Intervention de Nicolas About

Commission des affaires sociales — Réunion du 26 octobre 2006 : 1ère réunion
Contrôle de l'application des lois au 30 septembre 2006 — Communication

Photo de Nicolas AboutNicolas About, président :

Enfin, la commission a entendu M. Nicolas About, président, sur le contrôle de l'application des lois pour la période du 1er octobre 2005 et au 30 septembre 2006.

a rappelé que, conformément aux instructions du Bureau du Sénat, les commissions permanentes présentent chaque année un bilan de l'application des lois intervenues dans leur domaine de compétences. La synthèse de leurs travaux fait l'objet d'une communication du président du Sénat en conférence des présidents et est annexée au bulletin des commissions.

Cet exercice est fondamental pour apprécier la réalité de l'entrée en vigueur des lois et mesurer les difficultés pratiques d'application de la législation.

Au cours de l'année parlementaire, allant du 1er octobre 2005 au 30 septembre 2006, quarante-cinq lois ont été adoptées par le Parlement, dont six examinées au fond par la commission. Parmi ces textes, certains ont d'ailleurs suscité une très lourde charge, notamment la loi pour l'égalité des chances, qui a nécessité neuf jours de séance publique pour son adoption.

Le tableau complet de l'activité de la commission voudrait qu'on y ajoute les avis présentés pour la loi de finances et la loi « Engagement national pour le logement » et les trois textes encore en navette, notamment ceux relatifs à la protection de l'enfance et à la prévention de la délinquance, sans oublier les sept rapports d'information publiés cette année, dont deux élaborés par la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss).

Abordant les données chiffrées de l'application des lois, M. Nicolas About, président, a constaté que l'année écoulée est plutôt positive, qu'il s'agisse de textes récemment votés ou plus anciens. Sur les six lois votées cette année, seule, une n'est pas du tout applicable : il s'agit de celle relative à la retraite des personnes handicapées, issue d'une proposition de loi qu'il a déposée. Le fait qu'elle ait été très récemment promulguée explique sans doute cette situation.

Les cinq autres sont applicables, soit totalement, soit pour partie. Ainsi, la loi relative à l'accès des jeunes en entreprise, qui a remplacé le contrat première embauche (CPE), a reçu très vite les deux décrets d'application nécessaires. Le taux d'application des autres textes varie dans des proportions allant de 34 % (loi relative à l'égalité des chances) à 80 % (loi sur le retour à l'emploi des titulaires de minima sociaux).

Ces six lois ont appelé 120 mesures d'application, soit une moyenne de vingt mesures par loi, ce qui confirme la spécificité des textes à caractère sanitaire et social de requérir une grande partie des textes d'application : elles ont mobilisé, cette année encore, plus du quart de l'ensemble des mesures réglementaires requises par toutes les lois votées au cours de la session écoulée. Or, le taux de parution de ces textes réglementaires est en très forte hausse cette année : confirmant la tendance des trois sessions précédentes, il atteint désormais 43 %, soit la meilleure performance de la législature. On peut y voir la traduction concrète des nombreuses déclarations d'intention gouvernementales sur la publication rapide des décrets d'application.

Evoquant ensuite le cas des lois plus anciennes, M. Nicolas About, président, a souligné les progrès réalisés puisque, cette année, 241 mesures réglementaires ont été prises, contre 189 en 2004-2005 et 105 en 2003-2004. Cette progression s'explique essentiellement par le grand nombre de mesures d'application requis par la loi « handicap » (132 mesures) et, dans une moindre mesure, par la loi de programmation pour la cohésion sociale (63 mesures). Ainsi, la situation est bien plus favorable qu'elle ne l'était l'an dernier pour ces deux lois ; pour la première, 83 mesures sont intervenues, faisant passer son taux de parution des mesures réglementaires de 8 % à 71 % ; pour la seconde, il est passé de 45 % à 63 %.

Le même satisfecit est à adresser pour deux lois votées en 2005, qui étaient totalement inapplicables au 30 septembre 2005 et qui ont enfin reçu une bonne partie de leurs mesures réglementaires : la loi « assistants maternels et familiaux », applicable désormais à 88 % et la loi sur l'adoption, applicable à 80 %.

Enfin, trois lois votées au cours de la session précédente sont devenues pleinement applicables, notamment celle relative à la fin de vie. En conséquence, le taux d'application moyen de la session 2004-2005 est de 70 %, contre 17 % un an plus tôt.

En ce qui concerne les deux lois emblématiques de la législature, la réforme des retraites de 2003 et celle de l'assurance maladie de 2004, elles ont reçu respectivement 86 % et 81 % de leurs textes d'application. Il faut d'ailleurs préciser que la formule utilisée ici de « taux d'application » est en réalité impropre, car le taux d'application effectif d'un texte ne se mesure pas au seul degré d'intervention des décrets. Il doit être bien sûr calculé en prenant en compte les articles d'application directe. Il en résulte naturellement un degré de performance bien supérieur : ainsi, la réforme des retraites est désormais applicable à 95 %.

a ensuite évoqué quelques motifs d'insatisfaction et d'abord l'allongement des délais de parution des mesures réglementaires : cette année, 68 % des mesures ont été publiées en moins de six mois, contre 78 % en 2005 et 100 % en 2004. Sur ce point, la circulaire du 1er juillet 2004, qui réaffirmait le délai maximum de six mois pour l'intervention des textes d'application, n'a donc pas eu de véritable effet d'accélération.

Autre motif d'inquiétude, quelques lois sont encore insuffisamment applicables, et notamment deux des lois promulguées cette année qui n'avaient reçu, au 30 septembre 2006, qu'un peu plus du tiers de leurs décrets d'application : la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 et celle pour l'égalité des chances, alors même qu'elles avaient été toutes deux adoptées en urgence. Pour la loi égalité des chances, de nombreuses dispositions sont encore inapplicables : on mentionnera par exemple l'ouverture des classes préparatoires aux élèves provenant de zones d'éducation prioritaires ou l'instauration du curriculum vitae anonyme à laquelle le Gouvernement semble avoir renoncé au mépris du vote du Parlement. Cette situation est d'autant plus regrettable que ces deux dispositions sont issues d'initiatives sénatoriales, ce qui rend plus visible, voire choquante, l'absence de texte d'application.

Tout aussi critiquable est le fait que deux lois de 2004, relatives à la bioéthique et à la politique de santé publique, n'ont à ce jour reçu, respectivement, que 39 % et 48 % de leurs mesures d'application et ce, malgré les initiatives nombreuses prises par la commission pour en accélérer le processus.

a ensuite rapidement évoqué la situation des textes votés entre 1997 et 2004 : sur les 68 lois adoptées, 25 lois seulement sont pleinement applicables, et 37 en partie. Or, pour les lois plus anciennes, on peut craindre qu'au gré des alternances politiques, elles ne constituent plus une priorité aux yeux du Gouvernement et ne reçoivent jamais la totalité de leurs mesures réglementaires. Par exemple, la loi de 2002 de modernisation sociale n'est encore que très imparfaitement applicable, puisque, seule, la moitié des mesures d'application a été adoptée et que 66 mesures sont encore en attente.

Il a ensuite observé que, contrairement à l'an dernier, l'urgence n'a produit aucun effet d'accélération positif sur les délais de parution des mesures réglementaires, comme le montre le cas de la loi pour l'égalité des chances.

En revanche, un aspect semble plus favorable : le bon suivi réglementaire des dispositions législatives issues d'initiatives sénatoriales se confirme. Le taux de production approche les 33 %, assez proche de celui bénéficiant aux mesures introduites par voie d'amendements gouvernementaux (36 %), même s'il reste très inférieur à celui des mesures présentes dans le texte initial (51 %). En outre, il faut souligner qu'au cours de la session parlementaire écoulée, une proposition de loi d'initiative sénatoriale a été adoptée par le Parlement : celle relative à la pension de retraite des fonctionnaires handicapés.

Pour conclure, M. Nicolas About, président, a exposé les statistiques se rapportant aux rapports régulièrement demandés au Gouvernement par le législateur. Les statistiques en confirment le caractère peu opérant : sur les 101 rapports réclamés par les lois adoptées avant 2006, seuls 34 ont été effectivement déposés. Ce taux illustre de lui-même le peu d'efficacité de la méthode. Pour cette raison, la commission des affaires sociales n'a cessé de réduire ses exigences en la matière : de 27 rapports en 2004, sa demande a été ramenée à 14 en 2005 et à 4 seulement en 2006.

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