En réponse à ces questions, M. Jean-Louis Chaussade, directeur général adjoint de Suez en charge de Suez Environnement, a apporté les précisions suivantes :
- le producteur dont la responsabilité doit être élargie est bien le consommateur ;
- l'expérience allemande démontre qu'une REP excessive, faisant porter l'essentiel des coûts sur le consommateur, peut conduire à des comportements d'évitement affectant le fonctionnement même du dispositif, alors que l'absence de toute imposition spécifique à la « production » de déchets déresponsabilise les acteurs ; il faut rechercher une répartition équitable des coûts qui en fasse peser une part raisonnable sur les « producteurs », sachant que les difficultés techniques pour élaborer un tel dispositif de suivi individuel sont très grandes ;
- dans le débat sur la taxation des incinérateurs et celle des décharges, il convient d'inciter toute la chaîne à trier en instituant des taxes différentielles selon le niveau de tri, la plus lourde taxation s'appliquant sur les déchets non triés, quel que soit leur mode d'élimination ;
- la valorisation peut être, successivement, « matière », agricole puis énergétique, cette dernière couvrant la production de biogaz dans les décharges et d'électricité et/ou de chaleur dans les incinérateurs (les 56 incinérateurs gérés par Suez Environnement produisent ainsi annuellement 350 MW électriques et 850 MW de chaleur, soit environ autant qu'une tranche nucléaire) ; le débat du Grenelle sur l'incinération n'est pas achevé car, au regard des normes de sécurité aujourd'hui mises en oeuvre dans les équipements, les « grandes peurs » n'ont plus lieu d'être, les dioxines libérées par une installation étant inférieures à celles émises par un feu de cheminée ;
- les marges nettes de Suez Environnement sont inférieures à 5 ou 6 % par an et son effort de recherche, significatif : au-delà de la difficulté à calculer le ratio de recherche-développement au regard des capitaux engagés, qui s'élèvent à 8,3 milliards d'euros, le dispositif de R&D s'appuie sur 400 chercheurs en France et, surtout, sur des alliances avec d'autres opérateurs, en France ou à l'étranger, qui démultiplient les effets de levier ; la période est propice aux ruptures technologiques, notamment pour améliorer le mode de consommation durable de l'eau ou de l'électricité (compteurs « intelligents ») et il est indispensable de poursuivre les efforts de R&D ;
- Suez Environnement est favorable à la concurrence sur le terrain, qui est nécessaire pour les entreprises parce qu'elle constitue un aiguillon technologique et commercial et permet de répondre au mieux aux attentes des consommateurs ; M. Jean-Louis Chaussade avait d'ailleurs en son temps exprimé son opposition à la fusion de Suez Environnement avec son principal concurrent, l'existence d'un « grand champion national » ne lui paraissant pas du tout favorable aux intérêts des clients français, notamment les collectivités territoriales ;
- le développement des PPP est effectivement indispensable dans une période de restriction de l'argent public et de besoins croissants d'investissements ;
- s'agissant du prix de l'eau et du coût de son assainissement, il est nécessaire de comprendre que la diminution de la consommation urbaine ne conduira pas à une réduction des prix, dans la mesure où l'essentiel des charges sont des coûts fixes : usine de traitement, réseaux d'adduction, personnels ;
- outre que la France ne manque pas d'eau, et en tout cas d'eau potable, et que, sous réserve de quelques lieux particuliers, elle ne court pas ce risque avant longtemps, il convient de retenir que seulement 15 % environ de la consommation résulte de la demande humaine, 15 % de l'activité industrielle, et le solde, soit 70 %, de l'activité agricole : dès lors, la question de l'usage quantitatif de l'eau est une problématique essentiellement agricole ; pour autant, la responsabilité n'en incombe pas exclusivement aux exploitants agricoles, même si le recours à des techniques d'irrigation plus économes en eau pourrait être développé, par exemple pour la culture du maïs dans le Sud-Ouest de la France ;
- le traitement des boues passe en effet de moins en moins par l'épandage ; le compostage semble constituer la meilleure solution car il s'agit d'un produit élaboré et traçable, qui peut être retiré du marché en cas de problème écologique (par exemple, la présence excessive de métaux lourds) ; le séchage et l'incinération nécessitent de lourds investissements techniques ;
- Suez est actionnaire à 100 % de la Lyonnaise des eaux ;
- le taux de progression de la production annuelle d'ordures ménagères, de l'ordre de 1,5 %, est légèrement inférieur à celui de la croissance économique ; la question des déchets domestiques est relativement résiduelle dans la problématiques des déchets, les ordures ménagères ne représentant que 30 millions de tonnes (MT) par an, alors que les déchets industriels s'élèvent à 90 MT, les déchets du bâtiment à 350 MT et les autres types de déchets également à 350 MT ; le recyclage des matériaux est essentiel dans les secteurs marchands, par exemple pour les industries aéronautique (300 Airbus vont prochainement arriver en fin d'exploitation), navale (les bâtiments de guerre de la Marine) ou automobile (un million de véhicules obsolètes à traiter) et il ne peut être efficace que s'il est mis en oeuvre de manière très « fine », allant jusqu'à une séparation très minutieuse des produits et matériaux ;
- la répartition entre délégations de service public et régies est globalement stable : dans la distribution de l'eau, elle est de l'ordre de trois quarts contre un quart et dans l'assainissement, la répartition est 50-50 ;
- Suez Environnement est fondamentalement opposé à la contestation systématique des marchés publics, préjudiciable à tous les acteurs en raison de l'instabilité juridique et des retards dans les travaux qu'elle induit : aussi les recours intentés par l'entreprise sont extrêmement peu nombreux, de l'ordre d'un par an en moyenne ;
- l'automatisation du tri est une technologie qui s'améliore régulièrement mais, comme en témoigne l'exemple des bouteilles d'eau minérale, dont les matières et les couleurs sont très différenciées, les difficultés techniques et pratiques restent extrêmement nombreuses.