Intervention de Jean Catherine

Mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale — Réunion du 22 février 2007 : 1ère réunion
Pensions de réversion — Audition de Mm. Jean Catherine vice-président et jean collin secrétaire général de la confédération française des retraités cfr

Jean Catherine, vice-président :

a souligné que la CFR avait considéré la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites comme positive, dans la mesure où elle a amorcé l'harmonisation entre les différents régimes. Toutefois, cette loi comporte encore nombre d'insuffisances et d'imperfections.

En matière de réversion dans le secteur privé, des améliorations ont certes été apportées. Mais les pouvoirs publics ont trop hâtivement fait suivre la suppression de la condition d'âge par la mise en extinction de l'allocation veuvage. Or, pour une jeune veuve, dont le conjoint avait accumulé encore peu de droits au titre de sa retraite future, le montant de la réversion est très faible.

La réversion relève de deux logiques : contributive, dans la mesure où elle est liée au versement de cotisation par le conjoint du bénéficiaire, mais aussi de solidarité, en ce sens que la pension de réversion a pour objet d'assurer une ressource minimale à ce conjoint. Lors de la réforme de 2003, ce principe de solidarité a été oublié et il apparaît aujourd'hui nécessaire de modifier la réglementation en faveur des jeunes veufs et veuves.

a ensuite exprimé ses critiques à l'égard du changement de nature imposé par la loi de 2003 en ce qui concerne le critère de ressources prévu pour la réversion. Il ne s'agit plus dorénavant d'un critère d'ouverture du droit à pension, mais d'un montant plafond attribuable au conjoint survivant, l'allocation devenant dès lors différentielle : en cas de dépassement de ce plafond par la somme des revenus du bénéficiaires et de sa réversion, la pension est réduite à due concurrence.

La meilleure optique est celle suivie par le régime de la fonction publique, qui conçoit la réversion comme un droit patrimonial appartenant en propre au couple : aucune condition de ressources n'est ainsi opposée au conjoint survivant pour l'octroi de sa pension de réversion. Il s'agit d'une bonne formule, à condition qu'elle soit corrigée par l'instauration d'une pension minimale.

Les réversions du privé, en revanche, du fait de leur nature d'allocation différentielle, apparaissent comme une allocation de secours, une charité précaire et injuste.

a critiqué la démarche ayant conduit aux deux décrets d'application du 24 août 2004 qui ont malencontreusement aggravé la situation, en allongeant la liste des ressources prises en considération pour le calcul du plafond, notamment avec la prise en compte des pensions de réversion complémentaires, et en prévoyant chaque année un réexamen des ressources entraînant, le cas échéant, une révision de la pension. 200 000 survivants, principalement des veuves, risquaient d'être privées de pension de réversion. Le risque était particulièrement fort pour les classes moyennes.

La CFR a activement participé aux consultations, tant avec le conseil d'orientation des retraités (Cor) qu'avec le Gouvernement. En définitive, celui-ci a supprimé en décembre 2004 les dispositions les plus contestées des décrets du 24 août 2004.

Une nouvelle menace sur les droits des retraités vient toutefois d'apparaître avec le décret du 14 février 2007 sur la carte Vitale, qui réduit de quatre à un an la durée pendant laquelle l'ayant droit sans droits propres d'un assuré social décédé bénéficie du maintien de ses droits à l'assurance maladie. Cette mesure touche les veuves n'ayant jamais travaillé et ayant eu moins de trois enfants. En raison de son absence de statut d'association agréée, la CFR n'a pas été associée à une éventuelle discussion sur cette modification réglementaire, qui devrait représenter un impact particulièrement fort pour les retraités.

Interrogé par les rapporteurs sur l'opportunité de progresser dans le sens d'une harmonisation des règles d'octroi des pensions de réversion, M. Jean Catherine a estimé que la première question à se poser, avant d'élaborer des propositions, est celle de la philosophie même des pensions de réversion. Cette démarche préalable est d'ailleurs celle proposée par le Cor. Or, il existe aujourd'hui deux optiques radicalement opposées : celle de la fonction publique et des régimes spéciaux, d'une part, celle du régime général, d'autre part.

La CFR est favorable à une harmonisation complète des régimes dans le sens d'un alignement sur les critères de la fonction publique. De même, elle est favorable à une extension du bénéfice de la réversion aux formes de vie en couple autres que le mariage (Pacs et concubinage).

Sur le plan de la méthode toutefois, quelle que soit l'orientation retenue, il faut absolument exclure les réformes brutales, à portée rétroactive, comme en 2004. Toutes les solutions sont possibles si l'on se donne le temps de les mettre en oeuvre.

a rejeté l'idée selon laquelle la montée en puissance du travail des femmes justifierait la suppression à terme des pensions de réversion. Celles-ci effectuent, en effet, en moyenne, des carrières plus courtes que celles des hommes, du fait en particulier des maternités, et elles sont plus que les hommes soumises au travail à temps partiel. Au total, les droits propres qu'elles acquièrent sont globalement inférieurs à ceux de leurs conjoints, ce qui se traduit par des pensions de retraite notoirement plus faibles. En l'absence d'égalité dans les faits entre les hommes et les femmes, il apparaît indispensable de conserver les pensions de réversion.

Par ailleurs, la législation française ne tient pas suffisamment compte des situations de veuvage avec enfants à charge. Il n'existe ainsi pas d'allocation d'orphelin au sein du régime général.

En conclusion, M. Jean Catherine a abordé les exemples étrangers, en citant le cas de l'Allemagne, où les conjoints peuvent décider de mettre en commun, en vue d'un partage égalitaire, les droits à la retraite qu'ils acquièrent au long de leur carrière. Cette technique, dite du « splitting », s'inscrit dans une conception patrimoniale, où l'on considère que celui qui a moins travaillé que son conjoint dispose cependant des mêmes droits, dans la mesure où sa présence au foyer a favorisé la carrière professionnelle du conjoint et a contribué à l'acquisition de ses droits.

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