Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a procédé à l'audition de M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Invité par M. Jean-Paul Emorine à présenter le bilan de son action au ministère et les perspectives pour 2006, M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a indiqué avoir voulu mobiliser Bercy sur le chantier de la politique économique, après avoir fait le constat, lors de sa prise de fonctions, d'un ministère totalement absorbé par des difficultés structurelles et quasi quotidiennes en matière de finances publiques et de déficits budgétaires.
Soulignant que moins d'attention à l'économie de la part de son ministère, cela veut dire moins de pédagogie vis-à-vis des citoyens, une moindre prise de conscience, par ceux-ci, des enjeux et des solutions à adopter, et donc plus de difficultés à accepter des décisions parfois contraignantes, il a justifié l'ouverture d'un débat public sur les finances publiques, mettant en lumière la réalité de la dette résultant d'erreurs de gestion passées. Faisant valoir que les intérêts de la dette publique s'élèvent à environ 50 milliards d'euros, soit l'équivalent du produit de l'impôt sur le revenu, il a rappelé que les mesures sur la retraite à 60 ans, les 35 heures de travail hebdomadaire ou les embauches massives de fonctionnaires entre 1981 et 2002 se retrouvent aujourd'hui dans la dette publique, les allégements de charge assumés par l'Etat pour compenser le passage aux 35 heures représentant, à eux seuls, environ 100 milliards d'euros en cumulé. C'est la première fois, a-t-il ajouté, que dans l'histoire économique de notre pays, des acquis sociaux ne sont pas financés par la croissance, mais mis à la charge des générations futures, à travers le remboursement de la dette publique. Il a également tenu à souligner qu'entre 1997 et 2002 la plupart des pays européens avaient réduit significativement le montant de leur dette, hormis l'Allemagne, en raison du coût économique lié à l'intégration de l'Allemagne de l'Est et la France, dont l'endettement public avait continué à progresser.
Il a considéré que la mission confiée à M. Michel Pébereau et à laquelle avaient participé des hommes politiques de différentes tendances, des syndicalistes et des représentants de la société civile, avait aidé à l'acceptation d'une politique budgétaire « vertueuse » à travers l'adoption du programme de désendettement et de croissance adopté pour les cinq ans à venir. Celui-ci, a-t-il fait valoir, redonne un cap économique à la France, en permettant de revenir en dessous du seuil de 60 % du PIB pour le niveau de l'endettement public, sur la base d'un taux de croissance réaliste et d'un niveau de contraintes acceptable.
Evoquant la comparaison avec un ménage voulant réduire son endettement, il a considéré qu'il n'y avait que trois solutions possibles, la réduction des dépenses, la vente d'actifs non essentiels et l'augmentation du temps de travail pour dégager des revenus supplémentaires.
Il a, en conséquence, justifié les décisions récentes permettant de résorber certains points de blocage freinant le retour à l'activité, évoquant les mesures concernant le travail des seniors ou encore les réformes liées au contrat de travail.
Présentant ensuite les perspectives de son ministère pour les mois à venir, il a déclaré vouloir approfondir ce besoin de pédagogie et s'intéresser aux différents secteurs d'activité de l'économie française, qui relèvent chacun d'un fonctionnement particulier.
Il a fait valoir le rôle stratégique du secteur agricole, qui emploie 5 % des actifs, pour répondre aux enjeux de sécurité alimentaire et contribuer à l'aménagement des territoires. A cet égard, il a considéré comme indispensable le maintien de la politique agricole commune.
Après avoir relevé, pour s'en féliciter, que l'emploi industriel représentait encore 20 % des emplois, et que le choix d'une politique industrielle ambitieuse s'imposait pour soutenir l'innovation et la recherche, il a évoqué l'importance du secteur des services de proximité et des services à la personne.
Indiquant ensuite qu'environ la moitié du secteur tertiaire relevait désormais du secteur de l'immatériel et des savoirs et qu'il s'agissait d'emplois à très forte valeur ajoutée, il a considéré qu'il s'agissait d'une véritable révolution du système productif, qu'il fallait accompagner.
a ensuite déclaré vouloir suivre attentivement les questions de l'énergie, faisant valoir la nécessité d'une politique énergétique ambitieuse et moderne pour répondre de façon adaptée à la disparition programmée des énergies fossiles.
Il s'est félicité, à ce titre, que le G7 ait accepté, sur la demande de la France il y a déjà près d'un an, de réfléchir aux modalités d'une politique commune de l'énergie et a annoncé par ailleurs qu'il avait remis tout récemment aux autorités communautaires un mémorandum sur l'énergie.
Il a enfin souligné, à propos de la fusion envisagée de GDF et de Suez, qu'il s'agissait d'un projet industriel cohérent, permettant d'anticiper sur la nécessaire restructuration du secteur de l'énergie, pour faire face à l'ouverture à la concurrence et à l'ampleur des investissements à prévoir en ce domaine. Soulignant que les deux entreprises avaient, depuis plusieurs mois, identifié des synergies communes et des complémentarités fortes, il a indiqué que l'Etat actionnaire avait donné son feu vert à l'ouverture d'une phase de concertation approfondie sur ce projet industriel, à laquelle les syndicats étaient invités à participer. Ensuite, a-t-il ajouté, le Parlement aura à donner son accord à travers l'examen du projet de loi autorisant l'Etat à réduire sa participation dans le capital de GDF.