Intervention de Josselin de Rohan

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 8 juillet 2008 : 1ère réunion
Union européenne — Présidence française - déplacement à bruxelles - communication

Photo de Josselin de RohanJosselin de Rohan, président :

a indiqué que son déplacement à Bruxelles, le 23 juin dernier, visait à faire le point, à la veille de la présidence française de l'Union européenne, sur la ratification du traité de Lisbonne et les principaux dossiers européens, en particulier en matière de politique étrangère et de défense. Il a précisé qu'il avait notamment rencontré M. Javier Solana, Haut représentant pour la politique étrangère et de sécurité commune, M. Pierre Sellal, représentant permanent de la France auprès de l'Union européenne, Mme Christine Roger, représentant permanent de la France auprès du Comité politique et de sécurité, le général Henri Bentegeat, président du Comité militaire de l'Union européenne, M. Robert Cooper, directeur général des affaires politico-militaires au Secrétariat général du Conseil et M. Eneko Landaburu, directeur général des relations extérieures à la Commission européenne.

a tout d'abord évoqué les conséquences du « non » irlandais sur la ratification du traité de Lisbonne.

S'il est aujourd'hui acquis que le traité ne pourra entrer en vigueur au 1er janvier 2009, il reste à savoir si une telle entrée en vigueur pourra intervenir avant les élections européennes de juin 2009 et le renouvellement de la Commission européenne prévu à l'automne de la même année. Dans la négative, ces deux échéances se dérouleraient sous l'empire des dispositions prévues par le traité de Nice. Celui-ci prévoit une réduction de l'effectif du Parlement européen, la France disposant de 72 représentants contre 78 actuellement et 74 prévus par le traité de Lisbonne, ainsi qu'une réduction du nombre de membres de la Commission, nombre qui devra néanmoins être décidé par le Conseil statuant à l'unanimité.

En tout état de cause, la présidence française n'aura pas à diriger les travaux préparatoires de la mise en place des principales innovations du traité de Lisbonne, comme le service européen pour l'action extérieure, ni à préparer la désignation des personnalités destinées à occuper les postes de Président du Conseil européen, de Haut représentant pour les affaires étrangères et de Président de la Commission européenne, ce qui n'est pas nécessairement un désavantage.

Lors du Conseil européen, des 19 et 20 juin, les chefs d'Etat et de gouvernement sont convenus de discuter à nouveau des conséquences du « non » irlandais au traité de Lisbonne lors du Conseil européen du 15 octobre. Ils ont appelé à la poursuite du processus de ratification dans les Etats qui ne se sont pas encore prononcés. A ce jour, le traité a été ratifié par dix-neuf Etats sur vingt-sept, deux ratifications, celles du Royaume-Uni et de la République de Chypre, étant intervenues postérieurement au référendum irlandais. D'autres pays, comme la Belgique ou la Suède, devraient également procéder à la ratification. En Allemagne, la ratification, autorisée à une très large majorité par le Bundestag et le Bundesrat, a été suspendue par le Président de la République fédérale dans l'attente de la décision de la Cour constitutionnelle.

En revanche, en Pologne, le Président de la République a refusé récemment de ratifier le traité, en invoquant le résultat négatif du référendum en Irlande, alors que le Parlement avait soutenu à une très large majorité cette ratification, la question devenant désormais un enjeu de l'affrontement politique entre le Président de la République et le Premier ministre. La situation est comparable en République tchèque, où le sort du traité est tributaire de la cohabitation difficile entre le Président de la République, eurosceptique, M. Vaclav Klaus, et le Premier ministre, M. Topolanek. Le courant eurosceptique y trouve plus d'écho dans l'opinion qu'en Pologne, la perspective de la présidence tchèque au premier semestre 2009 constituant également un élément du débat.

S'agissant de l'Irlande, l'hypothèse privilégiée à Bruxelles consiste à négocier un régime dérogatoire, par un protocole ou une déclaration, qui rappellerait par exemple le statut de neutralité de ce pays, et à soumettre le traité à un nouveau référendum. Cette solution avait déjà été utilisée pour le traité de Nice, qui, après un vote initial négatif, avait donné lieu à un second référendum positif. Toutefois, le premier vote de rejet n'avait pas été aussi net et il est difficile de déterminer les domaines dans lesquels l'Irlande pourrait se voir proposer un régime dérogatoire, puisqu'elle bénéficie déjà de nombreuses exceptions. Enfin, l'évolution de l'électorat irlandais supposerait qu'il soit sensible à la pression qu'exerceraient une ratification par tous les autres pays et le risque d'isolement, voire de sortie de l'Union européenne, qu'entraînerait un second vote négatif.

a ensuite abordé les principaux dossiers à examiner au cours de la présidence française de l'Union européenne.

La plupart d'entre eux ne devraient pas être affectés par le « non » irlandais sur le traité de Lisbonne, notamment sur l'énergie et le climat, sur le pacte européen pour l'immigration et l'asile ou encore sur la sécurité alimentaire et le bilan de santé de la PAC. Il en va de même en matière de politique étrangère, qu'il s'agisse du lancement de l' « Union pour la Méditerranée », qui ne suscite plus d'opposition à Bruxelles, dès lors que ce projet s'inscrit dans le cadre du processus de Barcelone, des Sommets avec les pays tiers, en particulier avec la Russie ou l'Ukraine, ou encore de l'attention qui sera portée à la région des Balkans occidentaux, et notamment à la mise en place de l'opération de l'Union européenne au Kosovo.

Bien que la question de la neutralité irlandaise ait certainement joué un rôle dans le « non » de l'Irlande au traité de Lisbonne, la relance de l'Europe de la défense demeurera une priorité forte de la présidence française. Seule devrait être affectée la préparation de la mise en place des « coopérations structurées permanentes » prévues par le traité de Lisbonne.

Les autres priorités de la France en matière de défense européenne seront maintenues, qu'il s'agisse de la révision de la stratégie européenne de sécurité, confiée au Haut représentant pour la politique étrangère et de sécurité, M. Javier Solana, des projets de mutualisation d'équipements, du renforcement de l'Agence européenne de défense ou des actions communes en matière de formation.

En revanche, le renforcement des capacités de planification et de conduite des opérations de l'Union européenne continue de susciter une ferme opposition du Royaume-Uni, en dépit d'un constat largement partagé par les responsables militaires, au vu d'opérations comme celle du Tchad, sur la nécessité de doter l'Union européenne d'un véritable « quartier général européen ». Le refus de toute duplication avec les capacités de l'OTAN reste le principal argument avancé par les Britanniques.

Dans ce contexte, la perspective d'une participation pleine et entière de la France à la quasi-totalité des structures de l'Alliance atlantique apparaît aux yeux de beaucoup de nos partenaires comme le témoignage de notre volonté de ne pas faire de l'Europe de la défense un substitut à l'OTAN, ce qui pourrait contribuer à lever certaines de leurs réticences face au développement de la politique européenne de sécurité et de défense.

a conclu en estimant qu'en dépit des difficultés auxquelles se heurte le traité de Lisbonne, la France disposait de nombreux atouts pour faire de sa présidence de l'Union un succès et pour rapprocher l'Europe des citoyens.

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