Intervention de Jean-Jacques Hyest

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 5 novembre 2008 : 1ère réunion
Application des lois — Bilan au 30 septembre 2008 - communication

Photo de Jean-Jacques HyestJean-Jacques Hyest, président :

Puis M. Jean-Jacques Hyest, président, a dressé le bilan annuel de l'application des lois au 30 septembre 2008.

Il a d'abord souligné l'importance du contrôle parlementaire, tant au niveau de l'application de la loi que de l'évaluation de ses effets dans le temps. Avant de présenter le bilan annuel de l'application des lois votées au cours des sessions précédentes comme de la session qui vient de s'achever, il a rappelé que les statistiques effectuées prenaient uniquement en compte les mesures réglementaires prévues par une disposition législative.

s'est d'abord félicité de la sensible amélioration du bilan de l'application des lois cette année. Malgré un nombre croissant de lois votées - 22 lois, examinées au fond par la commission des lois, ont été promulguées au cours de la session 2007-2008, contre 18 l'an passé - la baisse du taux des lois non appliquées au cours de leur session d'adoption se confirme très nettement : ce taux était de 30,76 % il y a deux ans, puis de 22,22 % l'année dernière pour tomber aujourd'hui à 18,20 %. Cette baisse est favorisée par le taux des lois d'application directe, qui était de 33,33 % l'année dernière et augmente légèrement (36,40 %).

Il a précisé que parmi les 22 lois promulguées, 8 étaient d'application directe, 2 sont devenues applicables au cours de la session, 8 sont partiellement applicables et 4 n'ont encore fait l'objet d'aucune des mesures d'application prévues. Toutefois, les lois entièrement applicables - c'est-à-dire d'application directe ou appliquées à 100 % - représentent cette année encore moins de la moitié des lois votées au cours de la session : 10 lois sur 22, soit 45,45 % (44,44 % l'année précédente).

Il a justifié les taux d'application moyennement satisfaisants des lois partiellement applicables (compris entre 10 % et 80 %, avec une moyenne de 43,38 %) par le fait que plusieurs lois ont été adoptées en fin d'exercice, ceci expliquant qu'elles ne soient que très faiblement applicables au 30 septembre. Cela n'occulte pas l'amélioration significative du nombre des mesures prises : 25 mesures d'application ont été prises pour l'application des lois votées au cours de la session, soit un taux d'application de 30 % par rapport aux 84 mesures attendues, contre 23,17 % l'an passé.

a souligné la baisse continue du nombre de mesures d'application prises au cours de la session sur des textes antérieurs (98, contre 109 et 138 les deux années précédentes), cette baisse s'expliquant par la résorption régulière du stock des mesures en attente concernant les lois de la XIIe législature. Ces 98 mesures d'application ont eu des effets notables sur de nombreuses lois adoptées antérieurement à la présente session : ainsi, 2 lois votées en 2007 sont désormais entièrement applicables : la loi de simplification du droit et celle tendant à renforcer l'équilibre de la procédure pénale. En outre, 2 lois sont devenues partiellement applicables au cours de la session. Il s'agit des lois de 2007 relative à la fonction publique territoriale et portant réforme de la protection juridique des majeurs.

a rappelé que six lois votées sous la XIe législature ne sont pas totalement applicables, dans des proportions variables, bien que certaines aient fait l'objet de mesures d'application. 2 lois ont fait l'objet de mesures jusqu'à présent en attente : le taux d'application de la loi de 2001 relative à Mayotte est ainsi passé de 73 % à 79 %, et celui de la loi de 2002 relative à la démocratie de proximité de 83 % à 93 %, soit une augmentation qui la rend quasiment totalement applicable.

s'est déclaré satisfait des taux très honorables des lois encore partiellement applicables votées sous la XIIe législature, avec une moyenne de 77,12 %. 16 lois sont aujourd'hui seulement partiellement applicables : 8 lois ont vu leur taux d'application s'améliorer de façon substantielle, mais 8 lois n'ont fait l'objet d'aucune mesure d'application pendant la session.

Il a ensuite souligné le ralentissement substantiel du recours à la procédure d'urgence (5 lois sur 22 -22,7 %- soit une baisse importante par rapport au taux de la session précédente - 38,9 %) ainsi que la nette amélioration de leur application, dont le taux (43 %) est nettement supérieur à celui de l'année précédente (11,7 %).

a constaté l'accroissement du nombre de textes d'origine parlementaire : 7 lois d'origine parlementaire examinées au fond par la commission des lois ont été promulguées, soit un taux de 31,8 %, soit presque deux fois plus que l'année précédente où le taux était de 16,6 % (3 lois sur 18). Il a précisé que contrairement à la session précédente où les trois textes d'origine parlementaire étaient des propositions de loi sénatoriales, six des sept lois sont originaires de l'Assemblée nationale cette année. Il a rappelé toutefois que certaines propositions de loi d'origine sénatoriale examinées par la commission des lois demeurent en discussion. Tel est le cas de la proposition de loi n° 111 (2005-2006) relative à la législation funéraire.

Après ce bilan statistique, M. Jean-Jacques Hyest, président, a souhaité souligné quelques exemples intéressants d'application apparus à l'occasion de ce suivi annuel.

Evoquant le volet « sécurité et sécurité civile », il a signalé que la loi du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, pour laquelle deux dispositions étaient toujours inapplicables, avait fait l'objet d'un décret très important, publié le 26 octobre 2007 et relatif aux demandes de mise à disposition de données par voie électronique et modifiant le code de procédure pénale.

Concernant la loi n° 2004-811 du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile, il a rappelé que les principales innovations de ce texte sont aujourd'hui totalement applicables, seul un décret d'application prévu n'ayant pas encore été publié.

Sur le volet « immigration », M. Jean-Jacques Hyest, président, a indiqué que la disposition sur le regroupement familial figurant aux articles 2 et 3 de la loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile, avait fait l'objet d'un décret daté du 27 juin 2008. Après avoir rappelé les conditions permettant le regroupement familial, il a précisé que ce décret dispose que les ressources stables du demandeur seront appréciées par référence au SMIC et considérées comme suffisantes lorsqu'elles atteignent le SMIC pour une famille de deux ou trois personnes ; le SMIC majoré d'un dixième pour une famille de quatre ou cinq personnes ; le SMIC majoré d'un cinquième, soit 1,2 SMIC, pour une famille de six personnes ou plus. Il a relevé qu'une modulation avait ainsi été instaurée pour les familles de moins de six personnes.

En ce qui concerne la disposition sur l'ADN, il a indiqué que le décret était encore en préparation, et qu'il inclurait une liste de pays dont l'état civil peu fiable justifierait de permettre le recours au test.

Sur le volet « justice et droit pénal », M. Jean-Jacques Hyest, président, s'est félicité de la rapide application de la loi n° 2007-1545 du 30 octobre 2007 instituant un Contrôleur général des lieux de privation de liberté, dont toutes les dispositions sont applicables. Il s'est déclaré satisfait de la nomination de M. Jean-Marie Delarue au poste de Contrôleur général des lieux de privation de liberté, par décret du Président de la République du 13 juin 2008.

Il a indiqué que la loi organique n° 2007-1787 du 20 décembre 2007 relative à la simplification du droit faisait également l'objet d'une application très satisfaisante.

Concernant la loi n° 2007-291 du 5 mars 2007 tendant à renforcer l'équilibre de la procédure pénale, M. Jean-Jacques Hyest, président, a indiqué qu'elle était applicable dans son ensemble, depuis la publication du décret n° 2008-54 du 16 janvier 2008 modifiant le code de procédure pénale et relatif aux pôles de l'instruction. L'autre volet majeur de la loi, l'enregistrement audiovisuel, en matière criminelle, des interrogatoires des personnes placées en garde à vue et des personnes mises en examen, a également fait l'objet des mesures d'application nécessaires très rapidement après l'entrée en vigueur de la loi, puisque l'enregistrement audiovisuel des interrogatoires est devenu obligatoire le 1er juin 2008.

Enfin, il a présenté les principales modifications induites par la loi organique n° 2007-287 du 5 mars 2007 relative au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats, entrée en vigueur depuis le 1er juin 2007, à l'exception de deux mesures, subordonnées à un décret en Conseil d'Etat non encore publié. Il a exprimé sa satisfaction de voir le nouveau dispositif s'inspirer largement des recommandations formulées par la mission d'information conduite par MM. Pierre Fauchon et Charles Gautier.

Evoquant la fonction publique, M. Jean-Jacques Hyest, président, a rappelé que quatre dispositions de la loi n° 2007-209 du 19 février 2007 relative à la fonction publique territoriale requièrent encore leurs textes d'application. Il a insisté sur le décret prévu par l'article 54 pour fixer les modalités d'intégration dans une filière de la fonction publique territoriale des titulaires d'un emploi spécifique de catégorie A, actuellement en instance d'arbitrage avec la direction générale de l'administration et de la fonction publique.

Evoquant diverses lois votées au cours de la session, M. Jean-Jacques Hyest, président, s'est déclaré satisfait de l'application de la loi n° 2007-1544 du 29 octobre 2007 de lutte contre la contrefaçon, qui a fait l'objet d'un rapport du Gouvernement remis au Parlement le 20 juin 2008.

Il a déploré que la loi n° 2008-582 du 20 juin 2008 renforçant les mesures de prévention et de protection des personnes contre les chiens dangereux prévoit une entrée en vigueur différée de certaines mesures, d'autant que la mise en oeuvre rapide de la loi est souhaitée par les maires et les professionnels de la filière canine, ainsi que les associations de victimes. La parution des décrets d'application de la loi, nécessaires à la mise en oeuvre des principales dispositions du texte, devrait être progressive.

Concernant la loi n° 2007-210 du 19 février 2007 portant réforme de l'assurance de protection juridique, il a indiqué que l'avant-projet de décret relatif à la prise en charge au titre de l'aide juridictionnelle des frais non couverts par un dispositif de protection juridique avait reçu un avis favorable du Conseil d'Etat lors de sa séance du 29 juillet 2008. Sa publication devrait intervenir avant la fin de l'année 2008. Il a également rappelé que la mission confiée par le Président de la République à Me Jean-Michel Darrois serait susceptible de faire des propositions destinées à rapprocher le champ des contentieux inclus dans l'assurance de protection juridique et celui couvert par l'aide juridictionnelle.

Enfin, il s'est inquiété de ce que la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs, qui ne devrait entrer en vigueur, pour la plupart de ses dispositions, que le 1er janvier prochain, n'ait pas fait l'objet de tous les décrets d'application nécessaires, malgré le très long délai - 22 mois accordé à cet effet par le législateur au Gouvernement.

En conclusion, M. Jean-Jacques Hyest, président, a souhaité rendre hommage au rôle précurseur du Sénat dans le contrôle de l'application des lois. Il s'est félicité de ce que la réforme constitutionnelle permette un renforcement et une mise en valeur accrue de cette action fondamentale afin de garantir une pleine efficacité de l'action du législateur.

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