justifiait une décision d'incompatibilité.
a observé, à cet égard, que l'augmentation du nombre global de femmes élues, qui pourrait résulter de l'application du projet de loi, était purement quantitative alors que le Conseil constitutionnel se montrait aussi attentif à la dimension qualitative, dans la mesure où les mandats de conseiller municipal et de conseiller régional présentent, en effet, une différence de nature. A l'appui de sa démonstration, il a évoqué la jurisprudence du Conseil constitutionnel relative à l'Assemblée de Corse, qui, insistant sur la nécessité de respecter de la même façon le principe de parité dans des assemblées similaires, a comparé l'Assemblée de Corse aux conseils régionaux à travers l'analyse de leurs compétences, de leur statut et de leur organisation respectifs. Transposant ce raisonnement, M. Jacques Bourdon a estimé que les nouvelles assemblées prévues dans le projet de réforme territoriale s'apparentaient « à 90 % », aux conseils régionaux actuels. Il a souligné, a contrario, la différence de nature qui sépare le mandat de conseiller municipal dans une petite commune et celui de conseiller régional.
Puis il a insisté sur la « brutalité » du mode de scrutin uninominal à un tour retenu par le projet de loi, craignant qu'il ne se traduise par une remise en cause de la légitimité de certains élus, liée aux conditions de leur désignation.
Il s'est déclaré assez réservé à l'égard du mode de scrutin mixte retenu par le projet de loi, majoritaire pour l'essentiel, mais doublé d'une dose significative de représentation proportionnelle, dont le Gouvernement veut voir un précédent dans le système défendu dans une proposition de loi déposée par Léon Blum le 8 février 1926, puis par le député socialiste Étienne Weill-Raynal sous la IVème République.
Il a estimé que le dispositif proposé ne présentait pas les mêmes garanties de clarté que le système électoral qui s'applique en Allemagne pour les élections législatives, depuis 1949, et dans lequel l'électeur émet deux votes sur un même bulletin : l'un pour un candidat et l'autre pour un parti.
Il a souligné que, dans le système allemand, tous les suffrages étaient pris en compte tandis que le dispositif prévu par le projet de loi soumis au Parlement français ne prenait pas également en compte tous les suffrages exprimés. Il a rappelé que, dans le système proposé, ne seraient prises en compte ni les voix qui se seront portées sur un candidat qui aura effectivement été élu, ni les voix obtenues par un candidat non élu mais qui ne se serait pas préalablement rattaché à la liste d'un parti. Il a d'ailleurs relevé que, d'après les informations disponibles, le Conseil d'Etat aurait considéré que ce dispositif ne respectait pas l'égalité des suffrages.